[MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] La confiance est un construit historique et social. La confiance se construit dans le temps au travers de multiples relations parfois difficiles. La relation de confiance est clé dans toutes les relations humaines et constitue une condition de résilience et de solidité dans les moments difficiles. La confiance est un élément que notre environnement nous donne pour réaliser de grandes choses. La confiance est un ensemble de manifestations externes qui développent la force d'un groupe. Guy Ontanon, avez-vous une course où tout s'est joué sur la confiance? Quelle est la part que peut jouer la confiance chez un sportif de haut niveau? Confiance en lui-même et confiance avec son coach. >> La course qui me vient tout de suite à l'esprit est la finale du 100 mètres des championnats du monde en 2015 à Pékin. Pour l'illustrer je choisirai la citation de Ralph Waldo Emerson, la confiance en soi est le premier secret du succès, ce qui est déjà un élément de réponse à la deuxième réponse posée. Auteur de la meilleure performance mondiale en 2015, meilleur temps des demi-finales, Justin Gatlin est donné favori de la finale. Présent au stade avec Jimmy Vicaut, je suis resté sur le terrain d'échauffement quand Jimmy est allé en chambre d'appel avec les autres sprinteurs. Depuis le terrain d'échauffement, nous avions accès à un écran qui retransmettait les images de la chambre d'appel. Alors que Justin Gatlin était assis sur un des bancs de la chambre d'appel Usain Bolt est venu s'asseoir à côté de lui en appuyant son regard de façon insistante. Pendant tout ce temps, Justin Gatlin a cherché à éviter le regard d'Usain Bolt qui semblait lui dire, c'est moi le boss, tu vois je suis là et tout à l'heure je serai le champion du monde. Pour moi, Usain Bolt avait déjà gagné la course avant même de rentrer sur la piste. Effectivement, Bolt a été champion du monde mais pour moi c'est surtout Justin Gatlin qui a perdu cette finale. Il est extrêmement difficile de donner un pourcentage sur la part que peut jouer la confiance dans la performance de haut niveau car ce sont différents facteurs qui font la performance. Ceci étant dit, sans confiance un sportif ne peut pas être à son meilleur niveau, tout comme il ne pourra pas l'être dans le travail. Confiance en ses capacités bien sûr mais aussi confiance en son entraîneur et on en revient à la dualité entre les objectifs à court terme et la durée de la carrière. Reprenons l'exemple de Bolt qui a toujours gardé confiance en son entraîneur. Prenons l'exemple en France de Jean Galfione ou de Stéphane Diagana qui malgré les difficultés rencontrées ont gardé la confiance en leur entraîneur tout au long de leur carrière. En complément, je peux citer Marie-José Pérec. Même si elle a eu de nombreux entraîneurs tels François Pépin, Jacques Piasenta ou John Smith pour ne citer qu'eux, elle a toujours eu confiance en eux au moment où elle avait décidé de s'entraîner avec eux et c'est aussi, au-delà de son talent et des ses qualités physiques, ce qui lui a permis d'avoir le palmarès qu'elle a eu. C'est notamment John Smith qui lui a permis de mieux appréhender les compétitions et développer cette confiance. >> Bonjour Michaël Jeremiasz. Vous êtes un joueur de tennis en handisport et quadruple médaillé d'or aux Jeux paralympiques en 2004, 2008 et 2012. Comment la confiance en vous vous a-t-elle permis de réaliser des performances? >> Quand je me suis lancé dans le tennis en fauteuil, la question de la confiance en soi, vu que j'étais ancien joueur de tennis, s'est posée très rapidement. Je me suis lancé dans un sport que je pensais maîtriser et j'ai dû reprendre tout à zéro. Le mode de déplacement n'était plus le même. En réalité si je me suis lancé là-dedans avec un vrai désir d'être un sportif de haut niveau, de très haut niveau, je devais être certain de ma capacité à la faire et de ma capacité à travailler pour arriver à atteindre mes objectifs. Quand je suis devenu médaillé paralympique aux Jeux d'Athènes en 2004, je suis arrivé en me disant que rien ne pouvait m'arrêter. Mais ce n'était pas tant ce que je venais de faire pendant quatre ans sur les terrains d'entraînement. C'est que je venais d'avoir un accident quatre ans auparavant qui m'avait rendu paraplégique et je me suis dit il n'y a rien qui à partir de maintenant peut m'arrêter. Il n'y a rien qui doit m'arrêter. Si je dois bosser, je bosserai dur. Si je tombe, je me relèverai comme je l'ai fait auparavant. En fait, j'ai appliqué ce que je faisais dans ma vie de tous les jours sur un terrain de tennis, dans une salle de muscu. Ça s'est poursuivi en 2008 quand j'ai été médaillé d'or en double aux Jeux de Pékin, plus que jamais, et pendant des mois et des mois cette sensation d'invincibilité qui s'est confirmée pour ma quatrième et dernière médaille en 2012 aux Jeux de Londres. Depuis tout petit, je n'ai jamais pu imaginer qu'on pourrait être champion olympique ou paralympique sans avoir une énorme confiance en soi. Pour arriver à ça, il faut avoir énormément travaillé en amont pour se dire que le jour J il ne peut rien nous arriver. Peu importe qu'il y ait une distraction dans le public. Peu importe que votre fauteuil ne soit pas réglé de la bonne manière. Peu importe que vous ne sentiez pas la balle exactement comme il faut. Le