[MUSIQUE] [MUSIQUE] La première étape dans un bilan diagnostique dans le parcours qui va vers le diagnostic quand on pense à un diagnostic de TSA c'est l'anamnèse. Qu'est-ce que c'est l'anamnèse? L'anamnèse c'est la récolte d'informations, la récolte de l'histoire médicale de cet enfant, de cet adolescent ou de cet adulte, dans le but de pouvoir savoir si on va avoir suffisamment de critères pour poser ou non le diagnostic de TSA. Cette anamnèse se fait en général au cours de la première rencontre avec soit le patient, soit avec sa famille, et les personnes qui sont vraiment présentes pendant cette anamnèse, en général, si on parle d'un enfant, c'est les parents. Et quand je dis les parents c'est qu'on essaie d'avoir les deux parents. Les deux parents parce que c'est important de pouvoir avoir un maximum d'informations sur comment cet enfant se présente dans différents contextes et qu'on puisse aussi confronter les différents points de vue si les points de vue sont différents, et c'est aussi particulièrement important que les deux parents puissent comprendre ce que nous on cherche dans une anamnèse et qu'est-ce qui va nous amener à la fin à poser ou non le diagnostic d'autisme, puisqu'à la fin de notre bilan, ils vont avoir ou non un diagnostic et ils auront besoin d'avoir compris pourquoi on pense que ce diagnostic est présent ou non chez leur enfant. Comme c'est le premier entretien, c'est aussi un moment critique pour créer un climat qui soit propice à cet échange avec les parents, pour que les parents se sentent en confiance pour partager toutes leurs inquiétudes, leurs doutes, leurs préoccupations par rapport à l'enfant. C'est vraiment les parents qui sont les spécialistes de leur enfant. C'est eux qui connaissent comment il se comporte dans la vie de tous les jours, à la maison, dans les contextes différents. Et on veut qu'ils puissent partager tout ça avec nous pour qu'à la fin, le clinicien soit en mesure de décider et de trier parmi toutes ces informations quelles sont les informations pertinentes pour poser ou non un diagnostic d'autisme. Ça, c'était pour si on est face à un enfant, en général, on reçoit les parents. Un adolescent, en général, on reçoit aussi les parents. Mais si c'est un adulte qui consulte parce que lui se pose des questions par rapport à son propre fonctionnement, il a des doutes si oui ou non il pourrait présenter un trouble du spectre de l'autisme, en général, la personne qui va répondre à cette anamnèse c'est l'adulte. Et cet adulte va nous dire comment lui fonctionne. On va voir un certain nombre de signes et symptômes qu'on va pouvoir avoir dans sa vie actuelle. Mais il est vrai que le diagnostic d'autisme, on le pose par rapport au passé, par rapport aux signes précoces et aux premières années du développement de cette personne. Donc si on est face à un adulte, que c'est possible parce que les parents sont disponibles et parce que l'adulte est d'accord, ce sera aussi très intéressant de voir si on peut convoquer les parents pour avoir aussi des informations sur les premières années de vie de cet adulte pour voir comment il s'est développé, parce que ça va nous donner des informations qui sont très pertinentes pour se décider ou non par rapport au diagnostic d'autisme. Donc au-delà de créer un climat qui soit propice à l'échange, le premier entretien a aussi le but de pouvoir récolter un certain nombre d'informations. Ces informations, c'est vraiment les préoccupations actuelles des parents, le parcours diagnostique qui les a amenés jusqu'à nous, qui les a envoyés, pourquoi, comment, et puis leurs préoccupations sur des signes particuliers du diagnostic d'autisme. Je vous propose qu'on voie maintenant un petit bout de vidéo, des parents qui sont adressés à nous par un pédiatre qui s'inquiète pour leur fils qui a deux ans et demi. >> Bonjour. On se rencontre donc aujourd'hui pour Élie parce que votre pédiatre se faisait un peu de souci, donc elle a pensé que c'était important qu'on puisse approfondir certaines choses par rapport à son développement. Vous, vous pouvez me dire un petit peu qu'est-ce qui vous inquiète? Est-ce qu'il y a des choses qui vous inquiètent chez Élie? >> C'est pas beaucoup parce que c'est notre premier, mais c'était surtout à la crèche. Ils se sont inquiétés, et après, on avait consulté le pédiatre qui nous a conseillés de venir ici. >> Oui. >> Mais vous, il y a des choses qui vous préoccupent chez lui? >> Oui, un peu quand même. Le pédiatre aussi a dit qu'il ne regarde pas vraiment dans les yeux. En effet, j'ai l'impression que c'est difficile de capter son regard parfois. Je dois vraiment l'appeler beaucoup de fois, je dois le secouer parfois pour avoir son attention. Ça, c'est un peu peut-être bizarre. >> Et après aussi il ne parle pas. >> Il ne parle pas, d'accord. Qu'est-ce qu'il parle? Il dit quelques mots quand même ou il ne parle pas du tout? >> Non. >> Quelques, >> Même maman, papa, c'est rare. >> Quelques, oui. >> Très peu? >> Il a dit peut-être, >> Mais donc comment est-ce qu'il vous communique ses besoins s'il a besoin de quelque chose? >> Il vient vers nous, il crie, il nous touche. C'est plutôt comme ça. >> C'est plutôt comme ça, d'accord. >> Oui. >> Et donc vous, vous anticipez? Vous savez finalement de quoi il a besoin? >> Oui, on le connaît. >> Vous le connaissez bien? >> On le connaît, oui. On le comprend. >> Oui, c'est vrai. >> Dans ce premier entretien, il est vraiment important de pouvoir rechercher les signes d'une manière qui soit aussi compréhensible par les parents. Maintenant, grâce à Internet, on a aussi des familles qui sont particulièrement inquiètes, qui cherchent aussi sur Internet à quoi ressemblent les symptômes de l'autisme et qui arrivent en étant extrêmement avisés sur ce qu'ils doivent chercher chez leur enfant ou non qui sont des signes pertinents pour poser le diagnostic d'autisme. Mais ce n'est pas toujours le cas. On a des familles qui aussi sont moins connaisseuses de ces symptômes-là , et c'est notre travail d'essayer de chercher ces signes. Il y a aussi des familles pour lesquelles c'est très clair qu'est-ce qu'un enfant devrait faire à quel âge, par exemple parce qu'ils ont déjà eu des aînés et qu'ils voient très clairement chez cet enfant qu'il y a une déviation par rapport au développement typique, mais d'autres familles qui ont peut-être moins l'habitude de voir des jeunes enfants, pour lesquels c'est le premier enfant, et pour lesquels on va devoir aller avec eux pour essayer de comprendre est-ce que ces manifestations sont typiques ou non. C'est des choses qui sont moins claires pour eux par rapport au développement de leur enfant. Il est aussi particulièrement important de comprendre comment les signes et les symptômes de l'autisme impactent finalement le quotidien de cet enfant. C'est-à -dire, est-ce que finalement, son autonomie au quotidien, que ce soit dans ses activités scolaires s'il est scolarisé, à la crèche si c'est un petit, dans ses activités au quotidien avec d'autres enfants, ou si c'est un jeune adolescent ou adulte dans sa vie professionnelle, comment est-ce que tout ceci est impacté par les signes d'autisme. C'est des choses qui sont importantes et qui vont nous donner une certaine idée de comment le fonctionnement entier de la personne ou de la famille est modifié par les symptômes d'autisme. C'est aussi important par exemple de pouvoir identifier, est-ce qu'il y a des routines particulières où toute la famille doit suivre une routine en particulier qui est imposée par cet enfant-là . C'est aussi important de savoir si par exemple il y a des intérêts spécifiques qui sont très atypiques et donc qui font en sorte que les répercussions de l'autisme sont importantes sur l'ensemble de la dynamique familiale. Puisqu'au moment où on va poser le diagnostic, si on se dirige vers un diagnostic qui est posé, ce sera quelque chose qu'il sera important de prendre en compte dans le plan de traitement pour le futur. Au-delà de rechercher les signes et les symptômes de l'autisme, il est aussi important de faire connaissance d'un point de vue global sur la personne depuis le tout début. C'est-à -dire depuis le tout début, depuis éventuellement la conception, s'il y a eu des techniques de procréation médicalement assistée qui ont été nécessaires. C'est une question qui est sensible mais c'est aussi une question qui est importante, puisqu'on sait qu'il y a un risque qui peut être augmenté de troubles du développement, et en particulier de troubles du spectre de l'autisme s'il y a eu des techniques de procréation médicalement assistée. On va aussi faire un petit peu rapidement le tour de la grossesse, est-ce que c'est une grossesse qui a eu des complications, est-ce qu'il y a eu des médications particulières, est-ce que l'accouchement et la période périnatale se sont passés sans complications, parce que tout ça sont des facteurs de risques qui pourraient être en lien avec une augmentation de la prévalence d'autisme, donc c'est des choses qu'on a envie de pouvoir savoir. Et c'est toujours délicat de les poser dans un deuxième temps, donc on aime bien poser ces questions aussi au cours du premier entretien quand on fait vraiment connaissance avec la famille et la globalité des symptômes de cet enfant. >> Moi, j'aimerais vraiment revenir un petit peu avec vous pour faire connaissance avec Élie. C'est vraiment de pouvoir revenir depuis le début, c'est-à -dire même avant qu'Élie soit là , comment ça s'est passé pour vous, et puis ensuite la grossesse, puis on fera le développement précoce. Mais vous allez m'expliquer un petit peu comment c'était même avant qu'Élie n'arrive. C'est votre premier enfant, c'est juste? >> Oui. C'est mon premier enfant, oui. Ce n'était pas facile. [RIRE] On l'a beaucoup cherché. >> Vous l'avez beaucoup attendu? >> Oui, beaucoup attendu. >> C'est-à -dire? Est-ce que vous avez fait des fausses couches? >> Non, que je n'arrivais pas à tomber enceinte. Et du coup, on a eu un peu de difficultés. On a décidé quand même de faire une FIV mais c'était dur, oui. >> C'était une période qui était difficile pour vous? >> Oui. >> Mais après, ça a marché assez vite? >> Après oui. Après, ça allait bien. On est contents quand même. >> Qu'il soit là , oui. >> Oui. >> Et la suite de la grossesse, ça s'est passé comment? >> Ça a été. Premier mois, c'était quand même normalement un peu dur, mais après, ça allait, et l'accouchement aussi s'est bien passé. >> On veut aussi recueillir un certain nombre d'informations sur le développement médical de cet enfant. Est-ce qu'il y a une histoire particulière, d'autres maladies sur le plan somatique, des malformations, des opérations, c'est un certain nombre d'informations qui vont être nécessaires pour nous. Éventuellement aussi dans le diagnostic différentiel, si on veut penser à des syndromes neurogénétiques particuliers ou à un diagnostic différentiel différent. Je pense aussi à des diagnostics différentiels en particulier sur des maladies psychiques qui ne seraient pas des manifestations d'autisme mais quelque chose de différent. Par exemple chez un adolescent des manifestations de psychoses. Et là , il y a vraiment tout un module qui est là -dessus et qui va nous aider à identifier quels sont les autres diagnostics auxquels il faut penser quand on n'est pas en train de parler d'autisme. C'est très important que cette anamnèse-là ne soit pas uniquement focalisée sur est-ce qu'il y a de l'autisme oui ou non, mais est-ce qu'il y a de l'autisme avec autre chose, donc l'autisme est une comorbidité, ou est-ce que ce n'est pas de l'autisme mais c'est une autre maladie psychique ou un autre trouble neurodéveloppemental. C'est ce qu'on appelle le diagnostic différentiel. >> Il n'a jamais eu de souci particulier sur le plan somatique, donc des maladies, des opérations, des choses comme ça? Non. >> Non, bonne santé, pas de problème. >> Au-delà de toutes les questions qu'on va poser autour de cet enfant, il est aussi important de pouvoir retracer quelle est l'histoire familiale, est-ce qu'il y a dans l'histoire familiale d'autres personnes qui ont eu des symptômes qui étaient des symptômes similaires. C'est-à -dire est-ce qu'ils ont parlé tard? Est-ce qu'ils ont eu des difficultés dans leur communication sociale? Est-ce qu'il y a des personnes qui auraient reçu un diagnostic d'autisme? Et ça, c'est important parce qu'on sait qu'il y a une certaine composante génétique, et donc il y a une augmentation du risque si dans la famille il y a un certain nombre de personnes qui ont eu d'autres troubles neurodéveloppementaux, en particulier de l'autisme. On va chercher des troubles neurodéveloppementaux qui sont aussi un petit peu différents comme par exemple déficits d'attention, éventuellement psychoses, maladies bipolaires. Ça, c'est un certain nombre de choses qu'on peut éventuellement chercher. Mais le plus important, c'est vraiment est-ce qu'il y a des symptômes qui sont dans la lignée du spectre de l'autisme dans la famille proche et avec quelques degrés d'éloignement. >> Une autre question que j'avais pour vous c'est est-ce que dans la famille, que ce soit de votre côté monsieur ou de votre côté madame, il y a des personnes qui ont eu des difficultés de développement, un petit peu comme présente Élie? >> Moi, un petit peu, non? >> Oui. >> Vous