[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans cette séquence, nous allons parler de différentes tâches qui ont été en eye-tracking, et qui testent l'attention, et qui sont aussi pertinentes dans le domaine de l'autisme. Dans le module précédent, nous avons appris une conceptualisation du processus attentionnel, qui est celle de Posner et ses collaborateurs, et qui distingue trois réseaux impliqués dans ce processus assez complexe. Il s'agit du réseau d'alerte, du réseau de l'orientation et du réseau exécutif. Aujourd'hui, nous allons nous concentrer plus sur les premiers deux réseaux parce que ces deux réseaux ont reçu plus d'attention en ce qui concerne le domaine d'eye-tracking, et donc ils sont assez pertinents pour l'autisme. En ce qui concerne le processus d'alerte qu'on discutait, c'est un processus qui est nécessaire pour maintenir la sensibilité à l'information entrante. Pour faire ça, ce système fonctionne à travers deux états. Il y a un état dit tonique, qui fluctue pendant la journée. Le matin, on est un peu plus éveillé, et le soir la vigilance montre une baisse. Et le deuxième état de ce système est plus transitoire, et donc il est connu sous le nom d'alerte phasique. C'est le moment où on mobilise nos ressources, on fait attention très focalisée sur un élément de notre environnement. Les recherches ont montré des particularités du fonctionnement de ce système en lien avec l'autisme. Les personnes qui présentent des symptômes de TSA se montrent plus rapides mais aussi plus précises à détecter, par exemple, une cible parmi différents distracteurs. Ceci est vrai dès l'âge très jeune jusqu'à l'âge adulte, et aussi à travers le continuum de sévérité des symptômes. L'hypothèse qui tend à expliquer cette aptitude supérieure à la norme dans l'autisme est qu'il s'agit d'une hyperactivation du système d'alerte dans ce trouble. Pour mesurer ça dans l'eye-tracking, une étude récente a utilisé une tâche très élégante où ils ont montré aux enfants très jeunes qui présentent des symptômes de TSA mais aussi aux enfants témoins qui ne présentent pas de symptômes de TSA, ils ont montré une cible qui bouge. C'était une animation assez ludique. En fait, la cible s'arrête, et il y a une croix de fixation qui prépare l'arrivée d'une nouvelle planche de stimuli. Dans cette nouvelle planche de stimuli, il faut repérer la cible parmi les distracteurs. Cette fois, la cible se trouve parmi les distracteurs qui ont la même couleur mais la forme différente. Il est relativement simple de détecter la cible parce qu'il y a seulement un élément qui les distingue, c'est la forme, donc c'est assez automatique et sans un effort particulier. Ensuite, ils ont augmenté la difficulté de cette tâche en emmenant des distracteurs qui, cette fois, auront la différence selon la couleur mais aussi selon la forme. Et cette fois, il faut plus se concentrer et il faut avoir une attention plus focalisée pour trouver la cible parmi les distracteurs. Ce qui a été trouvé, c'est que les enfants avec un TSA étaient deux fois plus performants à détecter la cible parmil les distracteurs à travers différents niveaux de difficulté. Ceci était mis en lien directement avec l'hyperactivation du système d'alerte qui a été mesurée par la dilatation des pupilles. On sait que la pupille se dilate quand on est dans un environnement sombre, et qu'elle fait une constriction quand on est dans un environnement clair, mais aussi si on fait un effort attentionnel, la pupille a tendance à se dilater. Du coup, les performances supérieures des enfants avec un TSA sur cette tâche étaient mises en lien avec une hyperactivation du système d'alerte, qui a été traduite par un périmètre de dilatation de pupilles plus élevé dans ce trouble. Les particularités dans le système d'alerte peuvent être à l'origine d'un défaut de détection de changement dans l'environnement, comme on l'a appris dans le module précédent. Vivanti et ses collaborateurs ont utilisé une tâche de eye-tracking avec de très jeunes enfants ayant les symptômes de TSA mais aussi des enfants témoins. Ce qu'ils ont montré à ces jeunes enfants, ce sont des formes très animées qui étaient très attirantes pour les enfants. D'un côté de l'écran, ils montraient toujours la même forme qui tournait, alors que de l'autre côté de l'écran, ils montraient à chaque essai une nouvelle forme. Ce qu'ils remarquent c'est qu'à travers différents essais, les enfants sans les symptômes de TSA commencent à plus en plus orienter leur attention vers la forme qui est nouvelle en désengageant l'attention de ce qui est déjà connu. Ceci par contre n'était pas le cas dans le groupe de TSA, qui regardait les deux formes, les deux côtés de l'écran d'une manière assez comparable. Ceci nous montre que, en tout cas dans le domaine du traitement de stimuli relativement simples qui n'ont pas une nature sociale, on voit un défaut d'habituation et aussi un défaut de détection de nouveautés dans ce groupe de jeunes enfants présentant un TSA. Nous avons vu comment mesurer l'attention qui est liée au fonctionnement du système d'alerte. Maintenant, nous allons nous concentrer sur le réseau d'orientation, qui est aussi très important dans le domaine de l'autisme. Une manière assez utilisée de mesurer le fonctionnement de ce réseau en laboratoire, c'est la tâche qu'on appelle Gap-Overlap. C'est une tâche relativement simple, qui peut avoir deux ou trois conditions et qui permet d'avoir une première mesure de désengagement visuel. Comment elle fonctionne? On a trois conditions. On commence par la mesure simple de l'efficacité oculomotrice. Dans cette condition, par exemple, il y a une cible animée qui s'affiche au centre de l'écran. Ensuite, elle disparaît, et au moment où elle disparaît, il y a une autre cible sur la périphérie de l'écran. Du coup, l'attention va presque automatiquement être dirigée vers la périphérie et on mesure le simple déplacement de l'attention. Dans la deuxième condition de cette tâche, qu'on appelle Gap, la cible centrale va disparaître, et ensuite, il y aura une pause. Et cette pause va un peu annoncer, elle va un peu mobiliser les ressources d'alertes. Elle va préparer le système attentionnel pour l'apparition d'une cible à la périphérie. Et dans la troisième condition, la cible centrale va rester affichée pendant que la cible périphérique apparaît. C'est dans ces conditions-là que non seulement on va devoir bouger notre attention, mais qu'on va devoir d'abord la désengager de la cible centrale qui reste toujours présente et ensuite la bouger vers la périphérie. Du coup, la mesure de désengagement visuel, on l'obtient si on soustrait le temps qui était nécessaire à déplacer notre attention dans la condition Overlap par rapport à la condition de Baseline, qui mesurait la simple efficacité oculomotrice. Comme déjà évoqué dans le module précédent, les difficultés de désengagement visuel caractérisent la population avec autisme à travers différents âges. Ces difficultés ont été mises en lien aussi avec l'intégrité de la matière blanche qui connecte les deux hémisphères et notamment le splénium du corps calleux, déjà à l'âge de sept mois chez les bébés qui vont par la suite développer les symptômes d'autisme. Une étude récente a montré, si par exemple on met un son qui prépare un peu l'attention pour le désengagement, que les personnes avec un TSA vont autant bénéficier que le groupe témoin de cette alerte plus phasique. Ceci, encore une fois, souligne le fait qu'on ne parle pas d'un défaut en ce qui concerne l'alerte plutôt phasique chez les personnes qui ont un TSA, mais on parle de difficulté de désengagement pure. Nous avons abordé les particularités en ce qui concerne le fonctionnement dans le système d'alerte et aussi d'orientation, et comment on peut les mesurer à l'aide de l'outil d'eye-tracking. Cette séquence était focalisée plutôt sur les études faites en laboratoire, mais c'est vrai que le futur de ce domaine est probablement dans l'utilisation de l'eye-tracking dans des contextes plus naturalistes, par exemple utiliser l'eye-tracking avec de lunettes qui permettront vraiment de cerner ces processus et leur fonctionnement dans l'environnement quotidien de nos patients. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE]