[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans la vidéo précédente, nous avons vu que le lien d'attachement assure d'un côté la protection face au danger et en même temps une base de sécurité pour explorer l'environnement avec confiance. Mais si cet attachement est universel, pourquoi les enfants réagissent de manière différente dans leur manière d'être en relation avec l'environnement? Cela nécessite d'aller plus loin pour essayer de comprendre quels sont les mécanismes à la base de la mise en place de ces conduites adaptatives. À la suite des travaux de [INCONNU], d'autres chercheurs de l'attachement ont essayé de développer des paradigmes expérimentés pour étudier les différents comportements mis en place par les enfants en situation de danger et d'exploration de l'environnement. Le plus connu de ce paradigme est celui de la Strange situation. Il s'agit d'une situation expérimentale dans laquelle on met l'enfant, on expose l'enfant à une série de séparations dans un contexte de laboratoire dans lequel l'enfant va devoir s'adapter à des séparations, à des retrouvailles avec sa figure d'attachement. En effet, c'est une reproduction en laboratoire de ce que les enfants vivent au quotidien, c'est-à-dire des moments de séparation et de retrouvailles avec la figure d'attachement. Ce que les chercheurs ont observé dans ce paradigme expérimental, c'est que globalement il existe des patterns particuliers de comportements qui différencient les enfants les uns des autres. Ces patterns qu'on appelle des styles d'attachement contiennent au même temps comment l'enfant est capable d'utiliser la figure d'attachement comme une figure de sécurité et de protection lors des moments de séparation, et en même temps comment il est capable d'utiliser cette même figure d'attachement comme une base sécure pour l'exploration. On a identifié globalement quatre styles d'attachement qui sont retrouvés de façon universelle, l'attachement sécure, l'attachement insécure évitant, l'attachement insécure-ambivalent et l'attachement désorienté-désorganisé. Voyons un peu comment ces styles d'attachement se présentent à l'observation. Commençons par l'attachement sécure. Dans ce type d'attachement qui est d'ailleurs l'un des plus fréquents en tout cas dans le monde occidental, l'enfant est capable d'utiliser la figure d'attachement comme une base sécure de protection qui lui permet d'explorer l'environnement avec confiance, et lors de moments de séparation d'être rapidement conforté et rassuré, et de pouvoir être rassuré et régulé même à distance, sans besoin d'avoir le contact physique avec sa figure d'attachement. Dans le cas de l'attachement insécure de type ambivalent, on voit que l'enfant a besoin vraiment de façon très importante de la proximité avec sa figure d'attachement lors des moments de séparation, mais il n'est pas rassuré par cette présence. Et d'ailleurs, quand il obtient cette proximité, il a tendance à refuser et à protester en colère avec cette proximité. C'est comme si l'enfant faisait une expérience d'une faible fiabilité et d'une faible disponibilité de sa figure d'attachement. Et d'ailleurs, il n'est pas rassuré même en présence de sa figure d'attachement pour explorer l'environnement. Dans le cas du troisième type de style d'attachement, l'attachement insécure-évitant, on voit que l'enfant ne manifeste pas de façon claire des émotions et des comportements particuliers au moment de la séparation d'avec sa figure d'attachement. C'est comme s'il ne voyait pas que la figure d'attachement est partie et quand il retrouve la figure d'attachement, il ne montre pas des comportements de joie à la retrouver. Malgré tout, il est dans un état d'hypervigilance anxieuse, d'ailleurs qu'on peut constater par la modification de la plupart des paramètres de stress. Ce qui se passe chez cet enfant, c'est comme si il avait un sentiment de fiabilité relative d'avec l'environnement et il fallait qu'il se débrouille tout seul pour gérer ces situations de stress et de séparation. Et en même temps, il est capable d'explorer avec une attention importante à l'environnement autour de lui. Le dernier style d'attachement est l'attachement désorienté, désorganisé. Là on est face à un comportement de la part de l'enfant autour d'un an avec des comportements qui sont contradictoires. L'enfant peut avoir des mouvements désordonnés, avoir des moments où il est figé, globalement il n'a pas de comportement cohérent. C'est comme si l'enfant n'avait développé aucune anticipation de ce qui va se passer dans la situation de séparation ou dans la situation de stress. Et donc, il n'a pas d'anticipation, il n'a pas de prédiction, Il est comme bloqué dans une situation incompréhensible dans laquelle il manifeste des comportements qui n'ont pas de cohérence. Une question qu'on peut se poser c'est de savoir si ces comportements sont adaptatifs ou certains d'entre eux peuvent déjà être considérés comme des comportements pathologiques. Globalement, ces comportements sont des réactions d'adaptation à des expériences interpersonnelles réelles, donc correspondent à une saine adaptation de la part de l'enfant. Mais on peut dire que certains de ces styles, notamment les styles anxieux, les styles insécures, limitent la confiance de l'enfant vis-à-vis de l'environnement et la capacité d'explorer l'environnement. Probablement seulement le style d'attachement désorienté, désorganisé, est proche de la pathologie parce qu'on voit que l'enfant n'a aucune cohérence et stabilité dans les représentations qu'il a de lui-même en lien avec l'environnement. Quelles sont les origines de ces comportements ou de ces styles d'attachement différents? C'est lié à l'enfant ou c'est lié aux parents? Les études sur l'attachement ont montré de façon claire que l'un des facteurs principaux associés à la sécurité de l'attachement c'est la sensibilité de la réponse parentale, la cohérence, la consistance, la prévisibilité de cette réponse. Et là, on retrouve ce que nous avons déjà vu dans les leçons précédentes autour du mirroring parental. On peut dire aussi que, les études ont montré que ce style d'attachement est fortement lié au style d'attachement des parents eux-mêmes, qui est en lien avec leur propre expérience d'attachement. Et on voit là qu'il y a quelque chose autour d'une transmission intergénérationnelle des styles d'attachement. Enfin, on sait que les caractéristiques spécifiques du bébé, par exemple son tempérament, la présence d'autres pathologies ou la prématurité peuvent conditionner les styles d'attachement, probablement parce que ces caractéristiques créent des besoins spécifiques qui sont plus difficiles de la part de pourvoyeurs de soins à identifier et s'y ajuster de façon adéquate. En conclusion, les styles d'attachement sont des adaptations interpersonnelles à des expériences réelles auxquelles l'enfant a été confronté. Il s'agit de schémas mentaux qui permettent à l'enfant de prédire et d'anticiper l'environnement. C'est comme si l'enfant chaussait des lunettes colorées qui vont définir une manière spécifique de voir le monde. Et donc, ça permet à l'enfant d'avoir des anticipations et des ajustements mais aussi des contraintes liées à son expérience personnelle. Donc, si l'attachement a cette fonction essentielle de protéger, de permettre une base de sécurité, transmet aussi quelque chose d'essentiel qui est l'expérience du fonctionnement social avec un pourvoyeur de soins spécifique, la dernière question à laquelle il faut alors répondre c'est comment fait l'enfant à passer de cette expérience spécifique avec un pourvoyeur de soins un rapport avec un environnement beaucoup plus élargi dont il n'a pas forcément tous les codes immédiats, si ce n'est ceux qui ont été développés avec son pourvoyeur de soins spécifique. [MUSIQUE] [MUSIQUE]