Bonjour. Au cours de cette séance d'exercices, nous allons nous intéresser au problème de la marche de potentiel. Une particule est placée dans un potentiel nul pour X négatif et valant V pour X positif. Le potentiel est ainsi discontinu en X = 0. En mécanique classique, un tel saut de potentiel pourrait, par exemple, correspondre à un plan fortement incliné sur lequel on enverrait une bille. On s'attendrait alors à deux comportement possibles. Si la bille a une énergie cinétique suffisante, elle franchit la barrière et continue à droite avec une vitesse moindre. A contrario, si la vitesse de la particule est insuffisante, elle rebondit sur la barrière et revient à gauche avec la même vitesse. Comme nous allons le voir, le comportement quantique est différent. Même si l'énergie de la particule est supérieure à l'énergie potentielle, une réflexion partielle sera observée. Pire, cette réflexion subsiste dans le cas d'un potentiel négatif, comportement qui n'a pas d'analogue classique. Comme dans à peu près tout problème de mécanique quantique, la résolution se fera en déterminant tout d'abord les états propres d'énergie, autrement appelés états stationnaires. L'évolution temporelle du système sera obtenue dans un second temps, en décomposant l'état initial sur les états stationnaires et en faisant évoluer ces derniers au cours du temps. Reprenons ainsi l'équation de Schrödinger indépendante du temps, également appelée équation aux valeurs propres.- (h barre 2) / (2m) ((d 2 psi) / (d x carré)) + (V- E) psi = 0. Cette équation est une équation différentielle du second ordre en x. Dans le cas où l'énergie E est supérieure à V, les solutions sont des exponentielles complexes de la forme psi (x) = psi 1 e (ikx) + psi 2 e (- ikx), avec ((h barre 2 k 2) / (2m)) = E- V > 0. On le voit à la valeur du vecteur d'onde k, elle dépend du potentiel V et sera donc différente de part et d'autre de la marche. Le potentiel étant discontinu en X = 0, on résout séparément l'équation en valeurs propres de chaque côté de la barrière. Pour X négatif, on obtient psi de x = A e (i k0 x) + B e (- i k0 x), avec (h barre k0) = racine de (2 m E). Pour X positif, on obtient de la même façon psi (x) = C e (i kv x) + D e (- i kv x), avec (h barre kv) = racine de (2m (E- V)). Ces solutions correspondent à des ondes planes, progressives ou régressives, c'est-à-dire venant respectivement de la gauche ou de la droite, des deux côtés de la marche. Reprenons l'expression de la fonction d'onde à gauche de la marche, psi (x) = A e (i k0) + B e (- i k0). Dans cette expression, le terme A e (i k0 x) décrit une onde plane venant de la gauche. De même, le terme B e (- i k0 x) décrit une onde plane venant de la droite et correspondant ainsi à la composante réfléchie sur la marche. Regardons maintenant la fonction d'onde à droite de la marche. Psi (x) = C e (i kv x) + D e (- i kv x). Dans cette expression, le terme C e (i kv x) décrit une onde plane venant de la gauche, qui correspond ainsi à la composante transmise de l'onde incidente. Enfin, le terme D e (- i kv x) décrit une onde plane venant de la droite. Dans le cas de notre problème où nous envoyons une particule depuis la gauche, cette onde est inexistante. Nous pouvons donc annuler le terme en D, ce qui permet de réduire d'une unité le nombre de degrés de liberté du système. Le problème étant symétrique, nous pourrions construire une deuxième famille de solutions pour des ondes venant de la droite. Dans ce cas, nous annulerions le coefficient A. Il reste à relier entre elles les solutions de part et d'autre de la marche. Comme nous l'avons vu lors de la séance d'exercice 6.1, dans la mesure où le potentiel est fini, bien que discontinu, la fonction d'onde et sa dérivée première sont continues en x = 0. Nous allons donc exprimer mathématiquement ces relations de continuité en x = 0, de façon à raccorder les fonctions d'onde de part et d'autre de la marche. Écrivons donc les fonctions de part et d'autre de la marche. La continuité de la fonction d'onde en x = 0 s'écrit A + B = C. De la même façon, la continuité de la dérivée première de psi s'écrit k0 (A- B) = kv C. En combinant les deux équations, il vient A = ((k0 + kv) / (2 k0)) C, et B = ((k0- kv) / (2 k0)) C. Il n'y a donc plus qu'un seul paramètre libre C, qui correspond à la normalisation de la fonction d'onde. Les états stationnaires correspondent à des ondes planes de vecteurs d'ondes différents de part et d'autre de la marche, et ne peuvent donc pas en toute rigueur être normalisés, car ils sont distribués dans tout l'espace. Voici une vidéo montrant quelques états propres d'énergie supérieure à la valeur du potentiel. Ces états forment une infinité continue d'états qui sont délocalisés. On les appelle états de diffusion par opposition aux états liés qui correspondent à des niveaux d'énergie discrets. À gauche de la marche, on observe des battements qui résultent de la superposition de l'onde plane incidente avec l'onde réfléchie. La densité des probabilités de présence représentée en bas exhibe ainsi les maxima et minima espacés de façon périodique. A contrario, à droite de la marche, les états propres correspondent à une onde plane unique, et donc à une densité de probabilité de présence uniforme. Regardons maintenant le courant de probabilité. Pendant la séance d'exercice 5.1, nous avons étudié ce courant de probabilité pour la superposition de deux ondes planes de directions opposées et de même longueur d'onde. Cette situation est celle que nous avons à gauche de la marche. À droite de la marche, nous avons une onde plane unique. Nous obtenons ainsi les courants de part et d'autre de la marche, sous la forme j (x < 0) = ((h barre k0) / m) ( | A | au carré- | B | au carré ) fois le vecteur u x. Et j (x >= 0) = ((h barre kv) / C) ( | C | au carré ) fois le vecteur u x. Les courants obtenus à droite et à gauche peuvent s'interpréter facilement. Le courant à gauche de la marche se décompose en deux parties. Le courant j I = ((h barre k0) / m) ( | A | au carré ) correspond à l'onde incidente se déplaçant de la gauche vers la droite. Le courant j R =- ((h barre k0) / m) ( | B | au carré ) s'interprète comme le courant lié à l'onde réfléchie se déplaçant vers la gauche. À droite de la marche enfin, le courant j T = ((h barre kv) / m) ( | C | au carré ) correspond à l'onde transmise. Regardons maintenant les coefficients de réflexion et de transmission. Le coefficient de réflexion R s'écrit comme le rapport des normes des courants réfléchis et incidents. Il vaut simplement ( | B | au carré ) / ( | A | au carré ) = ((k0- kv) / (k0 + kv)) au carré. De la même façon, le courant de transmission s'écrit comme le rapport du courant transmis par le courant incident. Il vient rapidement T = (kv ( | C | au carré )) / (k0 ( | A | au carré)) = (4 k0 kv) / ((k0 + kv) au carré). À partir des coefficients de réflexion et de transmission, on obtient rapidement une équation de conservation de la matière sous la forme R + T = 1. Cette équation traduit la conservation du flux de particules. Elle est totalement analogue à l'équation de conservation du flux d'énergie, que l'on pouvait obtenir en électromagnétisme par exemple, dans le cas de la réflexion et de la transmission partielle d'une onde, à la frontière entre deux milieux dits électriques différents. Des équations similaires peuvent être obtenues pour d'autres systèmes décrits par le formalisme ondulatoire, comme par exemple les ondes acoustiques. Que se passe-t-il lorsque l'on envoie sur la marche de potentiel non plus une onde plane de longueur d'onde unique, mais un paquet d'onde localisée décrivant une particule unique? Pour répondre à cette question, il faut décomposer le paquet d'onde sur la base des états propres, faire évoluer ces derniers et recomposer la fonction d'onde à chaque instant. C'est ce qui est effectué dans la vidéo ci-contre. Dans un premier temps, le paquet d'onde se rapproche de la marche de potentiel et est affecté, comme tout paquet d'onde libre, par un élargissement progressif. Une fois que le paquet d'onde a atteint la marche, on observe plusieurs phénomènes. À gauche de la marche, des interférences entre l'onde incidente et l'onde réfléchie apparaissent clairement. Peu à peu, elles laissent la place à un paquet d'onde qui repart vers la gauche. Un paquet d'onde apparaît sur le côté droit de la marche, correspondant à la partie transmise du paquet d'onde initial. Ce paquet d'onde est composé de fréquences plus faibles ou de longueurs d'ondes plus élevées que la paquet d'onde incident, car l'énergie cinétique est plus faible sur la marche, du fait de la présence d'une énergie potentielle. Alors, de quel côté est la particule? Des deux côtés à la fois, puisque le paquet d'onde a été scindé en deux et qu'il représente l'amplitude de probabilité et de présence. La composante réfléchie de l'onde n'est jamais nulle. Évidemment, si l'on cherche à mesurer de quel côté se trouve la particule, on obtiendra une réponse unique. Le processus de mesure se traduira par une réduction du paquet d'onde, localisant la particule d'un côté et d'un seul de la marche. Mais, tant qu'aucune mesure n'a été effectuée, la particule est bien des deux côtés de la marche en même temps. Que se passe-t-il maintenant pour une marche de potentiel négative? En mécanique classique, la particule serait simplement attirée par le trou de potentiel et tomberait dedans. Les équations que nous avons obtenues restent valables pour un potentiel négatif. En particulier, les courants incidents, réfléchis et transmis ont la même expression que pour une marche positive. Les expressions des coefficients de réflexion et de transmission sont également inchangés. On a donc toujours une onde réfléchie, même en présence d'une marche négative, ce qui est un comportement purement quantique. Finalement, la seule chose qui change est le vecteur d'onde ou la longueur d'onde, à droite de la marche. h barre kv = racine de (2m (E- V)) > (h barre k0). Contrairement au cas précédent, le vecteur d'onde augmente au passage de la marche. L'énergie cinétique de la particule augmente d'une quantité correspondant à la variation d'énergie potentielle. La vidéo ci-contre illustre ce phénomène. Au franchissement de la marche, la paquet d'onde transmis est caractérisé par des longueurs d'ondes beaucoup plus courtes et une vitesse de propagation plus élevée que celle de l'onde incidente. Une partie de l'onde est dans tous les cas réfléchie vers la gauche. Un cas limite est particulièrement intéressant, celui du précipice de potentiel, c'est-à-dire un potentiel tendant vers moins l'infini à droite. Dans ce cas, le vecteur d'onde à droite de la marche tend vers l'infini. Dans le même temps, les coefficients de réflexion et de transmission tendent respectivement vers 1 et vers 0. On observe alors une reflexion quasi-totale, qui n'a aucun équivalent en mécanique classique. Un peu comme si la particule fuyait le précipice, au lieu de tomber dedans. En mécanique classique, cela correspondrait au fait de faire rouler une bille vers une falaise, et de voir cette dernière faire demi-tour devant le précipice. Cette analyse est confirmée par une simulation numérique. L'exemple ci-contre correspond à un potentiel égal à moins 1000 en unité arbitraire, à droite, et à une énergie du paquet d'ondes égal à 50, dans les mêmes unités. Regardons ce qui se passe lorsqu'on envoie le paquet d'ondes vers le précipice. On observe bien une reflexion quasi-totale du paquet d'ondes sur la marche du potentiel. À droite de cette dernière, la longueur d'ondes est extrêmement petite, correspondante à une fréquence et à une densité d'énergie cinétique élevée. La conservation de l'énergie impose alors une densité de probabilité de présence négligeable, à droite de la marche, de façon à éviter, en quelque sorte, une divergence de l'énergie cinétique. Étudions, pour finir, le cas d'une onde d'énergie inférieure à la marche de potentiel. À gauche de la marche, l'expression des états stationnaires ne change pas, psi de x = Ae ik0x + Be - ik0x, avec hk0 = racine de 2mE. Par contre, à droite de la marche, les solutions de l'équation en valeur propre sont maintenant des exponentielles réelles, psi de x = Ce- kx + De + kx, avec hK = racine 2m (V- E). Seule l'exponentielle décroissante est acceptable de façon à éviter une divergence de la fonction d'ondes. On peut ainsi imposer D = 0. De la même façon que pour les états de diffusion, la fonction d'onde et sa dérivée son continues. Par contre, pour les états d'énergie E inférieur à V, on est en présence d'une onde évanescente, à droite de la marche. Les conditions des continuité de la fonction d'onde et de sa dérivé première s'écrivent de façon légèrement différentes. La continuité de la fonction d'onde donne A + B = C. Celle de la dérivée première s'exprime sous la forme ik0 (A- B) = -KC. En combinant les deux expressions, on obtient A = k0 + ik sur 2k0 x C et B = k0- iK sur 2k0 x C. Ces relations sont très similaires à celles obtenues pour des énergies E supérieures à V. La seule différence est l'apparition du terme complexe i traduisant un déphasage de l'onde à la reflexion et à la transmition. On observe notament que la norme de A et celle de B sont égales. L'amplitude de l'onde réfléchie est la même que celle de l'onde incidente. La vidéo ci-contre vous montre ces états propres. À droite de la marche, les états propres d'énergie E inférieurs à V sont des ondes évanescentes qui ne se propagent pas. À gauche de la marche, on observe des battements maximaux entre ondes incidentes et ondes réfléchies qui sont dues au fait que ces deux ondes ont maintenant la même amplitude. Regardons maintenant l'expression des courants de probabilité. À gauche de la marche, l'onde est la superposition de deux ondes, de mêmes longueurs d'ondes se propageant dans des directions opposées. On a ainsi j de x = hk0 sur m fois la norme de A2, moins la norme de B2. Dans la mesure où les deux ondes ont la même amplitude, les courants incidents et réfléchis sont égaux et opposés. À droite de la marche, le courant j = 0, est identiquement nul, car psi* P psi est imaginaire pur. Autrement dit, une onde évanescente ne transporte pas de particules, elle est associée à un flux nul. Les coefficients de reflexion à une transmission s'obtiennent aisément. Celui de reflexion s'écrit R = à la norme de B2 sur la norme de A2 = 1. Et celui de transmission, T = jT sur jI = 0. On est ainsi en présence d'une reflexion totale de l'onde, conforme aux attentes. Regardons, pour finir, ce qui se passe lorsque l'on envoie un paquet d'ondes localisées sur une telle marche de potentiel. Lorsque le paquet d'ondes atteint la marche de potentiel, on observe à nouveau les interférences entre l'onde incidence et l'onde réfléchie. Dans la marche, on observe bien une onde évanescente sans propagation. Rapidement, on voit émerger le paquet d'ondes réfléchies intégralement, et se propageant vers la gauche. Cette séance d'exercice est maintenant terminée, merci de l'avoir suivie et à bientôt.