[MUSIQUE] [MUSIQUE] Comme on l'a vu dans les trois premiers modules de ce MOOC, l'impact investing est né et s'est structuré dans les pays du Nord. Toutefois, c'est dans les pays émergents, et en développement, qu'il trouve aujourd'hui son terrain d'application privilégié. Le rapport annuel conjoint du GIIN, Global Impact Investing Network, et de la banque américaine JP Morgan, sur les tendances de l'investissement à impact, indique qu'en 2014, sur 125 fonds d'impact identifiés, pour un total d'investissements de 10,6 milliards de dollars, 14 % ont leur siège dans des pays émergents alors que 56 % y a la majorité de ses Assets Under Management, AUM. Au total, c'est donc 70 % des AUM des fonds d'impact investing qui sont situés dans les pays émergents. Mon propos s'articulera autour de deux grands axes. Un, le constat des difficultés des entrepreneurs que les acteurs traditionnels peinent à résoudre, puis, et ce sera le deuxième axe, l'intervention de nouveaux acteurs, ceux précisément de l'impact investing, qui viennent compléter et suppléer, sans les remplacer, ces acteurs traditionnels à la peine. Commençons par ce constat assez unanimement partagé. Les entrepreneurs des pays en développement font face à des problématiques spécifiques que les acteurs traditionnels peinent à résoudre. On peut identifier trois grands phénomènes qui illustrent cette situation paradoxale car l'engagement des acteurs traditionnels ne faiblit pas en quantité. Tout d'abord, premier élément de constat, c'est un terrain d'action difficile pour les entrepreneurs locaux, sociaux ou non d'ailleurs. Vous l'aurez compris, et pour beaucoup vous le savez, il est souvent bien difficile pour un entrepreneur social français de trouver des partenaires pour l'accompagner, dans son projet, et surtout pour financer son activité. Étant données les conditions macro et micro-économiques de nombreux pays en développement, la situation des entrepreneurs du changement dans ces pays n'est pas meilleure, comme vous pouvez l'imaginer. Parmi les obstacles classiques au développement de l'entreprenariat social sur ces territoires, on compte les obstacles suivants : un, une économie de marché qui ne va pas toujours de soi, avec notamment une difficulté à appliquer les contrats, une corruption malheureusement toujours présente, et un droit de la concurrence pas forcément respecté. Deux, la difficulté d'accès aux financements locaux qui s'explique par la sous bancarisation chronique de certaines régions, notamment en Afrique sub-saharienne. Ainsi, de nombreuses personnes sont engagées dans des activités informelles. Elles ne sont souvent pas bancarisées, et présentent, aux yeux des agences bancaires locales, un risque trop élevé, il est donc impossible pour elles de lever des fonds, même dans le cadre d'emprunts. Troisièmement, le faible accès pour les entrepreneurs sociaux aux financeurs internationaux classiques qui restent frileux pour financer des projets entrepreneuriaux, dans un contexte qui se caractérise par l'absence d'historique de crédit sur les populations qui veulent emprunter, la volatilité élevée des monnaies locales, l'instabilité politique et sociale chronique et le caractère early stage des projets qui ne correspond pas à leur ratio de risques. Cette déconnexion entre les financeurs et les entrepreneurs se trouve aggravée par l'absence d'intermédiaires et l'absence de systèmes d'information performants qui constituent donc les acteurs et outils indispensables pour créer un lien entre les entrepreneurs et les financiers. Quatrième élément, l'isolement des porteurs qui est dû, notamment, à un manque criant des structures d'accompagnement et de mise en réseau des entrepreneurs. Cinquième élément, un manque d'action politique pour favoriser la création d'entreprise de façon générale. Ainsi, dans de trop nombreux pays du Sud, il serait très nécessaire d'engager des actions de simplification des démarches administratives et de procéder à un allègement de la fiscalité. Sixième et dernier point, un manque d'action politique pour encourager l'appropriation des défis du développement par les populations locales, via des programmes éducatifs, et en lien un manque de ressources humaines formées pour se joindre aux projets existants. Pour toutes ces raisons, le développement de projets entrepreneuriaux, et a fortiori de projets d'entreprenariat social, dans les pays en développement, est lent et difficile. C'est un potentiel gâché pour des populations jeunes, 60 % des habitants de l'Afrique de l'Ouest ont moins de 25 ans qui arrivent en grand nombre sur un marché du travail qui n'est pas en capacité de les accueillir. Ces 11 millions de jeunes Africains arrivant chaque année sur le marché du travail sont loin de manquer d'idées et de dynamisme et pourraient se réaliser dans l'entreprenariat.