[MUSIQUE] [MUSIQUE] Alors, l'aventure Solifap, elle a démarré en 2011, sur un objet qui n'était pas du tout celui qui nous réunit aujourd'hui. C'est cela qui est très drôle, il faut vraiment avoir à l'esprit qu'on part sur un objet et qu'il peut se passer plein de choses. Après, on voulait travailler, investir dans la précarité énergétique. Et puis, par l'ami Charles-Benoît Heidsieck, on nous a mis en relation. Et assez spontanément, sur cette matière énergétique de, qui est un vrai fléau, pour les gens très pauvres. On pense toujours au loyer, mais le loyer, il peut être très peu cher, les sous s'envolent par la fenêtre. Et, on a été mis en relation. Et, au fond on est parti de cette objet de précarité énergétique, on a créé une foncière en commun. Alors, on apporté, tu le diras mieux que moi, on a apporté effectivement un peu d'argent. Il fallait un effet de levier, puisque on a apporté de la méthode, on a apporté du consulting, des process vraiment de création d'entreprise, et de l'argent frais. Donc, de la méthodo, création d'un business plan évidemment, un modèle économique, les logiques de retour sur investissement. On y reviendra je pense tout à l'heure sur l'objet vraiment de Solifap. Et, on a injecté depuis plusieurs, sur plusieurs années, dans une logique pluriannuelle, pour faire fonctionner la structure et les coûts de personnel d'abord, un million et demi d'euros par an sur plusieurs années, et puis on vient de faire un deuxième coût, en 2015, qui là est un investissement dans le dur, dans le capital de la foncière. Et, on vient d'investir, puisque là c'est le sujet, et pas seulement de soutenir par des dotations pluriannuelles, on vient d'investir 6 millions d'euros cash, dans un capital de 12, les 6 millions restants étant ceux de la maison mère, la Fondation Abbé Pierre. >> Exactement, donc c'est vrai que quand vous êtes venu nous voir, vous vouliez faire quelque chose autour de la précarité énergétique, ce qui est effectivement un sujet tout à fait à l'ordre du jour, pour lequel la fondation a elle-même des >> programmes, en relation avec d'autres partenaires. Mais, nous on était sur cette idée d'aider les acteurs. Et donc, quand vous êtes venus nous voir, on avait un peu ce projet-là, enfin en tout cas, c'était peut-être pas un projet, c'était une prise de conscience des difficultés des associations. Et donc, c'est, on vous a proposé en disant mais voilà, on a un peu cette idée-là, et qu'est-ce que vous en pensez? Et c'est vrai que vous avez été d'accord, pour à la fois financer un poste, au sein de la fondation, qui était un peu un défricheur, pour analyser qu'est-ce que cela voulait dire financer les acteurs, et comment on pouvait s'y prendre, quels étaient leurs besoins. On a un peu essayé de chercher cela. Et en même temps, donc vous avez financé ce poste, et en même temps, vous avez mis à notre disposition un conseil, un cabinet de conseil, un peu chargé de la création d'entreprise, qui petit à petit nous a amené vers ce sujet-là. Donc, je dirais entre 2011 et 2013, cela a été la gestation du projet. Donc, il y avait effectivement un peu de méthode à mettre dans le dispositif, et il y avait aussi au sein du conseil d'administration de la Fondation Abbé Pierre, un peu une révolution culturelle à faire. On est dans le mouvement Emmaüs. Le mouvement Emmaüs, c'est : je récupère des objets et je les vends et donc je retrouve ma dignité par moi-même, mais je ne dépends de personne. Entrons dans une logique où on a un partenaire, avec des gens qui viennent pour nous aider de façon puissante et importante. Qu'est-ce qu'il vous nous demander en échange? Et est-ce qu'on n'aliène pas notre liberté, et est-ce que changer entre une finance et des actions. Donc, financer une action effectivement, comme je le disais tout à l'heure, c'est one-shot. C'est une fois on vous donne 15 000 Euros pour faire un logement. Si on se met à financer un acteur, on ne peut pas être dans une relation courte. C'est forcément une relation dans la durée, sur plusieurs années, qu'il va falloir suivre, etc. Si on lui donne, si on lui fait un prêt, cela veut dire qu'on va se préoccuper de la façon dont ils vont rembourser le prêt. Donc, tout ceci c'est une révolution culturelle pour la Fondation, voilà pourquoi cela a demandé en gros 2 années. Et en 2013, là cette fois on était mûrs pour lancer une expérimentation, et donc on a pendant toute l'année 2013, commencé à identifier des associations, qui effectivement pouvaient, soit monter un projet immobilier, soit effectivement avaient besoin d'une aide financière pour leurs structures. Donc, on a une petite dizaine d'expérimentations pendant toute l'année 2013, ce qui suppose de mettre en place les processus de décision, les comités d'engagement, etc. C'est une chose qui était très très nouvelle pour nous. Et puis donc, la société d'investissement avait été créée, donc en janvier 2014, avec là à nouveau une deuxième phase d'expérimentation pour cette fois, c'est une filiale de la Fondation, donc ce n'est pas exactement la Fondation, vraiment c'est autre chose. Et donc, effectivement, c'est, on a fait un business plan, et c'est monté très très rapidement en puissance, jusqu'à effectivement les 6 millions d'euros qu'a souscrit en capital AG2R La Mondiale, ce qui a fait un effet de levier formidable. Et aujourd'hui, on a déjà 15 millions d'euros de capitalisation, au bout d'un an et demi de fonctionnement. Et donc, on attend encore 2 millions là au mois d'octobre, qu'on nous a promis, donc les choses vont très très vite. >> Cette PME, >> elle est vraiment porteuse d'avenir, mais originale. Parce que c'est vrai, quand bien même on est un acteur de l'économie sociale, c'est un groupe financier. Je pense qu'on pouvait apparaître comme cela, c'est ce qu'on est. Objectivement, on est dans les secteurs financiers, tout groupe de protection sociale que nous soyons. C'est vrai que la rencontre des 2 n'était pas évidente. On l'a bien compris, on y est allé doucement. Il a eu un phénomène d'acculturation, c'est le Petit Prince et le Renard. Il fallait vraiment montrer qu'on était là pour aider, sans autre intention. Mais, on est porté par un projet commun, qui est quand même d'autonomiser le plus possible les structures aidées, donc on se rejoint là-dessus. D'abord, la première inquiétude, c'était que cela ne marche pas. Cela nous paraissait tellement incroyable, c'est qu'on ne soit pas accueillis dans la famille. Alors, accueillis tu l'as dit de façon assez cynique, cash, accueillis pour donner des sous. On se disait que cela pourrait marcher. Mais construire, co-construire une entreprise ensemble, il y avait là une révolution culturelle assez forte. Deuxièmement, c'est vrai que dans le montage du projet, il y avait des moments un petit peu compliqués. On disait tout à l'heure qu'on venait d'investir des sous. Le fait d'investir dans le cash, avec le vrai argent, du vrai groupe, pas des fonds sociaux d'Agirc et Arrco, pour être très cash aussi. Eh bien, évidemment, on rentre dans le financier pur, et qu'on a des directeurs financiers, on l'a. Le dossier est passé en conseil d'administration, il a été vraiment, il était solidement bâti, il était solidement argumenté, avec flamme et engagement. Et puis, se pose la question de savoir après quelle place on prend dans la gouvernance de l'ensemble. >> Donc, pour nous les craintes, c'est clairement la crainte de perdre son indépendance. Pour, comme je disais tout à l'heure, le mouvement Emmaüs est très attentif à cette question d'indépendance, et ne veut pas effectivement, être soumis à telle ou telle emprise, en fait. Et donc, c'est ces craintes-là, qu'il a fallu expliciter, rassurer, dépasser dans notre conseil d'administration et parmi les types de salariés. Il y aussi une autre chose qui n'était pas simple, c'était quelque part, je le disais, faire une activité bancaire. >> C'est vrai. >> C'est-à-dire que quand on donne une subvention pour acheter un logement, c'est pas la même chose que de lui faire un prêt de 100 000 Euros, qu'ils vont nous rembourser sur 7 ans. >> Suivre ses comptes, devoir lui dire que cela marche, cela ne marche pas, bien sûr. >> Donc, c'était un peu un déplacement d'activité. Donc, ce qui nous guide évidemment, c'est le but final. Le but final, c'est bien de créer du logement pour les personnes défavorisées, c'est bien d'apporter de meilleures conditions de vie à un grand nombre de personnes. Mais, effectivement, le moyen était assez nouveau pour nous. Et cette crainte, finalement d'être sur un métier qu'on ne connaissait pas bien. Donc j'ai évoqué la question de la crainte, qui était la crainte de perte de l'indépendance, et pour nous la façon de protéger un peu cela, cela a été de tourner statut, de donner une place prépondérante à l'association. Alors, c'est vrai que c'est aussi un facteur de sécurité pour les partenaires, parce que la fondation a une gouvernance extrêmement stable, elle est reconnue au plan national, et donc on sait que effectivement on peut lui faire confiance, dans la conduite du projet. La place dans les statuts, en fait il y a 2 instances de gouvernance dans la société. Donc, la Solifap c'est une société par action simplifiée, donc avec un Directoire, et un Conseil d'Orientation Stratégique et de Surveillance. Donc, dans le Directoire, il y a 5 personnes, dont de fait 4 désignés par la Fondation, et une désignée par les autres actionnaires de catégorie B. Dans le Conseil d'Orientation Stratégique et de Surveillance, il y a 12 personnes, dont 4 de la Fondation, les 8 autres étant élus par les autres actionnaires. Donc, cela donne quand même une place prépondérante, et notamment le Président de la société que je suis, est désigné par la Fondation également. >> Bon, eh bien moi je garantis que les intérêts de ma maison soient respectés. D'abord, il y a la première garantie, on n'y est pas allé les yeux fermés. Le dossier, il tenait. Les garanties financières, elles étaient, elles ne sont jamais acquises, mais enfin le business plan qui a été présenté a permis à des administrateurs d'investir, soi-disant que l'argent n'était pas perdu. Ce n'est pas simplement un acte social. Et puis, deuxièmement, il y a quand même une place qui nous sera octroyée, je reprends les statuts. on verra comment cela peut évoluer, alors c'est vrai qu'il y a, c'est un peu secoué aussi, on est 50 % du capital, c'est pas 50 % des postes. Pourquoi? Eh bien, parce que c'est comme ça. Ce n'est pas une entreprise comme une autre. C'est la Fondation Abbé Pierre, et on savait à quoi s'en tenir. Et au fond, la meilleure garantie que les intérêts des uns et des autres sont respectés, c'est la confiance qu'on se fait. >> Je trouve intéressant l'investissement 2015, >> c'est un investissement puissant, et qui vient de professionnels plutôt de la finance. >> Oui. >> Et qu'ils ont pu le faire parce que le dossier était très costaud, bien construit, etc, et parce qu'il y avait 4 ans d'antériorité auparavant qui avaient été impulsés par plutôt l'action sociale, qui a su >> Totalement par l'action sociale, et c'est bien, on a, j'ai envie de dire, je le disais tout à l'heure >> professionnalisé l'action sociale. Je parlais, je reprends le thème d'investisseur social, c'est exactement cela. C'est une approche sociale, avec des fonds sociaux, et un savoir-faire particulier dans cette maison, qui a fait en sorte qu'on porte un projet, de façon très opérationnelle, très industrielle, et que celui-ci au fond devient un projet comme les autres. [MUSIQUE]