[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans ce deuxième épisode sur les fondamentaux de l'investissement à impact, nos entrepreneurs à impact ont partagé avec vous leurs expériences personnelles, leurs inspirations et leurs aspirations, et nos investisseurs et experts invités ont complété ce regard en offrant le point de vue du financeur. On peut dégager trois grands axes de réflexion : les caractéristiques d'un entrepreneur à impact, la quête de l'impact maximum, et la lutte contre les préjugés et les a priori. Première question : à quoi reconnaît-on un entrepreneur à impact? Je dirais, avant tout à sa mission, sa vocation, son combat. Jean Moreau, co-fondateur de l'entreprise à impact Phenix, et président du mouvement Impact France, explique que l'entrepreneur à impact cherche à apporter une réponse à un problème social ou environnemental qu'il a identifié et qu'il considère comme mal résolu, et pour Émilie Kyedrebeogo, fondatrice de Palobdé Afrique, il doit se montrer prêt à surmonter tous les obstacles pour mener à bien son projet. C'est donc un entrepreneur sincèrement altruiste, qui pense d'abord aux autres et au bien commun. Des statuts juridiques peuvent venir confirmer cet engagement, comme le statut ESUS, entreprise solidaire d'utilité sociale, mais l'entrepreneur à impact est bien plus qu'un statut juridique, et comme le rappelle Jean Moreau, statut ne fait pas vertu : ce qui le définit n'est donc pas tant son statut juridique que son engagement quotidien pour promouvoir l'impact, et ceci autour de quatre axes. Deux de ces axes sont externes et concernent la réalisation d'un impact net positif, social et environnemental, et deux de ces axes sont internes et concernent le partage du pouvoir au sein de la structure, autrement dit, la gouvernance et le partage des richesses entre les parties prenantes. Emmanuelle Touilloux, co-fondatrice de Marguerite et directrice de l'entreprise, rappelle que pour un entrepreneur à impact, il est important de se faire accompagner pour prendre du recul, de la hauteur, et se détacher d'un quotidien souvent intense et parfois mouvementé. Diane Scemama, co-fondatrice de Dream Act, ajoute que pour progresser, l'entrepreneur à impact doit se remettre en question quand il le faut, et réfléchir sur les conséquences négatives que son activité peut engendrer au jour le jour afin de continuer à innover et perfectionner sa stratégie d'impact et sa cohérence. Poursuivons avec la deuxième question, un enjeu crucial pour l'entrepreneur : la recherche d'un impact maximal, qui est la quête du Graal pour l'entrepreneur. Pour maximiser son impact, l'entrepreneur à impact va évaluer ses besoins de financement et chercher les sources de financement correspondantes. Le but est de trouver un modèle économique viable qui lui permette de dégager un bénéfice, c'est-à -dire, les ressources nécessaires au développement de la mission sociale et, ou, environnementale, de l'entreprise. On ne le répétera jamais assez en effet, que le fait de faire un bénéfice pour le réinvestir dans l'entreprise et non pour le redistribuer à des actionnaires n'est non seulement pas antinomique avec l'entrepreneuriat à impact, mais est au contraire essentiel pour son développement, et donc, pour la maximisation de son impact. Il s'agit donc bel et bien de combiner création de valeur économique et impact social. Enfin, troisième question : l'entrepreneur à impact est confronté à des préjugés et des a priori. Ceux-ci sont de trois types : d'abord, les préjugés que les autres peuvent avoir sur l'entrepreneur ou sur son projet. Diane Scemama cite ainsi les personnes qui décrètent que les produits et services de consommation écoresponsables proposés par les entrepreneurs à impact sont coûteux et élitistes. Pour Jean Moreau et Antoine Michel, l'a priori selon lequel les entrepreneurs à impact manquent de réalisme économique, de compétence, et d'ambition, est tenace et très souvent préjudiciable aux entrepreneurs à impact. Ensuite, il y a les préjugés que les autres ont sur l'entrepreneuriat à impact en général, notamment le fait qu'impact et croissance seraient incompatibles ou, comme a pu l'observer Antoine Michel, partenaire chez Investir&+, que l'entrepreneuriat social et solidaire se limite à une action humanitaire. Enfin, il y a les préjugés que les entrepreneurs ont eux-mêmes, notamment liés au fait qu'il faille attendre que leur projet soit parfaitement rôdé et abouti pour oser franchir l'étape de la demande de financement, comme l'a personnellement vécu Diane Scemama. Ou encore, la crainte de ne pas paraître suffisamment crédible, car, par exemple, jeune et nouveau dans le monde de l'entrepreneuriat, comme ce qu'a ressenti Emmanuelle Touilloux. Marie-Geneviève Loys Carreiras, qui est responsable des investissements solidaires chez BNP Paribas Asset Management, souligne, elle, les réticences des entrepreneurs sociaux face aux grands groupes bancaires comme le sien, qu'ils ont parfois tendance à diaboliser et à juger comme non alignés avec leur ambition d'impact. Heureusement, Jean Moreau constate que ces préjugés tendent à se déconstruire, à disparaître, et laissent place à des perspectives plus justes et plus optimistes. Nous observons même un véritable engouement autour de l'entrepreneuriat et de l'investissement à impact, ce qui s'explique par ce que l'on pourrait qualifier d'alignement des planètes entre, d'une part, les talents de la jeune génération qui s'engage de plus en plus et crée des projets à impact, d'autre part, des ressources financières qui ne cessent d'augmenter pour soutenir et financer ces projets, et enfin, la mise en lumière de ces modèles devenus plus séduisants, plus attractifs, plus pertinents, s'inscrivant ainsi dans un marché en pleine expansion. Tout cela fait que l'entrepreneuriat et l'investissement à impact ne sont plus seulement une tendance conjoncturelle ou de l'impact washing, mais une vraie tendance de fond.