[MUSIQUE] [MUSIQUE] Bonjour. Je m'appelle Emmanuelle Ranza, je suis médecin spécialiste en génétique médicale et je travaille au centre Medigenome, institut suisse de médecine génomique basé à Genève. Dans cette séquence, nous allons aborder les bases nécessaires pour comprendre les causes génétiques du trouble du spectre autistique. Tout d'abord, il est important de préciser que le trouble du spectre autistique est très hétérogène. Le tableau clinique ou phénotype est variable d'une personne à l'autre. Vous avez des personnes qui vont présenter une déficience intellectuelle sévère, alors que d'autres personnes vont avoir un quotient intellectuel normal et peuvent mener une vie indépendante. Bien que l'on ait identifié des facteurs environnementaux qui peuvent participer à l'étiologie de cette condition, il est établi que le trouble du spectre autistique a des bases génétiques. De vrais et faux jumeaux ont montré que le taux de concordance de trouble du spectre autistique pour des jumeaux monozygotes, c'est-à-dire des vrais jumeaux qui partagent le même génome, est très élevé, près de 80 %, alors que le taux de concordance de trouble du spectre autistique pour des faux jumeaux, qui sont donc équivalents à des frère et sœur, est d'environ 15 %. Ainsi, la probabilité de présenter les mêmes symptômes pour des personnes qui partagent le même génome est plus élevée que pour des individus pris au hasard. Le trouble du spectre autistique est une condition complexe et génétiquement hétérogène, avec des modes d'hérédité différents en fonction de la variation génétique sous-jacente. Nous allons aborder ces concepts petit à petit. Parlons tout d'abord un peu de notre génome. Notre génome est comme un long texte écrit en quatre lettres : A, T, G, C. Il est organisé, un peu comme une bibliothèque, avec 46 étagères, les chromosomes, et 20 000 gènes, les livres. Ces gènes codent pour des protéines qui sont responsables du fonctionnement de notre corps. Le génome d'un individu diffère de celui d'un autre individu par des variations génétiques. Chaque personne porte deux copies de son génome, une qu'elle a hérité de son père et une qu'elle a hérité de sa mère. Elle porte aussi des nouvelles variations, que l'on appelle variants ou mutations, et qui sont non présentes chez ses parents. On distingue plusieurs catégories de variants en fonction de leur impact fonctionnel qui va dépendre du type de changement, de sa localisation et du gène en question. Vous avez des variants qui sont bénins ; les variants bénins n'ont ni impact négatif, ni impact positif. Deuxième catégorie de variants, les variants prédisposants ; ils peuvent vous prédisposer favorablement ou défavorablement. Par exemple, certaines variations vont vous conférer une résistance à l'effort qui peut être utile si vous voulez devenir champion de sprint. À l'inverse, certains variants peuvent vous donner un risque de développer certaines maladies lorsque combinés à des facteurs environnementaux. Les variants prédisposants sont plutôt fréquents dans la population générale, et c'est leur combinaison ou leur addition combinée à des facteurs environnementaux qui va mener à la prédisposition pour une certaine maladie. Troisième catégorie, il y a des variants pathogéniques. Ce sont des variants qui ont un tel impact négatif qu'ils vont entraîner la production d'une protéine dysfonctionnelle avec comme conséquence le développement d'une pathologie. Ce sont des variants qui sont très rares dans la population générale. Nous allons maintenant aborder les types de variations qu'on peut porter. Il existe des variations que l'on appelle variations du nombre de copies, en anglais Copy Number Variants, ou CNV. Si l'on reprend l'analogie avec la bibliothèque, il s'agit de variants qui concernent une étagère ou un fragment d'étagère. En fonction de la taille du segment impliqué, de sa localisation, sur quel chromosome, de s'il s'agit d'une duplication ou d'une délétion, la personne va présenter des symptômes qui sont différents. Dans le trouble du spectre autistique, par exemple, on connaît un certain nombre de microdélétions ou microduplications qui sont impliquées de manière récurrente. La microdélétion 22q11, par exemple, entraîne l'association de malformations, cardiaques, palatines, et d'un trouble du développement. Nous allons aborder dans des séquences dédiées ces microdélétions et microduplications plus en détails. Deuxième catégorie de variants, les variants ponctuels, en anglais, Single-Nucleotide Variants, ou SNV. Ce sont des variants qui se situent au niveau du texte lui-même, c'est-à-dire au niveau de la séquence d'ADN. Par exemple, le syndrome de Rett est en lien avec des mutations du gène MeCP2. Pour récapituler, nous avons abordé plusieurs concepts. Le trouble du spectre autistique est une condition cliniquement hétérogène, avec des personnes qui vont présenter un phénotype plus ou moins sévère. Notre génome comporte 46 chromosomes et 20 000 gènes. Il existe différents types de variations : les variations du nombre de copies, qui concernent de larges segments, et les variations ponctuelles au niveau de la séquence elle-même. Enfin, les variations peuvent être bénignes, prédisposantes ou pathogéniques. [MUSIQUE] [MUSIQUE]