[MUSIQUE] [MUSIQUE] D'où vient notre Univers? Comment tout ce qui nous entoure a-t-il été créé? Ce sont des questions que l'humanité s'est toujours posées. Les physiciens fournissent leurs propres réponses, basées sur un grand nombre de tests observationnels et sur notre compréhension actuelle de la physique. Dans ce contexte, l'histoire de l'Univers est relativement bien décrite par le scénario du big bang qui est un modèle standard pour la cosmologie. Nous allons voir que ce scénario explique la genèse des structures cosmiques comme les galaxies et les amas de galaxies, et la transition entre la très grande homogénéité de l'Univers jeune et la très grande hétérogénéité de l'Univers actuel. Dans la théorie du big bang, on part il y a environ 13,8 milliards d'années d'un Univers extrêmement énergétique qui s'étend progressivement. L'énergie très concentrée se dilue. Au début, il est très facile de la convertir en des particules nouvelles qui ne cessent d'interagir et de s'annihiler avec d'autres constituants de cette soupe dense et chaude de particules élémentaires. Au fil de l'expansion de l'Univers, certains de ces processus deviennent impossibles à réaliser par manque d'énergie. L'Univers passe donc par plusieurs époques charnières ou transitions en fonction de l'énergie disponible. Les premières époques se succèdent en quelques fractions de secondes après le big bang. On pense que les quatre interactions fondamentales, à savoir la gravitation, l'interaction forte, l'interaction faible et l'interaction électromagnétiques, d'abord réunies, se séparent progressivement les unes des autres alors que l'Univers se dilue et refroidit. D'abord la gravitation, puis la force forte, et enfin les interactions faibles et électromagnétiques. Quelques instants après la séparation des interactions fortes et électrofaibles, soit un millionième de milliardième de milliardième de milliardième de seconde après le big bang, l'Univers connaît une brève période d'expansion accélérée connue sous le nom d'inflation, et sur laquelle nous reviendrons. Jusqu'à environ une microseconde après le big bang, on est toujours face à une soupe de particules élémentaires qui se diluent progressivement au fil de l'expansion de l'Univers. Les quarks, jusque-là libres, finissent par s'assembler pour former des hadrons dont les protons et les neutrons, qui constituent des noyaux atomiques de la matière ordinaire. Vers une seconde après le big bang, les hadrons s'annihilent avec les anti-hadrons présents en quantité presque égale. Les hadrons qui ont survécu participent à des premières réactions de fusion nucléaire entre trois et 20 minutes après le big bang. C'est la nucléosynthèse primordiale qui produit principalement des noyaux d'hélium en plus de l'hydrogène déjà présent en grande quantité. À cette époque, l'Univers est sous la forme d'un plasma ionisé, fait de noyaux atomiques, essentiellement des protons avec une charge électrique positive, et des électrons chargés négativement et qui circulent librement à grande vitesse. Les photons, qui veulent se propager dans ce milieu, n'y arrivent pas, car ils interagissent en permanence avec le plasma, en particulier les électrons. La lumière ne peut donc pas se propager librement. L'Univers est alors opaque. Ce couplage entre matière et lumière a des conséquences importantes. En effet, dans le scénario cosmologique standard, la matière est répartie de façon presque homogène, mais de petites fluctuations existent. Les surdensités de matière ont tendance à attirer par gravité la matière environnante. La gravité fait donc croître les perturbations de densités de matière. Mais d'un autre côté, les photons, par leur interaction continuelle, exercent une pression sur la matière, et ils luttent contre les effets de la gravité. Le résultat de cette compétition entre la gravitation et la pression des photons, eh bien des oscillations qui se propagent dans le plasma, en fait des ondes acoustiques similaires aux ondes sonores qui se propagent dans l'air. Du fait de l'expansion de l'Univers, la densité d'énergie diminue tout comme l'agitation des noyaux atomiques et des électrons. Ils finissent par se combiner ensemble pour former des atomes neutres électriquement. On parle de recombinaison. Si le processus est progressif, il s'achève environ 370 000 ans après le big bang. L'Univers devient alors transparent. Les photons présents sont libérés et peuvent se propager dans toutes les directions. Ces photons constituent un rayonnement fossile appelé fond diffus cosmologique ou cosmic microwave background, CMB en anglais. Ce CMB peut être observé encore maintenant, et il constitue en fait l'observation directe la plus ancienne de notre Univers à 0,003 % de son âge actuel. Si l'Univers actuel était un être humain de 70 ans, le CMB correspondrait à une photographie prise environ 16 heures après sa naissance. Des satellites comme WMAP et plus récemment Planck ont pu cartographier ce CMB et identifier de petites différences dans la quantité de photons nous arrivant de différentes directions. En particulier lorsque l'Univers devient transparent, les photons n'interagissent plus avec la matière environnante. Les ondes acoustiques sont gelées, et elles impriment sur le CMB des motifs de tailles et d'intensités différentes. Ces différences correspondent à de minuscules hétérogénéités d'énergie et de température nous informant sur l'état de l'Univers à l'époque de la recombinaison. Le CMB nous apparaît en fait comme trop homogène. On a des disparités de moins de 0,001 % lorsqu'on compare des régions séparées par un angle de visée de 10 degrés ou plus dans le ciel, 20 fois la taille de la pleine lune. C'est très surprenant car l'information entre ces régions ne peut circuler au mieux qu'à la vitesse de la lumière ; or, ces régions semblent trop éloignées les unes des autres pour avoir pu échanger de l'information ou de la matière, si on s'en tient à une expansion de l'Univers au rythme actuel. Elles n'ont donc aucune raison de s'être homogénéisées et de nous apparaître si semblables sur le CMB. Les scientifiques s'accordent à penser que cette homogénéité est en fait liée aux premiers instants de l'Univers, aux environs de 10 moins 35 secondes après le big bang. L'Univers était alors dominé par l'énergie du vide quantique. Cela aurait induit une phase d'expansion accélérée, l'inflation cosmique, qui multiplie la taille de l'Univers par des facteurs colossaux, de sorte que des régions proches deviennent soudainement très éloignées et apparemment sans lien entre elles, si on ne prend en compte que l'expansion de l'Univers que nous observons actuellement. Nous nous sommes concentrés sur la matière ordinaire constituée de protons et d'électrons interagissant avec la lumière. Toutefois, on pense que l'essentiel de la matière dans l'Univers, environ 85 %, est constitué de matière sombre ou noire, qui interagit peu ou pas avec les photons. À la recombinaison, la matière ordinaire, libérée de ces interactions avec la lumière, se concentre dans les régions déjà denses de matière. Non seulement celles de matière ordinaire mais aussi de matière sombre. Cette matière sombre s'effondre par gravité au sein des petites fluctuations de densités et crée des surdensités de tailles variées, allant de la taille d'une étoile à celle d'un amas de galaxies. C'est à partir de ces petites surdensités que les galaxies et les structures cosmiques vont se former. Il faudra toutefois attendre environ 150 millions d'années après le big bang pour que la gravité concentre suffisamment la matière pour que des réactions thermonucléaires s'enclenchent dans certains nuages de gaz et que les premières étoiles apparaissent. On parle de la sortie des âges sombres, car pendant toute une période, l'Univers est dépourvu d'étoiles et donc de sources lumineuses. La lumière des premières étoiles va également re-séparer les atomes d'hydrogène dans les nuages de gaz environnants pour redonner des électrons et des protons libres, c'est la réionisation. Plusieurs générations d'étoiles vont ensuite vivre et mourir au sein de galaxies qui elles-mêmes fusionnent entre elles ou se rassemblent en amas de galaxies et finalement arriver à l'heure actuelle, 13,7 milliards d'années après le big bang, avec un Univers organisé en structures cosmiques et toujours en expansion. Notre Univers a donc connu une histoire très riche, décrite par le scénario du big bang. L'expansion de l'Univers a progressivement dilué l'énergie disponible, et du bouillonnement initial de particules élementaires ont émergé des noyaux atomiques et des atomes. Cet Univers, très homogène du fait de l'inflation, connaît tout de même de petites fluctuations de densités de matière qui sont les germes des étoiles, des galaxies et des amas de galaxies actuelles. Le fond diffus cosmologique ou CMB nous permet de comprendre l'état de l'Univers 370 000 ans après le big bang et de valider une grande partie de ce scénario. Mais de nombreuses questions restent en suspens. Quelle est l'influence de la matière sombre sur la formation des structures, la fin des âges sombres et la période de réionisation? Quels sont les mécanismes de l'inflation, et peut-on les comprendre en étudiant ses effets sur le CMB? Peut-on trouver d'autres messagers, comme les ondes gravitationnelles pour sonder l'Univers primordial à des époques plus anciennes que celle du CMB? De nombreuses questions que nous essayons d'élucider pour mieux comprendre l'histoire de notre Univers. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE]