[MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] La façon dont on peut tenir compte de l'erreur dans notre évaluation fait l'objet de plusieurs publications. Des études ont également montré qu'il est difficile pour les non-spécialistes de combiner l'information concernant la rareté d'une caractéristique génétique, par exemple la rareté d'un profil d'ADN, et les informations concernant la probabilité d'erreur. Parce que cette combinaison des probabilités est difficile, cela devrait être fait ou du moins être guidé par les spécialistes, c'est-à -dire des experts forensiques. Dans les cas impliquant des statistiques d'ADN rapportées, les experts forensiques fournissent parfois de très petits nombres, comme dans le cas Jama, avec des allégations que l'analyse du profil d'ADN est infaillible. En 2016, le rapport PCAST a reconnu que des erreurs peuvent se produire. Dans ce rapport, on peut lire ce qui suit. Les experts ont parfois témoigné par exemple que leurs conclusions sont 100 % certaines ou ont un zéro, essentiellement zéro ou un négligeable taux d'erreur. Cependant, de nombreuses études dont l'étude du National Research Council de 2009, ont souligné que ces déclarations ne sont pas scientifiquement justifiables. Toutes les analyses de laboratoire et les examens comparatifs de caractéristiques forensiques ont des probabilités d'erreur différentes de zéro. Il est donc important d'éviter les déclarations affirmatives qui ignorent la possibilité d'erreur. Il est important de considérer à la fois la probabilité d'une erreur et l'information sur la rareté du profil. Cela est vrai pour toutes les traces, mais l'effet est particulièrement important lorsque l'occurence des caractéristiques de la trace est très petite, moins de 1 sur 10 000 par exemple, comme c'est le cas pour l'ADN ou les traces digitales. Des recherches ont été menées auprès de personnes admissibles au jury afin d'étudier dans quelle mesure elles combineraient la probabilité d'erreur et l'information sur la rareté des caractéristiques génétiques correspondantes. Il n'est pas surprenant de constater que la combinaison de ces deux probabilités s'avère difficile, et généralement, les non experts n'accomplissent pas très bien ces tâches. Les jurés semblent surévaluer les probabilités extrêmement faibles pour deux raisons. Premièrement, comme l'a montré Koehler et ses co-auteurs en 1995 dans leur article intitulé The Random Match Probability in DNA Evidence : Irrelevant and Prejudicial, il semble que de très petits chiffres comme un sur des millions ou des milliards créent une forte impression. Cette vivacité aurait donc un impact important sur les opinions des jurés. Deuxièmement, la raison pour laquelle les gens pourraient surévaluer les petites probabilités est qu'ils combinent des éléments/indices probabilistes d'une manière intuitive, comme par exemple en faisant la moyenne. Mais cela n'est pas correct d'un point de vue logique. Si l'on combine intuitivement les probabilités, on peut penser que l'effet de l'erreur est très faible. Et en effet, les expériences de Koehler et co-auteurs ont montré que lorsque la probabilité du profil a été donnée, elle a eu un fort impact sur les verdicts des juristes fictifs, ceci que la probabilité d'erreur de laboratoire ait été fournie ou non. Ainsi, l'information sur le potentiel d'erreur de laboratoire semblait avoir peu d'impact. Toutefois, si l'on veut tenir compte à la fois du potentiel d'erreur et de la probabilité de profil, il faut combiner ces deux facteurs de manière cohérente. Si par exemple la probabilité d'observer ce profil ADN est de 1 sur 1 milliard, la probabilité d'erreur est de 1 sur 10 000, donc plusieurs ordres de grandeur plus grand, on peut ainsi montrer, mais nous n'entrons pas dans les détails mathématiques, que la valeur probante globale est dans l'ensemble dominée par la probabilité d'erreur. En particulier, la conclusion devrait être que la valeur probante est beaucoup plus modérée que ce qu'elle serait sans tenir compte d'une probabilité d'erreur de laboratoire ou de pollution. Ainsi, les résultats de la recherche de Koehler et ses co-auteurs suggèrent que la pratique actuelle consistant à fournir à la Cour des probabilités de profil très petites est potentiellement préjudiciable. Mais que faire? D'une part, avec quelques présupposés raisonnables, nous pouvons facilement calculer et soutenir des probabilités de profil d'ADN de un sur plusieurs millions, donc des chiffres très petits. D'autre part, à partir des procédures actuelles d'attribution des probabilités d'erreurs, on peut immédiatement voir qu'il est difficilement possible d'affirmer que les probabilités d'erreurs soient aussi minimes ou petites que les probabilités de profils d'ADN. Comme nous l'avons vu dans des cas réels, par exemple Jama, nous devrions également envisager la possibilité qu'une trace soit polluée par du matériel biologique du suspect. Une telle pollution peut se produire n'importe où dans le processus. Par ailleurs, on pourrait imaginer qu'il y a eu un échange entre le profil d'un suspect et celui d'une victime dans une affaire où la majorité des traces provient de la victime. Dans ce cas, la conséquence sera une correspondance entre le profil d'ADN d'une trace et celui d'un suspect. Ce type d'erreur est le plus inquiétant et affecte clairement la valeur des résultats. Nous savons que les laboratoires peuvent commettre des erreurs, ce qui a été démontré à la fois dans des tests de compétence et dans des cas réels. Donc, si des erreurs se produisent, comment en tenir compte? Comment attribuer la probabilité d'erreur dans le cas particulier? Remarquez la formulation dans la phrase que je viens de dire, l'accent est mis sur la probabilité d'erreur dans le cas présent. Il ne s'agit pas d'une proportion abstraite d'erreurs dans une série de cas distincts, mais en quelque sorte semblables. Cela peut cependant être intéressant dans l'étude du phénomène de l'erreur en général. Mais il s'agit d'une question tout à fait différente de savoir quelle devrait être notre probabilité d'occurence d'une erreur dans un cas donné. Très clairement, elle dépend de et doit se fonder sur les circonstances particulières du cas qui nous occupe. Pourquoi? Parce qu'il n'est pas pertinent de savoir à quel point un laboratoire peut bien travailler dans des conditions contrôlées si les traces examinées ont auparavant été exposées à des circonstances problématiques, par exemple procédures et manipulations inappropriées, discontinuité de la preuve, etc. Autrement dit, les données de performance de laboratoire peuvent ne pas refléter adéquatement les conditions du cas présent. Ainsi, comme je l'ai mentionné, bien qu'il existe des données sur les essais sous des conditions contrôlées, il est très difficile de tirer des conclusions pertinentes des différentes erreurs observées dans ces tests pour un cas donné. D'une part, si un laboratoire commet une erreur une fois, alors cette connaissance n'est pas directement utilisable pour fournir une valeur pour la probabilité qu'une autre erreur se produise dans le futur. Elle ne permet pas non plus de tirer des conclusions immédiates sur la probabilité d'erreurs commises par d'autres laboratoires. En outre, la simple notion d'erreur est un terme trop peu défini. En tant que tel, il ne permet pas de s'engager dans une discussion réflexive et conduire à des idées concrètes. Si on essaie de le définir, on se rend compte qu'il peut couvrir une variété de phénomènes avec des conséquences très différentes, comme on le voit tout au long de cette présentation. En outre, il faut se rappeler que les erreurs de laboratoire ne peuvent pas conduire seulement à des fausses inclusions, mais aussi à des fausses exclusions. En résumé, on peut donc dire que les erreurs qui conduisent à des fausses correspondances sont possibles. Leur occurrence pourrait être inférieure à 1 sur 1 000. Cependant, elle n'est pas nulle. Mais généralement, il est peu fructueux de discuter de la question de la probabilité d'erreur sans contexte concret. La probabilité d'erreur doit être attribuée compte tenu du contexte particulier du cas d'espèce. Et ce contexte peut être tel que la probabilité d'erreur doit être attribuée comme étant très élevée, quelles que soient les autres mesures générales de performance du laboratoire. Il n'y a guère de doute que ce chiffre soit proche des probabilités très petites de profils d'ADN qui peuvent à l'heure actuelle être calculées pour les profils d'ADN obtenus avec des kits de multiplex modernes. En conclusion, pour être équilibré, approprié et complet, nous devons tenir compte de la possibilité d'erreur. Cela devrait être assisté par les experts forensiques et l'impact des erreurs doit faire partie des éléments transmis aux destinataires de l'information scientifique. Ce que nous allons retenir, c'est que la probabilité des résultats étant donné l'hypothèse de la défense, ne peut pas être inférieure à la probabilité d'erreur adaptée au cas et au laboratoire ayant analysé l'ADN en question. >> Merci Alex. Pour conclure cette vidéo, laissez-moi vous résumer les deux points fondamentaux. Premièrement, il est inapproprié de présenter la valeur probante d'une correspondance entre le profil génétique d'un suspect et celui d'une trace en considérant seulement des probabilités d'observation du profil qui sont astronomiquement faibles. On doit aussi tenir compte de la probabilité d'erreur propre au cas et de la pollution sur les lieux du crime ou au laboratoire. Comme souligné par le Juge Vincent dans son rapport sur l'affaire Jama, il faut faire attention lorsque l'ADN est perçu comme ayant presque une infaillibilité mystique et lorsque l'acceptation sans réserve de la fiabilité de la preuve ADN fait qu'on ignore un nombre incroyable d'invraisemblances. Deuxièmement, on doit tenir compte de l'erreur, la pollution, dans notre évaluation. Lorsque c'est le cas, alors la valeur de nos résultats est plus modeste, ce qui reflète la réalité, puisqu'on ne peut pas ignorer qu'il existe diverses sources d'erreurs qui peuvent mener à des faux positifs, donc amener potentiellement à des erreurs judiciaires. On ne sait pas vraiment quel est le niveau de faux positifs lors d'un processus judiciaire, et la probabilité d'une erreur dépendra du cas. Mais il est indéniable qu'une erreur peut arriver. >> Merci de votre attention. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] [AUDIO_VIDE] [AUDIO_VIDE] [AUDIO_VIDE] [AUDIO_VIDE] [AUDIO_VIDE]