quand vous étiez jeune? >> Oui, je pense. J'ai mis un peu de temps à parler aussi. >> Vous savez à quel âge? Vos parents vous ont dit? >> Trois ans et demi. >> OK. >> Oui. >> Et vous, de votre côté, madame? >> Maintenant que vous me dites ça, je pense à ma sœur qui en effet avait de la peine. Elle a commencé à parler aussi un peu en retard. Au début, à l'école, c'était un peu compliqué. Elle a eu besoin d'avoir une aide pour elle les premières années parce qu'elle avait des difficultés à comprendre certaines choses. Elle a eu des difficultés au niveau de l'apprentissage. Maintenant, ça va, elle va bien, mais c'est vrai qu'au début, elle était un peu en retard au niveau des autres enfants. Juste ça. Le reste, non. >> À l'issue du premier entretien, on a donc un certain nombre d'informations sur cette famille qu'on vient de rencontrer ou cette personne qu'on vient de rencontrer qui nous permettent déjà d'avoir une première idée par rapport à la présence ou non de symptômes du spectre de l'autisme. Mais ce n'est pas uniquement sur un seul entretien qu'on va baser nos observations. On va probablement avoir envie de compléter cette anamnèse probablement avec des outils structurés tels que l'ADI dont on parlera dans la prochaine leçon, et puis aussi avec une observation directe de l'enfant ou de la personne. Ça, c'est des choses que nous on peut faire en cabinet. Mais on a aussi envie de pouvoir savoir comment cet enfant, cet adolescent ou cet adulte se présente dans d'autres milieux. Si c'est un enfant et qu'il y a d'autres personnes qui nous l'ont adressé, par exemple le pédiatre, on va demander aux parents si on a l'autorisation d'échanger avec le pédiatre, si on a l'autorisation d'échanger avec une éventuelle logopédiste ou un logopédiste qui serait déjà dans la course ou d'autres personnes par exemple à la crèche ou à l'école, parce que c'est vraiment la pluralité des regards sur cet enfant dans des contextes différents qui dans certains cas ne sont pas évidents qui va nous permettre de se déterminer par rapport à la présence ou non du diagnostic du spectre de l'autisme. >> C'est vrai qu'on a discuté de beaucoup de choses par rapport au développement d'Élie dans cette première consultation aujourd'hui. C'est la première fois qu'on se rencontrait. Il y a beaucoup de choses qui vous préoccupent, qui préoccupaient aussi votre pédiatre. Moi, il y a deux, trois petites choses qui m'inquiètent dans ce qu'on a discuté. Mais je pense que c'est important qu'on puisse aller de l'avant et puis se revoir pour approfondir plus, que je puisse vraiment rencontrer Élie et qu'on puisse se déterminer par rapport à est-ce qu'il y a des difficultés dans son développement pour qu'on puisse intervenir s'il y a besoin. Ce que je vous propose c'est qu'on reprenne quelques rendez-vous pour approfondir ces questions-là , et puis à ce moment-là , on pourra vraiment avancer et vous donner une réponse claire par rapport à ces difficultés. OK? >> OK. >> L'anamnèse, c'est clairement le début d'une histoire et d'un parcours diagnostique. C'est vraiment important d'avoir les deux parents comme je vous le disais avant là -dedans et puis d'annoncer aux parents quel va être le déroulement à l'issue de ce premier entretien, comment on va avancer à partir de là . Puisqu'en général, on va faire ces autres entretiens dont je vous parlais, ces autres observations, et qu'à l'issue de ces quatre, cinq, six observations, on va pouvoir se déterminer ou non par rapport à la présence d'un diagnostic d'autisme. Et c'est important de pouvoir commencer ce parcours en ayant les deux parents ou la personne qui soient là puisqu'à la fin, ils ont besoin de comprendre pourquoi on a posé ce diagnostic. S'ils sont passés par l'ensemble du processus en étant présents, en ayant entendu nos questions, en ayant réfléchi avec nous sur est-ce que ces signes ou ces symptômes sont là pour leur enfant, ça va être, du coup, beaucoup plus facile au moment où on doit se déterminer et leur expliquer si oui ou non les critères étaient remplis, puisqu'ils auront compris comment on a récolté ces informations. Donc c'est vraiment le premier entretien qui est un moment critique pour créer un climat d'échange et puis commencer ce parcours diagnostique qui est un parcours qui est finalement relativement long et qui arrive à déterminer à la fin un diagnostic ou non du spectre de l'autisme. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE]