[MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] Nous accueillons aujourd'hui Augustin Gille, qui a un parcours très intéressant. Puisque vous avez d'abord été avocat d'affaires à Luxembourg, Et puis vous avez décidé de vous intéresser à l'innovation sociale. D'abord dans le cadre de travaux de recherche, puisque vous conduisez une thèse sur la gestion stratégique de l'innovation sociale, et puis, de façon plus concrète, plus opérationelle, au sein de l'UCPA, que tout le monde connaît, qui est une grande association active, dans le domaine du loisir et du tourisme. Alors, on va commencer par s'intéresser à l'identification des partenaires. Comment est-ce qu'une entreprise peut identifier le bon partenaire? Comment est-ce qu'une association va pouvoit identifier la bonne entreprise pour travailler avec elle? >> Alors, je crois qu'il y a une notion à prendre en compte, c'est la notion de proximité. La proximité peut s'entendre en termes géographiques, ou territorial. Et donc on conseille plutôt aux associations de se tourner vers les entreprises, et réciproquement, de leur territoire. Parce qu'on partage une culture commune, et que c'est une bonne base pour commencer à construire des relations. La deuxième dimension de la proximité, c'est une proximité organisationnelle, ou une similarité au niveau de la taille. C'est-à-dire que, on va partager des enjeux communs, en termes de taille, une petite structure va mieux, une petite association comprendra mieux les enjeux d'une petite entreprise, et réciproquement pour les moyennes associations, moyennes entreprises etc. Il y a aussi une proximité en termes organisationnels, c'est-à-dire qu'on va avoir par exemple, des liens déjà existant entre l'association et l'entreprise, par exemple, au niveau de la gouvernance. Une personne qui appartient à la gouvernance de l'une et de l'autre, qui peut favoriser le rapprochement entre les deux. Et après, il y a une proximité en termes de valeurs qui est importante, bien évidemment, et là on conseille aux associations qui cherchent à créer des partenariats à se tourner vers des entreprises responsables. C'est une entreprise qui a l'habitude de fonctionner avec son écosystème, avec les pouvoirs publics, avec d'autres entreprises, et donc qui s'inscrit déjà dans des réseaux. Une dernière dimension de la proximité, et qui est fondamentale, c'est la proximité en termes de cœur de métiers. Trop souvent on a tendance à se tourner vers les acteurs, les grands acteurs médiatiques, que l'on connaît déjà, alors que il faut regarder plutôt autour de soi. Je mets cependant une nuance à ce que je viens de dire. C'est que certaines associations, qui ont déjà expérimenté une solution tout à fait nouvelle, innovante en terme social, et qui cherchent à déployer cette solution, à faire changer d'échelle cette solution, vont devoir plutôt se tourner vers des entreprises qui vont prendre une posture d'investisseur sociétal, et donc pour cela, qui vont avoir, je dirais, les reins assez solides pour accompagner cette association, avec des ressources financières, avec un accompagnement à la stratégie, par exemple, ainsi que des compétences rares. Mais pour pouvoir ce faire, il faut être une entreprise d'une certaine taille. >> Et là, la proximité cœur du métier est essentielle, et fondamentale. >> Tout à fait, absolument. >> Donc là, on a bien identifié les différentes, finalement, facettes de ce qui est la proximité, qui est le maître mot, on va dire, dans >> le processus d'identification. Si l'on passe maintenant aux étapes, une fois que on a identifié l'entreprise, ou une fois que l'entreprise a identifié l'association, quelles sont les quelques grandes étapes par lesquelles n'importe quel partenariat doit passer? >> Quand on identifie une entreprise, en même temps que cette identification, une entreprise ou une association, il faut soi-même se positionner >> en se demandant, quels sont mes objectifs pour ce partenariat? Quels sont, finalement qu'est-ce que je peux, quels sont les objectifs de mon partenaire potentiel? Quels peuvent être ces objectifs, et comment je vais pouvoir répondre à ses objectifs? À partir du moment où se déroule cette, la rencontre du partenaire, il va y avoir une phase de mise en place du partenariat, et donc de cadrage du partenariat. Le cadrage du partenariat se fait à plusieurs niveaux. Déjà, je crois qu'il y a un moment très important, c'est de se dire clairement, quels sont nos objectifs, c'est-à-dire qu'il faut être absolument transparent là-dessus. On ne peut pas créer de relation saine sans avoir partagé les objectifs de chacun. Ensuite il va falloir décider quels sont les objectifs communs aux deux partenaires. Et enfin, on va s'intéresser aux moyens et aux ressources que l'on met dans le partenariat. Donc ça, c'est la partie, cadrage, du partenariat. Et ensuite il y aura, bien sûr, la mise en œuvre, du partenariat, son pilotage, avec des degrés différents de niveaux de pilotage, en fonction de la taille du partenariat. Et pour les gros partenariats, il est intéressant, par exemple, de dissocier la gouvernance stratégique et politique du partenariat, du niveau opérationnel. Je pense au partenariat, par exemple, Renault Wimoov, que vous connaissez. Ce partenariat avait des niveaux différents d'intervention des deux partenaires. Un niveau de gouvernance qui était une rencontre institutionnalisée des dirigeants à la fois de l'association, et du département RSE, de Renault. Et puis, il y avait le niveau opérationnel, où là on déroulait le partenariat de manière opérationnelle. La dernière phase, très importante, c'est la phase d'évaluation. Je crois que vous allez la voir plus tard. C'est fondamental de mettre à plat, finalement, ce qui s'est passé pendant le partenariat, pour envisager un renouvellement de la relation partenariale. Parce qu'il faut garder en tête que, un partenariat ne s'envisage pas, uniquement, sur la durée du projet, du partenariat. Il s'envisage à long terme. Un partenariat réussi c'est un partenariat renouvelé pour, éventuellement, pendant une dizaine d'années. >> Trois grandes étapes, on vient de le voir, >> le cadrage, la mise en œuvre et l'évaluation, quels sont les grands obstacles que l'on rencontre, et puis peut-être les quelques leviers que l'on peut utilement actionner pour réussir? >> Alors, je crois qu'il y a, selon moi, il y a trois grands obstacles. Il y a bien sûr la difficulté culturelle, c'est-à-dire que association et entreprise ont des fonctionnements différents, et je pense que pour pouvoir dépasser cet obstacle, il faut mettre en place un dialogue récurrent, un dialogue qui soit institutionnalisé entre les deux partenaires. Le deuxième obstacle, c'est tous ces comportements qui vont nuire à la confiance, parce que dans le cadre d'un partenariat, finalement, l'enjeu n'est pas seulement le projet que l'on va réaliser ensemble. L'enjeu, c'est de construire une relation de confiance qui va permettre par la suite de mettre en place, réellement, une alliance innovante, où on va co-créer, co-construire ensemble, des solutions, les solutions de demain, finalement. Et pour pouvoir co-créer ensemble, il faut avoir une confiance mutuelle. Le troisième point, qui rejoint ce que je viens de dire, c'est la question de la temporalité. Il y a une double temporalité à gérer, lorsqu'on a un partenariat. C'est la temporalité du partenariat lui-même, du projet que l'on réalise ensemble, concrètement, à l'instant t ; mais c'est aussi la temporalité, à plus long terme, de ce qu'on va pouvoir créer ensemble, et co-construire, dans une deuxième grande étape, qui sera la co-construction de solutions innovantes, imbriquées avec le savoir-faire de l'association et les compétences de l'entreprise. Voilà les trois points, les trois difficultés que je vois. Je crois qu'il faut être ouvert, fondamentalement, à la nouveauté. Et le monde de demain, nous ne le connaissons pas, sera un monde complètement différent. Et donc, si on reste sur ses a priori, et ses acquis, on n'est pas capable de voir les choses émerger. [MUSIQUE]