[MUSIQUE] [MUSIQUE] Nous avons vu dans la leçon précédente comment l'observation clinique peut rechercher les signes et les symptômes de l'autisme dans des moments de jeu en fonction de l'âge de l'enfant, ou des moments de conversation si c'est un enfant plus grand, ou encore si c'est un adulte, dans une discussion avec lui. Ce qu'on voulait vous montrer maintenant ici aussi c'est comment on peut avoir un outil structuré qui nous permette aussi de quantifier de manière très précise ces signes. C'est vraiment un outil qui est très précieux, que ce soit dans un contexte clinique, parce que ça nous permet de quantifier les symptômes et éventuellement l'évolution de ces symptômes, ou alors dans un contexte de recherche qui nous permette vraiment de pouvoir faire un suivi de ces enfants, adolescents et adultes. Cet outil s'appelle l'ADOS, Autism Diagnostic Observation Schedule, et de nouveau, nous avons la chance d'avoir avec nous Chiara Fiorentini qui est psychologue et formatrice certifiée pour cet outil de ADOS. Merci Chiara d'être là avec nous. >> Merci à vous. >> Est-ce que tu peux nous parler un petit peu de cet ADOS, de qu'est-ce que c'est que cet ADOS? >> L'ADOS suit un peu le même principe de l'ADI, c'est-à-dire on a une échelle d'évaluation ou plus précisément d'observation semi-structurée avec un ensemble d'activités qu'on est censé proposer d'une certaine manière, avec évidemment les marges de manœuvre qu'il faut pour s'adapter à l'enfant, à la situation, au contexte de l'évaluation, et qui nous permet de repérer un ensemble de signes, de comportements et de symptômes qui potentiellement sont associés à la présence d'un TSA. >> Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus? Concrètement, ça marche comment? Est-ce que tout le monde fait la même activité? >> Pas tout à fait. Il y a cinq modules différents, à partir d'un module qui s'appelle Toddler pour les tout-petits jusqu'au module 4 qui est censé être utilisé avec les adolescents plus âgés et les adultes. Donc l'ADOS peut être administré à tout âge mais les activités varient en fonction de l'âge et aussi en fonction du niveau de langage du patient. Parce qu'on peut très bien avoir un adulte qui n'a pas un langage fluide ou a des difficultés de langage, et les activités vont prendre ça en compte aussi. Avec les petits, on a les parents dans la salle, et ce qu'on prend en compte n'est pas seulement la réponse de l'enfant à l'examinateur mais aussi la réponse aux parents. Selon l'idée que pour un petit, il est tout à fait normal de pouvoir s'adresser au parent, chercher son réconfort, etc. Mais l'idée est vraiment que les activités sont seulement un média pour solliciter, encourager l'interaction et la communication, et c'est vraiment l'analyse de l'interaction qui fait la différence. >> Mais concrètement, chez un tout-petit, c'est quoi les activités que tu vas proposer? >> Toute observation est basée, prend en compte le niveau de développement et les compétences sociales, connaissances et avoirs à un certain âge et à un certain niveau de développement. Donc chez un petit qui s'exprime par exemple par mots isolés ou il commence juste à faire des petites phrases, ce qu'on regarde c'est sa capacité de demander, de montrer de l'intérêt, de partager son plaisir, de redemander une activité qui lui plaît, d'attirer l'attention de quelqu'un sur quelque chose qu'il aime. Chez un plus grand, on va être plus attentif aux compétences communicatives, comme on verra pour la suite. >> Je te propose qu'on regarde une vidéo d'un tout-petit pour commencer. [BRUIT] [BRUIT] >> Encore. >> C'est les bulles! [BRUIT] [BRUIT] >> Encore. >> Encore les bulles, [BRUIT]. >> Là, ce qu'on vient de voir, c'est une petite fille qui est en train de regarder l'examinatrice qui lui fait des bulles. C'est une activité qui normalement plaît beaucoup à cet âge. Et l'idée est d'observer si l'enfant redemande et partage son plaisir. Et ça, c'est exactement ce qu'on observe. La petite regarde l'examinatrice, elle se montre surprise, elle pointe du doigt, elle vocalise en s'adressant à l'examinatrice, elle partage son plaisir. Donc on a tout ce qu'il faut à son âge pour dire que la communication est bien en place. >> C'est vrai que les bulles, ça marche très bien chez un tout-petit. Chez un plus grand, qu'est-ce qu'on fait? >> Ça dépend toujours du niveau de langage. Chez les plus grands, la communication devient vraiment le focus de l'observation. Il y a par contre toujours des activités. Notamment, le jeu de construction est une activité qui fait un peu la transition entre les activités pour les petits et les activités pour les grands et qui nous permet d'investiguer la demande. Mais sinon, tout ce qu'on a comme matériel devient l'opportunité pour avoir une conversation avec l'examinateur et voir comment le patient s'y prend dans cet échange communicatif. >> Peut-être regardons un petit moment de jeu de construction, et puis comme ça, après, tu nous diras ce que tu vois sur cette vidéo. >> Est-ce que tu aimes les puzzles? >> Moi, je crois que je ne veux pas le faire. Oui. >> [RIRE] >> Tu as vu, c'est drôle là. >> Moi, je pense que c'est plus drôle ça, non? Regarde, j'ai plein de pièces pour toi. >> Là, je voulais faire ça. >> Ça? >> Ça, c'est rigolo, ça. >> Oui, je pense que c'est très rigolo. Je te donne quelques pièces bleues et roses, et si tu en as besoin d'autres, tu me diras. Ça va? C'est génial. >> C'est génial ce que je fais. Je veux un autre. >> Une bleue? >> Oui. >> Oui, deux même. >> Tu es bien installé? >> Là, comme vous avez pu voir, on a une activité qui a l'air d'un puzzle que l'enfant doit compléter à table en présence de l'examinateur. Mais en vrai, ce qui nous intéresse c'est la capacité de l'enfant à demander, à verbaliser cette demande de manière appropriée, et pour faire ça, l'examinateur le met dans la condition de devoir redemander des pièces. Elle lui donne quelques pièces et puis garde les autres pour elle. Et l'enfant, à un moment donné, montre qu'il a besoin de plus de pièces, pointe, regarde l'examinateur. Et à la fin, on voit un joli regard du partage de plaisir. Encore une fois, une communication très efficace pour le but qu'on doit obtenir. >> Et chez un plus grand, tu nous a parlé de discussions, tu peux nous dire un petit peu plus comment ça se passe? >> Oui. Chez un plus grand, l'examinateur doit vraiment essayer de faire de la conversation tout le temps. Peu importe les activités qui vont être administrées, l'idée est quel échange je peux avoir avec cette personne? On essaie de parler de plusieurs choses qui pourraient brancher le patient, et puis on voit quelles capacités communicatives l'enfant ou la patient nous montre pour soutenir l'échange. Ça paraît simple, mais dans une communication, il y a beaucoup de choses qu'on doit savoir faire. On doit attendre de pouvoir parler, on va faire des commentaires si l'autre dit quelque chose, on va poser des questions pour montrer notre intérêt. Donc on va voir si tout cela est en place pour avoir une communication fluide entre deux personnes. >> Finalement, ce que tu nous as dit, c'est que chez des tout-petits, on faisait des activités appropriées pour l'âge. Chez des plus grands, on commence à avoir un peu plus de conversation mais quand même toujours une activité. Chez des encore plus grands, c'est une conversation. Donc en fait, ce qu'on fait est très différent d'un âge à l'autre. Comment est-ce qu'on met tout ça ensemble à la fin pour que ce soit comparable? >> Déjà, d'abord il faut dire que ça semble très différent, mais l'ADOS est censé décortiquer ce qu'on observe dans des compétences communicatives assez basiques qui sont l'échange du regard, la possibilité d'offrir des commentaires, le partage du plaisir, la réciprocité. Et ça, c'est assez stable à travers les âges, même si on les observe à travers des comportements différents. Ensuite, comme pour l'ADI, on a des scores associés qui vont être transférés dans un algorithme adapté. Et en plus, on a aussi ce qu'on appelle score de sévérité ou score de comparaison, qui nous permet de comparer le résultat d'un patient à un certain module fait à un certain âge avec le score obtenu à un âge différent avec un niveau de langage différent. Ça nous donne une idée de l'évolution aussi du patient. >> Donc toi, tu dirais que l'ADI qu'on a vu avant et puis l'ADOS sont finalement des outils qui sont assez complémentaires? C'est juste? >> Je pense qu'on peut dire ça. On peut dire que l'ADI nous permet d'avoir une idée, une perspective sur l'évolution du patient, sur la période diagnostique. C'est un regard sur le passé, si on voit le patient plus tard par rapport à l'âge du diagnostic, l'âge de l'émergence des symptômes. Par contre, l'ADOS, c'est une photo faite au moment où on voit le patient. >> Super, merci beaucoup, Chiara. >> Merci à vous. [MUSIQUE] [MUSIQUE]