travail qu'on a pu faire pendant tant d'années, et moi c'était ma force. C'est que moi j'étais un acharné du travail. Je n'étais pas forcément le plus doué techniquement, mais un bosseur. Donc à un moment c'est de se dire pour arriver à cet état de confiance, il faut avoir tout verrouillé autour, c'est-à-dire la vie privée, la vie professionnelle, la prépa physique, la prépa mentale, les soins. Au global, être complètement carré là-dessus ce qui fait que quand vous arrivez sur le terrain vous êtes armé et que si vous perdez c'est vraiment que la personne en face est plus forte. D'ailleurs ça n'ébranle pas votre confiance pour un sou parce que vous avez fait ce que vous aviez à faire. >> Quels ont été pour vous les développeurs et les renforçateurs de confiance dans votre carrière? >> Il y a eu plein de raisons qui ont fait que j'ai progressivement eu à nouveau confiance en moi dans mon parcours de vie, mon parcours d'homme mais surtout dans ma carrière de sportif de haut niveau. Ça a été d'abord de devoir réapprendre à vivre après mon accident, de me reconstruire. Quand du jour au lendemain vous avez l'autonomie d'un enfant de dix mois et qu'on vous dit que vous allez devoir vivre de cette manière-là, vous devez faire preuve d'une grosse faculté d'adaptation et de beaucoup de travail, notamment en rééducation pour réaccéder à une autonomie qu'on a appris il y a 20 ans plus tôt. En fait, dans le sport de haut niveau, je l'ai transposé c'est-à-dire que pour moi l'enjeu était simple. C'était que si je me lance dans quelque chose et notamment dans le tennis qui était mon sport de prédilection, je ne le ferai pas à moitié. Il va falloir travailler dur. Donc moi ça a toujours été la clé. La clé ça a été le travail et de me dire que en face de moi il va y avoir des gens qui vont faire la même chose voire plus. Donc qu'est-ce que je peux faire tous les jours pour me dire que je vais avoir le petit truc supplémentaire? Donc ça a été énormément de préparation physique. Moi j'étais le premier athlète à faire de la préparation physique. Ça n'existait pas en 2001 en tennis en fauteuil. Ça n'était pas professionnalisé comme ça l'est aujourd'hui. Donc ça a été beaucoup de travail à ce niveau-là. Ça a été aussi beaucoup de travail spécifique de mobilité au-delà de la prépa physique et de la musculation. Ensuite c'est réadapter tout un passé de joueur de tennis valide à une carrière de joueur de tennis assis. Donc l'idée ça a été d'aller toujours chercher les meilleures personnes les plus à même de m'accompagner dans ce projet sportif. >> La relation de confiance se crée au quotidien dans le cadre des interactions que le leader a avec les différentes parties prenantes. Un travail de recherche mené dans le cadre de la chaire ESSEC du Changement sur le leadership naturel avait mis en évidence la notion d'intelligence de situation comme élément contributeur de confiance. Un leader qui fait preuve d'intelligence de situation est un leader qui favorise la confiance et donc la qualité de la relation. L'intelligence de situation peut se définir au travers des cinq composantes suivantes. L'introspection concerne les pratiques nécessaires pour une bonne connaissance de soi-même et de ses manières d'être et d'agir. La compréhension du contexte, des enjeux et des modes de fonctionnement des personnes avec lesquelles on interagit est très importante. C'est la capacité à rentrer dans la logique de l'autre. L'interaction avec l'autre est le moment où se crée le contact qui sera à l'origine de la qualité de l'échange. La capacité à interagir est très importante tant celle-ci conditionne l'envie à participer à l'échange collectif. Savoir mettre les autres à l'aise, leur donner envie de s'investir, savoir parler aisément sans animosité sont des exemples des qualités recherchées. La réalisation traite de la capacité à finaliser et à aboutir. Les interactions ne produisent pas forcément des résultats exploitables pour les personnes qui y participent. Il faut savoir finaliser. La capitalisation permet à tout un chacun de ne pas systématiquement repartir de zéro. C'est la capacité à savoir capitaliser des expériences de telle manière qu'elles permettent des productions et des apprentissages d'une plus grande ampleur. >> Avec les différents sportifs nous avons pu voir des facettes du leadership dans le cadre du sport de haut niveau. Les différents témoignages en lien avec la notion de performance nous ont amenés à définir le leadership, l'acte d'être leader au travers de cinq thématiques en lien avec les approches existantes en management et en leadership. Ces cinq thématiques sont, trouver les mots et savoir traduire, organiser le court terme pour le long terme, rechercher l'explosivité, combiner et prendre des risques, développer la confiance. Comme toute modélisation, cela ne constitue qu'une grille de lecture des pratiques pour les faire évoluer. La compétence de leadership nécessite de nombreux allers-retours entre la pratique et l'analyse de la pratique. Comme le disait Pirandello, il faut en même temps marcher dans la rue et être au balcon en train de se regarder marcher. Ce MOOC et l'analyse de la pratique du leadership au travers du sport de haut niveau ne constitue qu'une grille pour découvrir en vous l'étoffe et les capacités de leader. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE]