[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans ce premier épisode consacré à définir l'investissement à impact, différents entrepreneurs, investisseurs et experts vous ont partagé leur vision. Nous allons, ici, mettre ces contributions en perspective afin de vous offrir des éléments de définition de l'investissement à impact les plus riches et complets possibles. L'investissement à impact, c'est la rencontre entre des entrepreneurs engagés d'une part, et des investisseurs en recherche de projets engagés d'autre part. Marie-Geneviève Loys Carreiras, responsable des investissements solidaires de BNP Paribas Asset Management, précise que ces acteurs s'allient et collaborent en alignant leur vision de l'impact et unissent leurs forces pour appliquer les principes d'intentionnalité et de mesurabilité propres à l'investissement à impact, à toutes les étapes du projet. Pour mieux comprendre l'investissement à impact, commençons tout d'abord avec les caractéristiques de l'entrepreneur à impact, qu'évoquent nos témoins comme l'expliquent Ariane Delmas et Emmanuelle Touilloux, qui sont, respectivement, fondatrices des entreprises sociales Les Marmites Volantes et Marguerite, un entrepreneur à impact se caractérise par la recherche constante d'un impact maximum : c'est cela qui le motive au quotidien dans ses décisions. Il ou elle a aussi le souci constant de générer des effets positifs pour toutes les parties prenantes, que ce soit les clients, les fournisseurs, les salariés, le management, la société en général, ou bien encore, l'environnement. Les entrepreneurs à impact mettent au cœur de leur modèle économique leurs engagements quotidiens, qui sont en fait la raison d'être de leurs entreprises. Ceux-ci peuvent relever du secteur social, de l'environnement, ou des deux. Citons, par exemple, l'inclusion sociale, l'accès à l'éducation, la lutte contre le gaspillage alimentaire, ou bien encore, la consommation responsable. Poursuivons avec le deuxième point évoqué par nos témoins qui illustre le fait que les entrepreneurs à impact interagissent avec des investisseurs à impact : ces deux acteurs clés sont complémentaires et nécessaires à la création d'un écosystème de l'impact. Samia Mouline, experte de la finance à impact à la Banque mondiale, qui est basée à Casablanca, et Nicolas Cellier, qui est co-fondateur et partner chez Ring Capital, s'accordent sur ce qui distingue un investisseur à impact d'un investisseur traditionnel, et qui en fait ainsi un interlocuteur capable de répondre aux besoins spécifiques de l'entrepreneur à impact, sa démarche. En effet, l'investisseur à impact finance des entreprises dont l'impact généré n'est pas le résultat du hasard, fut-il heureux, mais qui est au contraire recherché, voulu et souhaité ; on parlera d'intentionnalité, parce qu'il est intégré dans le modèle économique et constitue la raison d'être de l'entreprise. Antoine Michel, partenaire chez Investir&+, précise que l'investisseur à impact a d'emblée en tête les caractéristiques des bénéficiaires ciblés et les résultats attendus. En plus d'être intentionnel, cet impact doit être additionnel, c'est-à -dire qu'il doit apporter quelque chose de nouveau, donc qui n'existait pas auparavant et qui n'existerait pas si l'entreprise n'avait pas vu le jour. L'investisseur à impact va, dans ce sens, apporter une forte contribution, aussi bien financière qu'extra-financière. Enfin, Samia Mouline insiste sur le fait que cet impact doit être évalué selon un processus spécifique, pour pouvoir suivre rigoureusement l'évolution du projet et apporter des mesures correctives si besoin. Elle suggère aussi de rémunérer les gestionnaires du fonds également, sur la base de leur performance en terme d'impact. Mesurer, évaluer l'impact, est crucial, car cette évalutation permet de rendre la recherche d'impact plus tangible et concrète, et de la mettre au même rang que la performance financière. Nicolas Cellier, Antoine Michel et Marie-Geneviève Loys Carreiras nous affirment que, contrairement à un investisseur classique, un investisseur à impact peut accepter des rémunérations plus faibles en contrepartie d'un retour extra-financier. Samia Mouline précise que, pour les investisseurs à impact, un peu plus averses au risque, des mécanismes de partage du risque existent pour dérisquer, selon le vocabulaire employé dans la finance, les entreprises à impact et rééquilibrer le couple rendement-risque, et ainsi gagner plus facilement la confiance des investisseurs. Enfin, venons-en au troisième et dernier point abordé par nos témoins : comment situer l'investissement à impact par rapport aux autres modes de financement responsable? L'investissement à impact se distingue de l'investissement classique par ses caractéristiques et par le profil de ses acteurs, nous l'avons vu. Samia Mouline nous rappelle qu'il convient de préciser que l'investissement à impact se distingue également de l'investissement socialement responsable, l'ISR, qui consiste à respecter des critères ESG, environnement, social, gouvernance, par sa démarche beaucoup plus proactive. L'investissement à impact ne se contente pas seulement de respecter des critères prédéfinis et des principes, mais il cherche à créer de la valeur ajoutée en se fixant des objectifs d'impact ambitieux, avec des critères permettant de mesurer si ces objectifs ont été atteints, et en s'évertuant à les réaliser, à les maximiser, et à les pérenniser. Ainsi, entrepreneurs et investisseurs fonctionnent de concert et en interaction permanente dans l'écosystème de l'investissement à impact. Ils s'alignent sur la recherche de maximisation de l'impact, et pour que leur collaboration se réalise dans les meilleures conditions possibles, il faut aussi casser les préjugés qu'ils ont les uns envers les autres. Nicolas Cellier tient à dépasser les fausses croyances de certains investisseurs qui peuvent penser qu'impact est synonyme de décroissance, ou de croissance lente, et par conséquent, d'un modèle économique peu robuste, alors qu'au contraire, l'impact est voué à croître, car la croissance engendre les moyens financiers, et ces mêmes moyens financiers peuvent être réalloués à la recherche et à la réalisation de l'impact. D'après lui, plus qu'antinomiques, impact et croissance doivent former un cercle vertueux dans lequel la croissance vise à générer de l'impact, et l'impact permet la croissance. Mais Ariane Delmas nous rappelle avec justesse que les entrepreneurs peuvent se montrer réticents à croître trop rapidement, car ils ont avant tout la volonté de préserver leur impact et veulent et être sûrs de maintenir cet impact même en grandissant : la croissance doit s'aligner sur les moyens disponibles et envisageables pour développer et déployer l'impact. Croissance économique et puissance de l'impact, voilà le couple vers lequel tendent les entrepreneurs et les investisseurs, et cela peut se faire avec l'aide des institutions internationales et de l'État. [AUDIO_VIDE]