[MUSIQUE] [MUSIQUE] Alors quand on regarde la philanthropie un peu partout dans le monde, dans le sud on voit une géographie qui est une géographie assez diverse, avec des pays où la philanthropie est inscrite dans les gènes, j'ai envie de dire, depuis des lustres, l'Inde par exemple, qui est un pays où la philanthropie existe depuis toujours pratiquement, et en même temps dans des proportions dont on peut considérer qu'elles sont peu importantes, par rapport à des besoins qui eux, sont colossaux. Et puis des pays où cette philanthropie, par tradition, dans l'histoire, était très peu présente. J'évoquais tout à l'heure la Chine. En Chine, la redistribution se faisait de façon différente, dans des cercles disons, familiaux, mais la notion de philanthropie elle-même était peu présente, jusqu'à une époque très récente. En Afrique c'était pareil. Pas l'Afrique du nord hein, en Afrique du nord on a une culture de solidarité, au Maroc, en Tunisie, qui est visible depuis très longtemps, mais dans l'Afrique noire, la redistribution prenait également des formes différentes. En Amérique latine, jusqu'à une époque récente il y a eu encore très peu de grandes fortunes. En revanche, les choses ont beaucoup changé dans une époque récente. Le paysage global a énormément évolué au cours des disons dix dernières années, avec l'émergence, partout dans le monde, sur toutes ces grandes zones du Sud, que ce soit l'Asie, l'Afrique ou l'Amérique latine, avec l'émergence de fortunes qui sont parfois des fortunes colossales, et pratiquement toutes se sont orientées immédiatement vers la philanthropie et vers la nécessité d'engagement personnel. En Chine par exemple, les jeunes entrepreneurs qui ont fait fortune, je pense par exemple à Jack Ma, le créateur de alibaba.com, qui a fait une fortune colossale avec sa boîte, eh bien il a inscrit dans les contrats de travail, la nécessité pour ses collaborateurs, de s'engager, sous des formes qui peuvent être variées, ça peut être des formes financières, des formes d'engagement type mécénat ou bénévolat de compétences, mais chacun des collaborateurs de ce groupe est redevable d'un engagement sociétal dont il doit rendre compte à l'entreprise. Et les gens signent, c'est d'ailleurs une chose que je trouve très frappante dans l'évolution dans nos sociétés, je pense que la jeune génération est extrêmement sensible à ces questions-là, à cette nécessité, à côté de son engagement personnel pour gagner sa vie, pour faire carrière, d'un engagement social ou sociétal qui permettra de mettre un sens complémentaire à sa vie professionnelle, ou même à sa vie tout court. Aujourd'hui, quand on regarde ce paysage philanthropique mondial, on voit que le gap énorme qu'il pouvait y avoir entre le nord et le sud, est en train de se combler très rapidement. Je pense que les fortunes émergentes seront de plus en plus nombreuses dans le sud, et c'est bien, et c'est bien. C'est d'autant mieux que ces nouveaux riches sont extrêmement soucieux de s'impliquer très fortement dans la vie autour d'eux. Je peux vous citer un autre exemple. En Amérique latine, le nom de Vivianne Senna vous dit probablement quelque chose, c'est soeur du grand champion automobile Ayrton Senna, qui s'est tué il y a maintenant une vingtaine d'années, et après la mort d'Ayrton Senna, ils étaient en train de travailler tous les deux à la création d'une fondation, elle l'a créée toute seule, elle a mis beaucoup, beaucoup d'argent dans cette fondation, qui fait un travail magnifique évidemment orienté vers les enfants déshérités, vers les favelas des grandes villes brésiliennes, voilà c'est un magnifique exemple. Il y a aussi quelques très beaux exemples dans ce même Brésil, de grands footballeurs extrêmement célèbres qui aujourd'hui, sont dans des engagements sociaux extrêmement importants, dans lesquels ils consacrent à la fois leur fortune et une grande partie de leur temps. Donc cela montre bien que, au fur et à mesure que ces pays changent, ceux qui ont eu la chance ou le talent de pouvoir y faire fortune, sont prêts à consacrer leur argent et leur temps et leurs compétences, à faire bouger un petit peu les limites. Il y a une tradition de répartition, en Afrique, qui se produit selon ses normes, selon son organisation, parfois avec ses faiblesses, et je pense que ces faiblesses, elles sont bien prises en compte aujourd'hui. Il y a des fortunes africaines très importantes qui ont émergé, et ces fortunes africaines, d'emblée, elles ont pris en compte cette nécessité sociale d'engagement. Alors, il y a des pays qui sont aujourd'hui déjà très visibles, notamment au Maroc par exemple, on voit que la philanthropie est extrêmement présente, mais en Afrique noire, il y a également de très grands engagements philanthropiques, à tous les niveaux et avec des volontés de faire bouger la société, qui peuvent être extrêmement intéressantes. Je citerai un exemple. Ibrahim Mo, qui est un soudanais d'origine vivant à Londres maintenant, qui a fait fortune dans les télécom, une très grosse fortune, qui a créé une fondation il y a maintenant une dizaine d'années dans laquelle il a mis beaucoup d'argent, fondation dont l'objectif est véritablement sociétale et même politique, puisque l'objectif est d'améliorer la gouvernance, dans les pays d'Afrique subsaharienne. Cette fondation cherche à récompenser des chefs d'État africains de l'Afrique subsaharienne qui ont quitté leur poste en étant blanchis de tout risque de corruption. La récompense que donne cette fondation, c'est de salarier à vie et pour des sommes très significatives, ces chefs d'État intègres en question. Ce qui est intéressant, c'est de voir qu'il y a des années où la fondation n'arrive pas à délivrer son prix. Et donc ces années-là, elle donne le montant équivalent d'argent à des bourses, en prenant le problème à l'envers et en disant, si on n'arrive pas à trouver, à un instant T, une personne à récompenser, on va travailler à l'amélioration globale de la gouvernance et on va travailler à créer des générations de gens qui seront capables de s'abstraire de tout risque de corruption et donc, amélioreront globalement la gouvernance. En ce qui concerne le Moyen-Orient et l'Afrique, les chiffres, je le disais tout à l'heure, ne sont pas totalement fiables, dans la mesure où il y a à prendre en compte ces critères qui sont liés à des aspects religieux. La progression de cette zone, Moyen-Orient et Afrique, est significative également, de l'ordre de 5 %. On est donc encore en retrait par rapport à ce qui existe dans les autres zones du monde, en partie pour les raisons que j'évoquais, donc, ce gap ne se comblera pas, puisqu'il restera de toute façon cet aspect-là, mais en revanche, ce qui est certain, c'est que non seulement au Moyen-Orient où c'est extrêmement visible, mais en Afrique également, que ce soir l'Afrique maghrébine ou l'Afrique noire, on voit une progression très significative, qui est liée au fait qu'il y a des fortunes émergentes en Afrique, il y a des pays comme l'Afrique du Sud par exemple, où c'est extrêmement visible. Même au Nigeria, on commence à voir apparaître des grands noms de philanthropes, de vrais grands noms de philanthropes et donc, une progression très significative et un mouvement qui est, finalement, de même nature que ce que l'on a vu partout ailleurs, c'est-à-dire à l'émergence d'une nouvelle richesse, correspond l'émergence d'une philanthropie avec une volonté d'engagement et une volonté de faire bouger les choses au niveau de la société. [AUDIO_VIDE]