[MUSIQUE] Nous l'avons vu lors des deux modules précédents, la réflexion sur son modèle économique est une approche très complète pour permettre à une association de penser ou de repenser son projet associatif. Mais encore faut-il savoir se servir de ce modèle et en faire un réel levier d'évolution pour l'association. Quelle méthodologie alors adopter? Eh bien, nous verrons, dans un premier temps, les grandes typologies de revenus et de ressources disponibles qui sous-tendent, le modèle économique et qui peuvent guider la réflexion par rapport aux projets, puis nous verrons quels questionnements peuvent structurer l'analyse de son modèle pour une association, et enfin, en rebondissant sur les témoignages de ce module, nous retracerons les étapes de la transformation du modèle économique associatif. Mais avant de rentrer dans le détail, précisons que les modèles que nous allons dégager sont vraiment spécifiques au secteur associatif français. Comme nous l'avons évoqué dans le module 1, le secteur associatif se structure d'une manière particulière dans chaque pays, ce qui donne lieu à des dynamiques et des modèles parfois très différents. Ainsi, si on prend les associations anglo-saxonnes, et surtout nord-américaines, que nous avons évoquées dans le module 1, elles se caractérisent largement, on l'a dit, par une importante capacité d'innovation en matière de financement bien plus grande que celle de leurs pairs européens. Les modèles qui se dégagent alors peuvent être davantage qualifiés de funding models, plutôt que business models, car ces organisations souhaitent se démarquer des organisations à but lucratif qui cherchent uniquement à trouver des clients. La Stanford Social Innovation Review a dégagé une typologie à la fin des années 2000, et cette typologie reste pleinement d'actualité. Elle recense dix modèles de financement qui se fondent sur trois paramètres bien distincts de ceux que l'on peut trouver en France notamment, c'est-à-dire la source de financement, les catégories de preneurs de décisions et la motivation de ces preneurs de décisions. Penchons-nous maintenant plus en détail sur les méthodes d'analyse qu'une association française peut mobiliser pour questionner son modèle économique. À cet égard, la typologie dégagée par un ensemble d'acteurs, dont le Mouvement associatif et Le Rameau, met en lumière sept grandes sources de revenus et de ressources économiques qui vont constituer sept modèles économiques pour une association. Il s'agit d'un outil pour rentrer dans la réflexion ; en effet, une association n'a pas forcément une source unique, au contraire, elle articule souvent plusieurs sources au sein de son projet avec une dominante plus ou moins claire. Étant donnée la diversité des critères de l'ensemble des modèles associatifs que l'on peut trouver, la typologie proposée ici s'appuie, d'abord sur les logiques de financement dominantes, mais aussi sur deux logiques distinctes de positionnement. D'un côté, des structures d'intérêt général à modèle non marchand qui bénéficient de la capacité de recours au bénévolat, au mécénat et à la générosité du public, et de l'autre des opérateurs économiques, à finalité sociale, qui reposent davantage sur modèle de revenus d'activités. Ainsi, de ces deux grands axes découlent également des logiques de mobilisation et d'alliance différentes selon les sept modèles, comme nous allons le voir tout de suite. La typologie va du modèle le plus léger, nécessitant avant tout les cotisations des membres de l'association, jusqu'à un modèle de mutualisation propre aux plus grands acteurs du secteur. Nous allons en faire une présentation assez synthétique et nous vous invitons, pour en savoir plus, à vous reporter aux documents élaborés par le CPCA qui figurent dans les ressources complémentaires du cours. Dans le premier modèle, les membres couvrent les principaux besoins de l'association, que ce soit en termes de temps consacré ou de contribution financière, et les besoins financiers structurels sont, en effet, faibles. Ce modèle procure à la structure une grande liberté d'action, mais son développement peut rapidement se trouver limité. Ensuite, on trouve le deuxième modèle, dans lequel les revenus sont tirés d'un savoir-faire très spécifique et proviennent de la vente de produits et services, de la réponse à des marchés publics, de la mise à disposition d'équipements. L'association dispose donc d'une relative autonomie financière et d'une capacité d'auto-financement, mais les bénévoles peuvent y voir une perte de sens de leur action et l'action peut s'éloigner progressivement des publics non solvables. En plus de cela, la position de prestataire peut mettre les associations en concurrence avec des structures du secteur lucratives et il convient donc de veiller à ne pas assécher la capacité d'initiative de l'association. Dans le troisième modèle, l'association est employeuse, elle gère un service public, via une délégation de service public, par exemple. Le service est alors conjointement défini avec les pouvoirs publics et les conditions d'exécution sont strictement encadrées, notamment d'un point de vue réglementaire. Ce modèle assure une certaine sécurité financière, une forte reconnaissance de la part des pouvoirs publics, mais il tend aussi à affaiblir l'autonomie dans la décision et dans les marges de manoeuvre pour les responsables de l'association et il présente un risque pour l'association de tomber dans une logique purement gestionnaire, purement comptable. Le quatrième modèle repose lui majoritairement sur des subventions versées par les pouvoirs publics en reconnaissance de l'action d'intérêt général menée par l'association sur un territoire. L'association, dans ce cas, est alors un véritable partenaire de l'action publique ; elle fixe les modalités de la mise en œuvre de ses réponses aux problématiques sociales tout en faisant la preuve de son impact. Dans ce modèle, il faut, pour l'association, avoir une trésorerie assez solide, car il peut intervenir un décalage entre le moment de l'exécution de la prestation et le paiement de la subvention ou le paiement de l'argent dû. Le cinquième modèle est lui fondé sur une logique de cofinancement ; cela veut dire qu'en plus des fonds propres initiaux indispensables, l'association va mobiliser des fonds privés et des fonds institutionnels, en complément, tout en suivant une logique que l'on qualifiera d'abondement. Ce modèle implique un certain niveau de compétences et une capacité à travailler en partenariat. En contrepartie, l'association bénéficie d'une grande capacité d'innovation, même si l'accès au financement peut être assez concurrentiel et difficile pour les associations les moins expérimentées. L'avant-dernier et sixième modèle repose largement sur la mobilisation privée, à travers la générosité du public ou des partenariats avec les entreprises. Dans ce modèle, l'image de l'association qui est véhiculée, les ressources investies dans les collectes et la préparation en amont des partenariats sont trois points de vigilance à retenir pour les associations qui retiennent ce modèle. Enfin, un dernier modèle, le modèle mutualisé. Dans ce cas, plusieurs structures réalisent une mission d'intérêt général ensemble, en prolongement de leurs activités propres. Ce modèle nécessite une importante capacité d'investissement de la part d'investisseurs privés fondateurs, qui peuvent parfois occuper une place significative dans la gouvernance et dans la gestion de l'association.