[MUSIQUE] [MUSIQUE] Je suis Jean-François Connan. Je suis un ancien tourneur-fraiseur, prof de dessin industriel, j'ai fait du recrutement, et aujourd'hui je suis en charge des questions de responsabilité et d'innovation sociale pour le groupe ADECCO, et dans le cadre de cette fonction-là, je pilote une Business unit, comme on dit, qui s'appelle Humando, qui est une entreprise de travail temporaire d'insertion. Cette entreprise est de taille moyenne, petite même pour le secteur de l'intérim, mais très grosse pour le secteur de l'insertion par l'activité économique. Elle salarie à peu près 1 500 personnes en parcours d'insertion tous les jours et sur une vingtaine de sites, une vingtaine d'agences, un peu plus maintenant, et réalise un chiffre d'affaires de l'ordre de 40 millions d'euros. Les personnes qu'elle accompagne nous sont envoyées par ce qu'on appelle des prescripteurs sociaux, c'est-à-dire Pôle Emploi, des missions locales, des travailleurs sociaux, et grâce à l'intérim, sur une période de 12 à 18, 24 mois maximum, on va permettre à ces personnes-là de retrouver un emploi stable, c'est-à-dire en CDI ou dans des formes d'emploi qui leur assurent de l'autonomie. Et on va les former pour ça bien sûr, on va les accompagner socialement, on va les aider à résoudre des problématiques qui sont des problématiques de logement, de santé, de manque de réseau, et de formation, j'en ai parlé tout à l'heure. On est sur une petite niche entre guillemets, mais une niche qui est très importante pour le groupe en termes d'engagement de responsabilité sociale et puis de différenciation aussi par rapport à nos concurrents. On est aujourd'hui le seul majeur du secteur, si on prend MANPOWER ou RANDSTAD, à avoir eu cette démarche de création d'un réseau d'intérim d'insertion. [MUSIQUE] L'origine de l'intérim d'insertion dans le groupe ADECCO est très pragmatique, elle n'est pas liée du tout à une politique de responsabilité sociale, elle est liée pour commencer, elle est née du métier en fait. Quand vous êtes une boutique ouverte sur la rue, avec à gauche le fleuriste, à droite votre concurrent et en face le tabac, et en général la station de métro ou la gare pas très loin, vous voyez rentrer en fait la société française, donc des gens qui sont qualifiés, qui n'ont pas de problème de boulot, souvent ils en cherchent sinon ils ne pousseraient pas la porte, mais vous voyez cette porte poussée aussi par des gens qui sont en plus grande difficulté. Et puis l'intérim. Et donc vous allez, à des moments, pouvoir positionner ces gens sur l'emploi, ou pas. Et vous pouvez avoir plus d'écoute par rapport à des situations personnelles ou pas. J'ai essayé, on a essayé à l'époque, d'utiliser l'intérim, sans consignes de l'entreprise, parce que c'était mon job, à des fins sociales. C'est-à-dire que j'appelais un client, je lui disais, Monsieur Machin, il n'est pas 100 % dans le profil, mais essaie, si ça ne va pas tu me rappelles et on trouvera une solution. L'intérim était un moyen de tester, tester sans pression d'enjeux trop importante pour la personne, c'était aussi un moyen, c'est un moyen, d'avoir un rythme qui peut correspondre à certaines difficultés sociales. Pour des gens, la mensualisation, le mois, n'est pas le rythme. Travailler et toucher sa paie c'est à la journée ou à la semaine. Le fait de pouvoir toucher un acompte, et dans l'intérim c'est très classique, toucher un acompte à la fin de semaine pouvait correspondre au rythme de certains. Et puis, l'entreprise à un moment a remarqué qu'on faisait ce genre de choses, je n'étais pas le seul, et lui a donné de la valeur. On nous a donné un peu plus de possibilités pour le faire, donc c'est devenu un petit bout de politique. Et donc du coup on a commencé à pouvoir l'organiser à l'intérieur de l'entreprise. On est toujours dans quelque chose qui n'est pas spécifique. Ce n'est pas encore une structure de l'économie sociale à part entière. C'est à l'intérieur d'une économie classique, une démarche intrapreneuriale, je crois que c'est les termes qui sont utilisés du côté de l'ESSEC. À partir d'un certain moment, on a commencé à parler de ça à l'État, au gouvernement, à Martine Aubry qui à l'époque était Ministre du Travail, et en lui faisant remarquer que l'intérim pouvait être un bel outil pour l'insertion, et on a donc défendu cet outil-là, et l'État a légiféré. Alors il a légiféré à sa façon c'est-à-dire en créant le statut d'intérim d'insertion, c'est donc une entreprise de l'économie sociale et solidaire comme on dirait aujourd'hui, mais à l'époque on disait structure d'insertion par l'activité économique, pas mal défendue par Michel Rocard, et ça a donc créé un statut possible à l'intérieur du métier du travail temporaire, travail temporaire et insertion. On n'a pas fait de Business Plan quand on a créé cette première entreprise à l'époque. La consigne qu'on avait du groupe ADECCO, que j'avais du groupe ADECCO quand je l'ai créée, c'est, cette entreprise, un, il n'y a pas de mal à faire à faire le bien, ça c'est le côté un peu protestant du groupe ADECCO, à l'époque Lyonnais, mais d'un autre côté, il ne faudrait pas que ça coûte. En tous cas, voilà, ça peut rapporter mais il ne faut pas que ça coûte. C'est une consigne qui était assez loin d'un Business Plan précis mais qui donnait un cadre d'intervention en disant, on doit trouver un modèle économique qui est viable. [MUSIQUE] En fait, on a, à partir de cette structure-là, on a des ressources, on a un peu de moyens, on a donc créé deux filles, deux sœurs donc, une première qui est une agence d'emploi inclusive qui permet de prolonger les parcours, quand les 24 mois classiques, légaux dans l'intérim d'insertion, ne sont pas suffisants, on peut prolonger dans Humando compétences, c'est le nom qu'on lui a donné, et puis on peut mobiliser les outils qui n'existent pas dans l'intérim d'insertion, qu'on ne peut pas mobiliser, comme le CDI intérimaire, donc un contrat à durée indéterminée dans l'intérim, ce qui est un outil assez récent et assez intéressant en termes d'accompagnement social. On a donc créé cette structure-là qui va nous permettre de porter des expérimentations. Et on a créé une autre fille qui s'appelle Humando pluriels, pluriels au pluriel, qui est un cabinet de recrutement, de formation et de conseil en diversité ; mais qui va donc ne plus faire de l'intérim mais aller chercher des candidats un peu particuliers, ce qu'on appelle des candidats singuliers, qu'on va pousser dans les entreprises avec une méthode zéro CV. On est toujours dans l'économie sociale et solidaire, ESUS, on n'est pas dans l'insertion par l'activité économique, mais c'est une offre qui est complémentaire. En général, face à nos clients, d'ailleurs, on raconte de moins en moins Humando, Humando compétences, Humando pluriels, on parle du groupe HUMANDO et la capacité à porter une offre inclusive. Quand on a créé Humando pluriels ou Humando compétences, ce qui à l'époque, il y a 25 ans, avait été fait un petit peu, en avançant, en marchant, aujourd'hui est plus normé. Et c'est vrai qu'il a fallu que je présente un Business Case, un Business Plan, à mes patrons, aux CEO d'ADECCO France et puis ça a été proposé à Zurich, l'entreprise est suisse. Pas uniquement pour des questions de finances mais pour des questions de cohérence par rapport au groupe. On est obligé dans ces structures-là de respecter la Compliance, de respecter les normes financières et juridiques du groupe. Et quand on crée une filiale, quand on crée une marque, cette marque rentre dans une famille, et du coup on est obligé de rentrer dans un modèle un peu normé, y compris donc le Business Case ou le Business Plan. [MUSIQUE]