[MUSIQUE] [MUSIQUE] Marguerite, sur les premières années de son activité, a été financée essentiellement par du prêt. Ça s'est fait avec le concours de France Active, qui est un investisseur, un réseau d'investisseurs solidaires, puis à chaque fois, ça a été couplé avec l'intervention de banques. Donc dans un premier temps, ça a été couplé avec un financement de la Nef, qui est une banque qui investit dans des projets à impact social, puis les deux fois suivantes, on a été financés par la BNP, qui n'est pas un investisseur à impact en soi, mais qui est aussi intéressée par les questions d'entrepreneuriat social et qui a choisi de nous financer parce qu'il y avait eu l'aval de France Active et aussi parce que le projet économique tenait la route. Plus récemment, en 2021, on s'est lancés dans une démarche de levée de fonds, donc on est rentrés en contact avec des fonds à impact social, avec lesquels on est en train d'échanger actuellement. [MUSIQUE] Ce qui différencie les investisseurs type France Active des investisseurs classiques, c'est, d'une part, l'accompagnement qui peut être apporté, c'est-à-dire que quand on se présente auprès de France Active avec un projet de financement, il n'y a pas un examen tel quel du projet du business plan, et c'est pas oui ou non : on va creuser ensemble le business, l'améliorer, réfléchir au besoin de financement, par quels moyens on peut y répondre, etc. Donc il y a vraiment tout une phase d'accompagnement en amont où, finalement, l'investisseur est également le partenaire de l'entreprise. Cela implique aussi que les investisseurs à impact connaissent l'économie sociale et solidaire, donc sont au fait des modèles économiques complexes qui sont partagés entre du chiffre d'affaires, de la subvention, qui sont sur, peut-être, des ratios un petit peu différents de la moyenne. Donc eux sont capables de vraiment comprendre ces business models, et aussi, après, de les expliquer à des financeurs classiques, puisque nous, on a été financés trois fois par France Active, à chaque fois ça a fonctionné de la même manière : France Active a instruit le dossier, validé le financement, et ensuite, on s'est rapprochés d'un financeur classique, dans notre cas c'était la BNP, qui, en fait, suite à l'instruction et à la validation de France Active, a finalement, aussi, débloqué un prêt de manière quasi automatique. Donc il y a un vrai effet de levier qui est apporté par ces investisseurs sociaux qui, du coup, permet de démultiplier l'action de financement. Ce qui les différencie, aussi, évidemment, c'est qu'ils poursuivent, d'un point de vue économique, évidemment, ils cherchent à ce que la structure soit rentable pour pouvoir se développer, pour aviser à une certaine pérennité, mais ils ne vont pas forcément rechercher le même niveau de rentabilité. Nous, à titre d'exemple, les sept premières années, on a été financés alors qu'on arrivait juste à l'équilibre. On dégageait un excédent de quelques milliers d'euros par an, et pour autant ils nous ont accompagnés, ils nous ont suivis, tout en nous conseillant aussi, en nous alertant sur cette faible rentabilité, en nous amenant à réaliser que c'était un point qu'il fallait travailler, améliorer, pour la suite. Donc je dirais, au niveau économique, pas tout à fait les mêmes critères d'évaluation de la rentabilité attendue de l'entreprise, puis évidemment, des critères d'impact social qui sont réellement pris en compte, tant au niveau de l'instruction, où le projet social de l'entreprise va être décortiqué, évalué, etc., et puis aussi au niveau du suivi. Nous, tous les ans, on doit envoyer à France Active à la fois notre bilan, et puis à la fois le compte-rendu du nombre d'emplois créés, du nombre d'emplois sauvegardés, du taux de sortie, de retour vers l'emploi, des salariés. Donc ils sont vraiment sur ce double impact économique et social, ce qui les différencie grandement des investisseurs classiques. [MUSIQUE] Déjà, je dirais que la première difficulté, c'est un petit peu de comprendre le panorama de l'investissement de l'économie sociale et solidaire, parce qu'il y a beaucoup d'acteurs, beaucoup de choses, c'est pas toujours simple de s'y retrouver. Déjà, je le répète, mais France Active a vraiment été un super partenaire parce qu'ils aident, justement, à comprendre un petit peu le fonctionnement du financement de l'économie sociale et solidaire, et puis en 2020 on a participé à un accélérateur, Antropia, qui est porté par l'ESSEC et qui nous a aussi aidés à bien identifier les financeurs, à repérer, notamment, les différents fonds à impact, leurs spécificités, les montants qu'ils sont prêts à investir, montants minimaux, maximaux, les tickets moyens, savoir aussi quels types de projets ils cherchent à financer, certains sont plus axés sur le développement environnemental, d'autres beaucoup plus sur des impacts sociaux. Je dirais qu'en fait, on a gagné beaucoup de temps à avoir un partenaire qui a été capable de nous dresser la liste plutôt que d'aller nous-mêmes fouiller sur internet pour récupérer l'information. Donc ça, ça a été, je trouve, la première difficulté, de se repérer un petit peu dans le secteur, puis moi, la difficulté que je ressens toujours un petit peu, c'est de savoir quelle version de notre projet on présente : est-ce qu'on présente la version optimiste, qui fait rêver mais qui finalement est une version optimiste, ou est-ce qu'on présente une version pessimiste, en se disant que, du coup, il n'y aura pas de mauvaise surprise, qu'il n'y aura pas de décalage de discours entre ce qu'on a présenté en amont et ce qui se passe après. Je pense qu'il y a différentes personnalités d'entrepreneurs, moi j'ai toujours été plutôt prudente, j'ai jamais été très à l'aise dans le fait de vendre du rêve, d'avoir un BP trop optimiste, et je suis à l'aise avec ça, parce que, du coup, il y a un discours de confiance qui s'est mis en place avec les partenaires, qui savent que, ce que je leur dis, c'est vrai. Par contre, il faut aussi faire attention à, parfois, pas, peut-être, se mettre des limites soi-même, en étant trop prudent. Donc ça, moi, c'est un problème que j'ai ressenti depuis le démarrage, et avec lequel je continue de composer. Donc souvent je change, j'ai une version puis je me dis non, finalement c'est trop prudent, ou là j'ai peut-être été un peu trop optimiste. Ça, je pense que les investisseurs le perçoivent aussi dans les échanges qu'on a avec eux, et eux arrivent à, aussi, analyser quel est le type d'entrepreneur qu'ils ont en face, puis évidemment il y a aussi l'historique de la structure et ses comptes, qui en disent long sur la manière de gérer les résultats. [MUSIQUE] Si j'avais un conseil à donner à un jeune entrepreneur, c'est vraiment de s'entourer, de se faire accompagner : quand on est entrepreneur, on est toujours le nez dans le guidon, on voit les choses avec son quotidien, avec ses urgences, avec ses contraintes, et c'est vraiment utile, je dirais même indispensable, de s'entourer. Je le vois à deux niveaux en fait : à la fois un encadrement un peu technique, je dirais, qui peut passer par des incubateurs, des accélérateurs, où on est mis en lien avec des experts qui peuvent nous faire un petit peu d'apports théoriques. Puis aussi, je dirais, s'entourer dans son réseau, s'inscrire à des réseaux d'entrepreneurs, donc anciennement le Mouves, qui est devenu France Impact, qui permet de rencontrer d'autres entrepreneurs qui sont passés par les mêmes situations que nous. C'est vraiment précieux de savoir comment, eux, ont répondu à telles difficultés et comment ils ont réagi à telles situations, et puis surtout, ça permet aussi de tenir dans la durée, parce que l'entrepreneuriat c'est un marathon et pas un sprint, et pour ça, il faut aussi, je pense, avoir des soutiens et ne surtout pas s'isoler. Donc vraiment, je conseillerais aux jeunes entrepreneurs de s'entourer. [MUSIQUE] Au cours de ce parcours de financement, moi, j'ai toujours été surprise par la bienveillance des investisseurs à impact, et aussi, je me souviens qu'à l'époque, j'avais un petit peu tendance à me mettre des barrières toute seule face à mon âge, puisque j'étais assez jeune, j'ai entrepris à la sortie de mon école de commerce. J'avais peur que ce soit un frein, et en fait non, justement, les investisseurs à impact vont creuser le projet. Alors évidemment, la formation joue, je pense qu'avoir le tampon ESSEC a beaucoup aidé, mais en tous cas, il n'y a pas de préjugé à ce niveau-là, ils donnent leur chance à quelqu'un qui entreprend pour la première fois. Moi, j'ai été très agréablement surprise par ça. [MUSIQUE] La connaissance des souscripteurs des financeurs, elle me paraît intéressante pour comprendre un petit peu les enjeux du financeur et puis ses attentes. Après, j'ai quand même le sentiment que c'est un critère parmi d'autres, et que, finalement, pour moi, la relation qu'on peut créer avec le financeur, elle est beaucoup plus importante que les souscripteurs en eux-mêmes, puisque le lien se fait avec le financeur, avec les interlocuteurs financeurs. Donc pour moi, c'est plus l'équipe de gestion qui me paraît importante que les souscripteurs. [MUSIQUE]