[MUSIQUE] [MUSIQUE] Bonjour. Je m'appelle Anne-Claire Pache. Je suis professeur à l'ESSEC, spécialisée sur des questions d'innovation sociale, d'entrepreneuriat social et de philanthropie. J'ai dans ce cadre-là mené un certain nombre de travaux de recherche sur les organisations et les individus hybrides. [MUSIQUE] [MUSIQUE] De manière très simple, pour définir ce qu'est l'hybridation d'un modèle économique, je parlerai très simplement du fait qu'il réfère à une diversification des ressources c'est-à-dire que si on considère les différentes ressources à disposition des associations, on a à la fois les subventions publiques ou privées, les dons privés en règle générale mais qui peuvent être d'individus ou venant d'entreprises. On va ensuite avoir les cotisations qui sont les contributions volontaires des membres. On va avoir ensuite toute une nature de ressources qui relèvent plutôt d'une prestation marchande avec la prestation que paient des participants à certaines activités ou le développement d'activités commerciales spécifiques destinées à financer les ressources. Quand on parle d'hybridation des modèles économiques, on parle d'un modèle économique qui s'appuie sur une combinaison de ces différentes ressources, souvent une combinaison de ressources qui prennent la forme de dons ou de subventions et de ressources commerciales ou marchandes. [MUSIQUE] La tendance à l'hybridation est d'abord liée à des tendances de fond de nos économies que ce soit en France ou plus globalement dans d'autres pays du monde, liées à d'une part la raréfaction des fonds publics. Les gouvernements, les collectivités locales en France ont dans un certain nombre de cas de moindres ressources à allouer au secteur associatif ou en tout cas faire certains choix qui réduisent mécaniquement les ressources à disposition des associations. Ça c'est une première tendance de fond. Une deuxième tendance de fond qui est celle d'une plus grande porosité et d'une progressive intégration de certaines des valeurs et de certaines pratiques issues du monde économique ou du monde entrepreneurial y compris dans la sphère associative. Là où il y avait pendant un temps des frontières extrêmement strictes entres les différents mondes, ces frontières deviennent moins strictes et les associations parfois s'emparent de principes, de méthodes qui sont issues du monde des entreprises et à ce titre-là, ça contribue on va dire à cette hybridation. Après ce qui est important de rappeler c'est que l'hybridation peut être de deux natures. Elle peut être contrainte ou forcée, subie, dans le cadre d'associations qui voient de manière inattendue et non choisie un certain nombre de leurs ressources se raréfier et sont du coup dans une situation de se dire, si je veux continuer à mener mes activités, il va falloir que j'aille mobiliser de nouveaux types de ressources. Là on va parler d'une hybridation subie. Il y a des formes d'hybridation qui sont choisies, c'est-à-dire des organisations qui spontanément se disent, il est riche pour mon projet, ma mission sociale, il est riche pour ma capacité à la faire perdurer au travers du temps de concevoir dès le début de mon projet mon modèle économique s'appuyant sur une combinaison de financements à la fois publics et privés mais également de fonds philanthropiques ou de fonds de subventions et des ressources marchandes et on a différentes expériences liées à cette hybridation en fonction de si elle est choisie ou si elle est subie. [MUSIQUE] Je dirai les types d'acteurs, c'est finalement quasiment tous potentiellement peuvent être à un moment donné face à cette situation. C'est une tendance de fond et c'est une question que sont amenés à se poser quasiment l'ensemble des acteurs associatifs. Il faut reconnaître aussi que certaines activités associatives se prêtent plus ou moins bien à l'hybridation. Je pense notamment à deux grands types de secteurs. Le secteur de l'aide humanitaire par exemple. C'est difficile pour ce type d'activités d'imaginer quelles vont être les ressources marchandes qui vont pouvoir être mobilisées pour ces activités. Si on prend les très grandes ONG, Médecins Sans Frontières, Médecins du Monde, on va être essentiellement sur des modèles économiques non hybrides c'est-à-dire qui vont essentiellement s'appuyer soit sur la générosité du grand public, c'est le cas beaucoup par exemple pour Médecins Sans Frontières, soit sur des modèles qui vont combiner des subventions publiques européennes ou françaises ou internationales, avec des grandes organisations internationales et des dons privés mais des modèles qui restent essentiellement fondés sur des dons et des subventions. Je pense à un autre secteur qui va être le secteur de l'aide sociale en France. De la même manière, c'est parfois plus compliqué de trouver des modèles économiques marchands autour de ce type de services et on va être là souvent sur des modèles économiques qui vont être très subventionnés par la force publique dans la mesure où c'est aussi de la responsabilité des acteurs publics que de prendre en charge ces populations. Donc quelque part toutes les associations peuvent être soumises à cette pression ou à cette tendance à l'hybridation même si certains domaines d'activités se prêtent plus ou moins bien à cette démarche et c'est une bonne chose. Je ne pense pas qu'il faille imaginer que l'hybridation est absolument souhaitable pour tous. Elle est souhaitable dans un certain nombre de configurations quand elle répond bien aux objectifs et à la mission de l'organisation. [MUSIQUE] [MUSIQUE]