[MUSIQUE] Le cadre réglementaire a grandement évolué ces dernières années dans le monde de l'assurance et donc pour les mutuelles. Nous allons aborder trois changements importants, la réforme de l'assurance collective, la réforme Hamon et l'adoption de la réglementation Solvabilité 2. Ces évolutions ont eu un impact majeur sur la composition du marché et les stratégies adoptées par les mutuelles. La réforme de l'assurance collective inscrite dans l'Accord National Interprofessionnel dit ANI de 2013, oblige depuis le 1er janvier 2016 toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, à proposer une assurance de santé collective à leurs salariés, dont la prime sera payée à 50/50, moitié moitié, par les deux parties. Ainsi, l'ANI permet à tous les employés de bénéficier de garanties a minima par des contrats collectifs, sans avoir recours à des contrats individuels forcément et souvent plus coûteux. Ainsi, près de 400 000 salariés peuvent être désormais couverts. Pour le secteur de l'assurance santé, le défi est d'assurer le passage de trois à quatre millions de contrats individuels en contrats collectifs, ce qui représente une manne de quatre à cinq milliards d'euros. Ce marché a donc suscité de nombreuses convoitises et de nombreux nouveaux entrants sont apparus au milieu des assureurs et des mutuelles, telles que les banques comme BNP Paribas Cardif ou la Société Générale. Cette concurrence accrue a obligé les mutuelles à adapter leur offre et leur stratégie car elles sont majoritairement spécialisées dans les contrats individuels, 73 % des contrats contre 27 % de leurs contrats en collectif. Ainsi, de nombreuses mutuelles ont développé des offres adaptées à l'ANI comme la MACIF, deux offres Garantie Santé Entreprises et Garantie Santé Indépendants. Mais le véritable problème réside dans le mode de distribution des contrats. En effet, les mutuelles ne sont pas habituées aux pratiques de courtage, et leurs forces de vente n'ont pas la capacité de prospecter toutes les entreprises qui seraient potentiellement intéressées par leurs offres. Au contraire, les assurances et les banques bénéficient d'un effet de réseau. Ils ont déjà des relations de confiance établies depuis longtemps avec les entreprises. Les premiers effets de la réforme se sont fait sentir dès 2015, et comme l'on pouvait s'y attendre, ce sont les sociétés d'assurance qui ont eu les meilleurs résultats, puisque leur assiette a cru de 4,9 % sur l'ensemble de l'année, contre 0,7 % pour les mutuelles, alors que les instituts de prévoyance ont vu une baisse de leur assiette de 2,2 %. Avant cette réforme, et c'est le deuxième mouvement réglementaire, c'est la loi de consommation dite Loi Hamon qui avait fortement touché le secteur des assurances dès 2014. L'objectif de cette législation est de garantir les intérêts des consommateurs face aux professionnels, et notamment les acteurs de l'assurance, et de faciliter les conditions de résiliation de leurs contrats. Avant cette loi, le seul moment où l'assuré pouvait résilier son contrat c'était la date d'anniversaire du contrat. Désormais, il peut le faire à tout moment de l'année, s'il a au moins un an d'ancienneté, et ce sans être pénalisé financièrement. On parle de résiliation infra-annuelle. Cette réforme concerne tous les contrats pour les véhicules, voitures ou motos, les contrats d'habitation et ceux [INCOMPREHENSIBLE], c'est-à-dire ceux qui sont associés à l'achat d'un bien ou d'un service pour l'assurance mobile par exemple. Cette réforme permet ainsi aux consommateurs d'être plus flexibles par rapport à leur assurance pour favoriser la concurrence, créant en cela une vraie révolution pour les professionnels de l'assurance. En effet, traditionnellement, les assurés restaient très fidèles à leur assurance, mais cela risque de changer, et les organismes d'assurance, et donc les mutuelles, vont devoir changer ou faire évoluer leur business model en conséquence. Afin de conserver sa clientèle, l'assureur devra mettre l'accent sur la qualité du service client, et développer de nouvelles stratégies pour attirer de nouveaux adhérents. En interne, les assureurs devront se réorganiser pour faire face à l'augmentation du turnover chez leurs clients et parvenir à leur proposer des offres toujours plus personnalisées. A titre d'illustration, le turnover pour les contrats automobiles était de 13,8 % en 2014 et il a augmenté de 1,1 point en 2015 pour s'établir à 14,9 %. Néanmoins, cette loi pourrait ne pas bénéficier aux consommateurs, puisque le coût d'acquisition pour obtenir de nouveaux clients risque d'augmenter, et les assureurs le répercuteront sur les clients via le prix de leurs contrats. Il est important de souligner que le taux de fidélité des sociétaires des mutuelles est beaucoup plus élevé puisque les taux de résiliation sont de 4,5 % en moyenne avec par exemple pour la MAIF un taux d'à peine 1 %. Enfin, troisième et dernière réforme et évolution réglementaire, la réforme Solvabilité II finalement entrée en vigueur le 1er janvier 2016. C'est une directive de la Commission européenne sur la solvabilité des entreprises d'assurance qui a pour objectif de soutenir le marché de l'assurance européen en garantissant la solvabilité des assureurs. Concrètement, il est demandé aux mutuelles et autres organismes d'assurance de mieux adapter leurs fonds propres aux risques que ceux-ci et celles-ci encourent dans leur activité. Ainsi, les entreprises très exposées aux risques, ou mal gérées, doivent renforcer leurs fonds propres pour répondre aux besoins de leurs adhérents en cas de sinistre. De plus, plusieurs principes de ce qu'on appelle le pilier 2 de la réglementation sur les exigences qualitatives remettent en cause le mode de gouvernance des mutuelles. Le premier concerne les exigences sur les compétences et l'honorabilité des membres des conseils. En effet, les administrateurs des mutuelles sont généralement des bénévoles et cette mesure pourrait créer un déficit de candidats pour ces postes d'administrateurs qui sont par nature des non professionnels. La réglementation prône aussi une évolution de la gouvernance pour créer un organe d'administration opérationnel nommé par le conseil d'administration qui aura pour rôle la gestion et le contrôle de l'application de cette réglementation Solvabilité II. Cet organe modifie en profondeur l'équilibre interne des mutuelles en imposant un organe de direction non élu par les sociétaires et n'ayant donc pas la même légitimité démocratique. Une des conséquences de ces réformes est que les petites mutuelles ne peuvent plus survivre et ne pourront pas survivre sur ce marché hyper concurrentiel et auront de plus en plus de mal à répondre à toutes ces exigences. Ces petites mutuelles ont ainsi cherché à s'associer avec d'autres organismes pour atteindre une taille critique afin de gagner en compétitivité et de réduire les coûts de fonctionnement. On constate donc un mouvement de concentration sans précédent dans le secteur des mutuelles 45 car en 20 ans, le nombre de mutuelles est passé de 6 000 à moins de 500 aujourd'hui. Le dernier rapprochement en date est celui de la MGEN et d'Harmonie Mutuelle qui devrait dépasser un chiffre d'affaires de 4,5 milliards d'euros.