[MUSIQUE] [MUSIQUE] Comme nous l'avons vu depuis le début de ce MOOC, et comme le rappellent Jérôme Schatzman ou encore Emmanuel de Lutzel, nous sommes sans aucun doute à un moment clé où de nombreux acteurs, des particuliers fortunés, des grandes banques, des soiétés de gestion, des investisseurs, s'intéressent à l'entreprenariat social et à l'impact investing, comme formidables opportunités d'innovation et d'avenir, mais aussi de création de nouveaux modèles économiques équilibrés au service de la société. Si nous regardons de plus près l'évolution de cette tendance de l'impact investing sur la scène mondiale, les pays anglo-saxons ont été pionniers pour initier des écosystèmes favorables au développement de cette finance mise au service de l'innovation sociale. Anne-Claire Page, directrice générale de la grande école ESSEC, et fondatrice de la chaire philanthropie, explique cela notamment pas la plus grande porosité entre les sphères économiques et sociales ainsi que des convictions fortes partagées que le capitalisme peut servir le progrès social, en Angleterre et aux Etats-Unis. Ainsi, depuis maintenant près de 7 ou 8 ans, des acteurs clés de la sphère publique et privée se sont emparés de l'opportunité offerte par l'impact investing comme levier majeur pour catalyser le changement d'échelle des réponses novatrices aux enjeux sociaux fondamentaux et ont créé des institutions telles que Social Finance UK, véritable accélérateur de construction d'un écosystème florissant au Royaume-Uni. Au delà, ils ont eu à cœur de diffuser ces pratiques et d'accroître le développement de ces marchés à l'étranger, en témoigne la démarche lancée par Sir Ronald Cohen, fondateur du capital risque en Angleterre, qui dans le cadre du G8 en juin 2013 à Londres, a lancé une démarche internationale de collaboration et de construction autour de ce sujet dans chaque pays. Hugues Sibille que vous avez entendu y a pris part pour la France. Nous vous proposons ainsi de faire le point à partir des témoignages entendus, sur tout d'abord les atouts clés de l'écosystème de l'impact investing en France, et ensuite les enjeux les nouvelles frontières de notre écosystème de développement de l'innovation sociale et de l'impact investing en France. Alors tout d'abord, les atouts de notre écosystème. A travers le rapport du comité impact investing France dont Hugues Sibille nous livre les conclusions clés, ainsi que les témoignages de nos intervenants, nous pouvons noter les points forts de notre écosystème en la matière. Avant tout, Anne-Claire Page et François Debiesse nous rappellent combien aujourd'hui nous possédons en France des exemples entreprises sociales qui font la preuve à grande échelle qu'il est possible de combiner une action économique tout en ayant un impact social fort. Ces entreprises aux projets matures, contribuent largement au changement des regards permettant à chacun d'entrevoir de plus en plus la possibilité d'envisager des organisations hybrides mêlant business et social. Dans ce sillon, nous soulignerons la constitution récente d'un cadre législatif européen et français, dont la vocation est notamment de contribuer au développement de l'impact investing. Emmanuel de Lutzel souligne à nouveau la reconnaissance de l'entreprenariat social dans la stratégie de croissance et d'innovation de l'Union Européenne sous l'impulsion en 2011 du commissaire Michel Barnier. Nous en avions parlé dans le module précédent. En France, nos interlocuteurs soulignent aussi la forte volonté politique à l'œuvre pour structurer et catalyser le développement de l'ESS et de l'impact investing. A travers la création d'un ministère de l'ESS, porté par Benoît Hamon de mai 2012 à avril 2014, qui aura aboutit à la loi de juillet 2014 sur l'ESS dont François Debiesse souligne le rôle moteur qu'elle a joué pour mettre un coup de projecteur sur ces initiatives pleinement dans l'économie, et les faire connaître à tous. Olivier de Guerre remarque aussi combien cette loi, pour la première fois, définit institutionnellement le périmètre de l'ESS afin de permettre demain à tous les acteurs, chefs d'entreprise, épargnants, collaborateurs, investisseurs, de mieux connaître et identifier ces entreprises avec une définition élargie et rassembleuse, permettant d'englober à la fois les organisations statutairement dans l'ESS, mais aussi les entreprises avec une mission sociale. Par contre il pointe du doigt la possible complexité d'obtention par les entrepreneurs du statut d'ESUS, par la rigidification induite par une liste de critères complexes à analyser. Du côté de la finance solidaire et de l'impact investing, la France est singulière par la création d'une dynamique pionnière portée par Finansol, collectif initié dès 1995, présenté par Sophie Des Mazery. Sans aucun doute Finansol aura permis par son action de créer du lien entre les financeurs et leur permettre de mieux se connaître, comme le souligne Emmanuel de Lutzel, sécuriser l'engagement des citoyens dans la finance solidaire et l'impact investing, par la création d'un label dédié, gage de visibilité et de transparence, et faire connaître au grand public les moyens d'épargner avec du sens les trois canaux suivants : sa banque, son entreprise, ou même en étant directement actionnaire d'une entreprise sociale. Les chiffres publiés soulignent le dynamisme de cette tendance avec une augmentation des encours de 20 % chaque année Même si cette finance solidaire ne représente que 0,16 % du patrimoine des français, l'ambition est d'aller plus loin avec l'objectif d'atteindre 1 %. Pour cela, Finansol souhaite continuer à influencer les acteurs pour que chaque produit d'épargne pour les particuliers trouve sa déclinaison dans un produit solidaire, et que les livrets réglementés puissent aussi être au service de l'impact investing, livret A, livret de développement durable. Au delà, l'enjeu est de convaincre toujours plus d'investisseurs institutionnels de s'engager dans fonds d'impact investing, comme AXA par exemple, cité dans le module précédent. En matière épargne, chacun souligne le rôle essentiel joué par l'innovation remarquable des fonds dits 90/10 en France, favorisé par la loi de 2001 et la loi de 2008 qui contribuent fortement à nourrir les fonds alloués à l'impact investing. Ainsi 80 % des épargnants solidaires le sont d'abord en tant que salarié. Au delà de l'augmentation des capitaux dédiés à l'impact social dans les circuits financiers, on constate une augmentation des acteurs engagés sur ce champ comme le prouve le module précédent présentant les différentes organisations financières constituant cet écosystème large. Enfin, pour finir, Anne-Claire Pache souligne un point fort majeur dans notre écosystème, la professionnalisation à l'oeuvre à la fois dans les entreprises sociales et au sein des fonds d'impact investing, avec des collaborateurs capables de parler de plus en plus les deux langues complexes nécessaires à l'hybridité de ces modèles. A savoir, celle du monde de la solidarité, et celle de l'économie et ses règles. Ces organisations sont ainsi de plus en plus rejointes par de jeunes diplômés compétents et militants grâce notamment à des formations telle que la chaire entreprenariale de l'ESSEC dont nous avons parlé, qui a été pionnière en la matière, et dont plus de 200 anciens jeunes peuplent les directions des plus importantes organisations de ce champ aujourd'hui. [AUDIO_VIDE]