[MUSIQUE] Nous l'avons vu au fil des différents témoignages de cet épisode, le monde associatif regroupe des acteurs très divers et des associations sont présentes dans de très nombreux secteurs. Mais pour autant, la problématique de la diversification des ressources est prégnante chez l'ensemble de ces acteurs associatifs. Le monde associatif, quelle réalité? Alors, en plus d'être au cœur du lien social, comme le souligne Frédérique Pfrunder du Mouvement associatif, les associations mettent avant tout le citoyen au cœur de leur action, ainsi que l'observe Bastien Engelbach, de La Fonda. Par leur vocation avant tout citoyenne, les associations sont bien souvent précurseures dans bien des domaines, comme le rappelle Jean-Benoît Dujol, de la DJEPVA, en prenant l'exemple des politiques de l'action contre la grande pauvreté. De son côté, Laurence Tiennot-Herment nous explique que l'AFM Téléthon a choisi de développer l'accompagnement des malades et de leurs familles mais aussi, et c'est ce qui fait la singularité de cette association, de jouer le rôle d'accélération de la recherche sur les maladies rares. Ainsi, elle agit aujourd'hui aux côtés des acteurs classiques du marché, tout en fournissant des outils au service de tous, et pas seulement de l'AFM seule. Les dirigeants de Vitamine T ont eux choisi de s'attaquer au problème du chômage, comme nous l'explique André Dupon. Son activité est passée d'ateliers assez simples et intuitifs à une structure associative très solide aux activités nombreuses, diversifiées, et déployées sur de nombreux territoires en France et à l'international. Le modèle associatif est donc aujourd'hui le modèle central dans l'insertion par l'activité économique. Enfin, la fondatrice de Môm'artre, Chantal Mainguené, est partie d'un constat terrain et d'un problème non résolu par les acteurs classiques de l'accompagnement éducatif de l'enfant, pour choisir d'agir pour l'éducation artistique des enfants dans les temps périscolaires. C'est d'ailleurs un des points communs à ces acteurs, mais aussi à toutes les associations, et c'est ce qui en fait leur force : elles partent avant tout du terrain et de l'expérience de leurs fondateurs pour monter une structure qui relève avec brio les défis sociétaux pour lesquels l'État et les entreprises lucratives n'ont pas su apporter la réponse. Autour de ces acteurs du monde associatif gravite un ensemble d'institutions et organismes dont nous avons vu certains à travers ces témoignages. Ces acteurs réglementent, accompagnent, promeuvent, analysent, mettent en réseau les associations et leur fournissent des ressources très diverses qui leur permettent de pleinement développer leur action. Venons-en au modèle économique associatif : de quoi parle-t-on? Si les associations relèvent toutes du même statut juridique institué par la loi de 1901, elles organisent leurs activités de manières très différentes selon leur projet et selon leur ambition. À ce titre, comme le soulignent La Fonda et le Modèle associatif, le modèle associatif se pense toujours autour du projet, et non pas simplement en termes d'activités diverses. L'AFM-Téléthon se présente ainsi comme une association opératrice qui comporte des structures filles, qui elles-mêmes ont chacune leur modèle propre, en fonction des activités qu'elles développent. Le groupe Vitamine T a construit, au fur et à mesure, un ensemble d'entreprises sociales qui opèrent dans des domaines très différents, avec une organisation et un statut juridique adaptés à chaque contexte. Môm'artre, elle, est passée d'un modèle d'essaimage de projets locaux en fonction des porteurs motivés à une structuration par antenne régionale, qui permet de développer de nouvelles branches locales plus rapidement et de bénéficier d'un ancrage plus fort sur les territoires. Malgré cette diversité, on peut relever des caractéristiques communes à tous les modèles associatifs qui permettent de les distinguer nettement des entreprises privées classiques ou de l'action des pouvoirs publics. Tout d'abord, le modèle économique associatif est et se doit d'être non lucratif. Cela signifie que les excédents potentiels, et nécessaires, dégagés par l'activité de l'association sont nécessairement réinvestis au service de la cause que l'association veut servir. Ils ne peuvent pas être redistribués aux fondateurs de l'association ou, par exemple, à des actionnaires qui, de toute façon, n'existent pas dans le modèle associatif. Ensuite, comme le soulignent nos témoins terrain ainsi que nos experts académiques dans