[MUSIQUE] [MUSIQUE] Donc, je suis Olivier Fourcadet. Je suis professeur dans le département management de l'ESSEC. Mon secteur, c'est plutôt la stratégie et en particulier les questions qui sont liées au développement durable et à la stratégie que les entreprises peuvent avoir dans le secteur du développement durable, et mon champ plutôt industriel d'intérêt, ce sont les industries liées à l'agro-alimentaire, donc la chaîne qui va du champ à la fourchette. Aujourd'hui, je voudrais vous entretenir des agences des notation et du rôle qu'elles peuvent jouer en prenant la posture résolument d'une entreprise, peut-être d'une entreprise bancaire, d'une entreprise du secteur de La Défense, ou d'une entreprise agro-alimentaire, qui a bien sûr un radar dans lequel elle perçoit un certain nombre de questions de société, de questions environnementales, qui commencent à surgir. Je vais prendre un exemple, les questions sur la biodiversité. Il y a une convention internationale sur la biodiversité, suivie de deux protocoles, chacun ciblant des aspects très particuliers de la biodiversité. Et cette entreprise a des questions qui sont assez simples, est-ce que je dois être concernée, ou est-ce qu'on devrait ou est-ce que je devrais penser que je suis concernée? Ou est-ce que des parties prenantes pensent que je suis concernée? Et donc, ce sont des questions qui ne sont pas très très faciles. La première, peut-être, question qu'elle se pose, c'est une question de définition sur la biodiversité. Là, la réponse est souvent assez facile. Cette définition ou ces définitions sont posées, elles sont généralement clairement posées. Ensuite, il y a bien sûr la réflexion sur le passage à l'action. Qu'est-ce que je peux faire? Là, les choses se compliquent un petit peu. Il est rarement dit dans les conventions internationales ou même dans les lois et les réglementations ce que l'on doit faire. Il est souvent dit ce qu'on n'a pas le droit de faire, donc ça donne une frontière. Donc, qu'est-ce que je peux faire? Alors, pour essayer de trouver les pistes, il y a toute une série de moyens qu'on pourrait qualifier d'intelligence économique, d'intelligence de son environnement, et les agences de notation qui ont une activité qui est une activité justement de notation de ce que les entreprises font. Elles ont souvent un pas d'avance et elles proposent en quelque sorte des grilles qui permettraient de juger en fait des actions que les entreprises prendraient sur le secteur, l'exemple que l'on a choisi est la biodiversité. Donc en fait, travailler avec les agences de notation permet d'avoir en avance souvent, un décryptage des actions possibles, de la manière dont ces actions vont être évaluées, notées. et souvent, ces agences de notation ont à coeur de mettre ces notes en relation avec ce qui pourrait être une valorisation de ces actions, par exemple une valorisation financière de ces actions. En quelque sorte, la prime que l'investisseur pourrait payer parce que l'entreprise aurait suivi la bonne direction, aurait oeuvré pour aller dans la bonne direction. Alors, il y a toute une série, au delà des actions, il y a toute une série de questions un petit peu techniques qui se posent. Par exemple, quel est mon périmètre? Je vais prendre la posture maintenant d'une entreprise un petit peu plus précise, qui est une entreprise de distribution, on en connaît tous beaucoup, d'entreprises de distribution, le groupe Carrefour par exemple, le groupe Auchan, les entreprises qui sont dans le secteur de la distribution alimentaire, et qui se posent la question du périmètre. Une entreprise comme Carrefour ne travaille pas dans les champs, et a priori, la biodiversité, ça peut se passer dans les champs. Et donc, ce premier point de regard pour elle, c'est finalement, qu'est-ce qui va m'être imputé dans ce travail sur la biodiversité? Alors, si on est une banque, on aurait tendance à se dire, je suis quand même assez éloignée de la nature. Disons, les immeubles sont à La Défense, donc finalement, j'ai relativement peu d'impact sur la biodiversité. Donc, cette idée de périmètre, ça c'est le premier point, sur lequel les agences de notation vont pouvoir apporter un regard et dire, mais, vous avez des toits, sur les toits, vous pouvez implanter éventuellement des ruches si les toits ne sont pas trop élevés. Donc vous pouvez aussi contribuer à la biodiversité. On comprendrait que dans ce cas-là, le périmètre sera assez réduit, les actions seront réduites. Si je reviens à une entreprise de distribution, les questions se corsent un petit peu parce que elle passe des ordres souvent auprès de fournisseurs, et donc elle pourrait aussi se voir imputer des actions qui seraient prises par ses fournisseurs qui alors rentreraient dans son périmètre. Elle devrait avoir une influence bienveillante pour guider ses fournisseurs de premier rang, de deuxième rang éventuellement, parce qu'elle travaille surtout avec des entreprises agro-alimentaires, parfois avec des agriculteurs, mais les entreprises agro-alimentaires travaillant avec des agriculteurs, il faudrait descendre toute la chaîne pour toucher disons, les personnes qui sont le plus à même de mettre en oeuvre ces actions sur la biodiversité. Donc, il y a le périmètre, il y a ensuite le type d'actions. Question d'évaluation également. Là, c'est intéressant parce qu'on peut parfois avoir dans les agences de notation une certaine forme de diversité. Et cette forme de diversité, j'en ferais un diagnostic en disant que on est encore peut-être dans un stade d'enfance, émergent. Après, ça va habituellement, ça va plutôt s'orienter vers une même direction, vers une maturité. Mais, comment est-ce qu'on peut évaluer la qualité des actions qui ont été prises? Et en général, elles précèdent le mouvement. Donc, elles servent en quelque sorte d'indicateur en avance de ce qui va pouvoir être fait, de comment ça sera évalué, de quel impact ça pourrait avoir, et comment cet impact pourra être valorisé ensuite dans la performance économique de l'entreprise. Donc, s'il y a beaucoup de bénéfices pour les entreprises à travailler avec les agences de notation. On a un deuxième type d'agences qui sont les agences de certification. Là, ce sont des agences qui disent à une entreprise que les pratiques satisfont à un cahier des charges, à un certain niveau d'exigence, et donc que souvent leurs produits, leur site, ou voire même la totalité de l'entreprise peut être certifiée par rapport à une problématique ou par rapport à un ensemble de problématiques. Et ces agences de certification sont également intéressantes à suivre, à engager une discussion pour pouvoir comprendre quels sont les critères, et globalement, elles oeuvrent d'une façon différente. La finalité n'est pas exactement la même, mais elles oeuvrent de la même manière que les agences de notation. Si je dois mettre maintenant un point de limite ou de danger, je dirais qu'il y a un troisième type de partenaires, ce que j'appellerais peut-être de manière un petit peu péjorative des officines, qui proposent elles-mêmes des grilles de lecture, qui proposent des systèmes de notation, et c'est souvent aussi, elles font du business avec les entreprises pour les accompagner. Donc, le milieu est parfois complexe, et bien sûr, il est préférable pour une entreprise qu'elle jette son regard vers des agences de notation qui elles-mêmes ont une bonne réputation, qui ont ce qu'on qualifie, un long standing. Elles opèrent, elles ont des clients qui achètent en quelque sorte leur rapport de notation. Elles sont associées parfois à des indices boursiers. On peut parler du Dow Jones Sustainability Index, et les autres ont peut-être moins de moyens, moins de réputation, et peut-être leurs méthodologies qui peuvent être parfois pertinentes sont peut-être moins adaptées aux entreprises. [MUSIQUE]