ce module, l'un des traits essentiels du modèle associatif c'est la place centrale que jouent les ressources humaines mobilisées, et en particulier le bénévolat. Mais plus largement, comme l'a dégagé Le Rameau dans ses travaux, le modèle associatif s'articule autour de ses ressources humaines et de la diversité des ressources financières mobilisées, ainsi que la capacité des acteurs associatifs à nouer des alliances. Ces différents piliers permettent aujourd'hui aux associations de mener une action de premier plan pour répondre aux différentes problématiques sociales qui émergent. Enfin, pourquoi parle-t-on de diversification, ou d'hybridation, nécessaire des ressources associatives aujourd'hui, et qu'est-ce que signifie cette diversification? Comme l'explique Anne-Claire Pache, on parle d'hybridation quand on cherche à diversifier ses ressources et à combiner des ressources de types très différents. Cette analyse vaut pour les ressources économiques au sens financier, mais aussi pour l'ensemble des ressources humaines et celles issues des alliances qui permettent de construire le modèle associatif. La question de l'hybridation est de plus en plus présente aujourd'hui, en particulier au sein des associations, pour une multitude de raisons, qu'elles soient positives ou négatives : baisse et modification des financements publics, porosité grandissante entre le modèle associatif et celui de l'entreprise classique, montée en compétences des acteurs associatifs, mais aussi, si on prend une échelle de temps plus large, comme le fait Le Rameau, on constate que l'action menée par les associations a changé fortement de nature depuis le début du XXe siècle, partant d'une logique de solvabilisation avant d'adopter celle d'opérateur de proximité, pour enfin placer les associations comme des lieux de R et D sociétale, lieux assez privilégiés. Une telle évolution sur le long terme pose inévitablement la question de l'adaptation des modèles associatifs à cette nouvelle réalité. À ce titre, comme l'évoque Anne-Claire Pache, la diversification peut être vécue comme une contrainte ou comme un véritable choix. Dans tous les cas, l'anticipation est clé, ainsi que le rappelle La Fonda, et l'hybridation de son modèle est avant tout l'opportunité de repenser son impact avec d'autres acteurs et de continuer d'innover. Dans le cas de nos fils rouges, la diversification s'est faite, tantôt à la lumière de blocages internes, tantôt suite à des évolutions législatives ou sociétales majeures, qui ont poussé ces structures à repenser leur modèle, sans perdre de vue la boussole qu'est le projet associatif. Ainsi, tous les acteurs associatifs se retrouvent, à un moment ou à un autre, face à cette question de l'hybridation, et les acteurs qui gravitent autour des associations elles-mêmes s'emparent aussi de ces problématiques, ce qui permet de valoriser pleinement l'action associative sans abandonner l'accompagnement qui est nécessaire à son développement. Cependant, la diversification, ou l'hybridation, comme le soulignent nos différents témoins, ne peut pas se faire par simple intuition. Il est important de prendre la mesure de ce qu'un tel processus représente pour la structure. Comme le rappelle le Mouvement associatif, il ne s'agit pas seulement d'aller chercher quelques nouvelles ressources financières par ci par là, mais bel et bien d'interroger la cohérence avec le projet d'ensemble de la transformation envisagée ou souhaitée. Ainsi, par exemple, Vitamine T reste avant tout centré sur l'accompagnement des personnes dans leur retour à l'emploi et non pas sur la lucrativité de ses activités. L'AFM-Téléthon vise avant tout à faire avancer la recherche scientifique dans son ensemble et à accompagner les malades et leurs familles. Môm'artre, tout au long de sa transformation, n'a cessé de placer le jeune enfant au cœur de ses réflexions, sans chercher à tout prix à diversifier ses activités sous prétexte de compétences multiples présentes au sein de l'association. Pour conclure, La Fonda insiste sur la nécessité de toujours penser la diversification en fonction du projet associatif et de l'impact social que l'association souhaite créer sur son territoire, au même titre qu'un acteur économique classique se pose la question de sa création de valeur sur un territoire. Ainsi, comme le rappellent le Mouvement associatif et la DJEPVA, il est capital d'embarquer toute la gouvernance et toutes les parties prenantes dans cette transformation pour assurer la pérennité de l'ensemble du projet associatif.