[MUSIQUE] [MUSIQUE] Nous avons vu les acteurs et les outils et méthodes à leur disposition. Intéressons-nous à présent aux étapes qui peuvent baliser cette phase d'immersion. En effet, si l'objectif de cette phase est de recueillir le plus de ressenti et de réactions possible, sans les orienter, elle doit être organisée de façon méthodique. Les témoignages nous montrent la diversité des protocoles qui sont mis en œuvre. Le nombre de sites visités, le nombre et le types d'acteurs rencontrés, les méthodes retenues pour chaque type d'acteur sont à chaque fois différentes. Deux éléments communs néanmoins ressortent de façon forte. Premier élément, la phase d'immersion commence par un temps de présentation au cours duquel la démarche est expliquée, explicitée aux acteurs. Ainsi en Loire-Atlantique, où l'immersion dans le collège test a débuté par une rencontre avec la documentaliste ou bien encore dans le Val-d'Oise, où une réunion d'information avec les professionnels d'accompagnement des bénéficiaires du RSA a débouché sur l'identification d'agents volontaires pour se prêter à la démarche. Le deuxième point commun à l'ensemble de ces protocoles c'est un temps de restitution qui est organisé à la fin de la phase d'immersion pour provoquer la discussion, vérifier si oui ou non l'analyse qui a été faite suscite l'adhésion et encourager les acteurs à définir eux-mêmes les enjeux du problème auquel ils sont confrontés. En Loire-Atlantique, documentalistes, professeurs, élèves, direction ont ainsi eu une réunion de partage autour du diagnostic de fin d'immersion. Brigitte Daniel, responsable médico-social et social sur le territoire d'Eaubonne, qui est une des circonscriptions de l'Action sociale du Val d'Oise, explique comment s'est conclue la phase d'immersion du projet RSA du département du Val d'Oise. L'équipe pluridisciplinaire a organisé le partage via un système de cartes dites réaction. Ces cartes restituaient les verbatims collectés auprès des différents acteurs et permettaient de recueillir les réactions des parties prenantes face aux idées exprimées. Barbara Bay pour l'hôpital de La Robertsau raconte comment les scénarii dessinés par les designers, des petites histoires très visuelles qui décrivaient ce qui est observé, comment ces scénarii ont permis de créer de l'interaction entre les professionnels, les patients et leurs familles d'une part, et de se mettre d'accord sur un diagnostic partagé lors d'un temps de restitution d'autre part. La dimension visuelle, caractéristique de l'approche design prouve dans cet exemple toute sa puissance. Comme le souligne Jean-Claude Charlet, les administrations publiques sont des systèmes compliqués, souvent illisibles et indigestes, aussi bien pour les usagers que pour les agents de première ligne. En discutant avec l'ensemble des acteurs, en les faisant interagir, les équipes pluridisciplinaires peuvent faire émerger une vision d'ensemble compréhensible pour le plus grand nombre. Et c'est cette vision, certes provisoire et toujours sujette à révision qui forme la base sur laquelle les deux autres étapes du design thinking vont pouvoir se déployer. C'est ce que nous verrons dans les deux épisodes suivants de ce MOOC. Enfin, regardons en conclusion quels sont les enjeux majeurs de cette phase d'immersion. Premier enjeu, susciter l'intérêt des usagers, qu'il peut être parfois difficile de rencontrer sans une dose d'imagination. Souvenez-vous, l'idée de mettre des chaises sur le trottoir pour le projet de la médiathèque de Lezoux qui est une solution ingénieuse pour partir à la rencontre des futurs bénéficiaires de cet équipement. Le deuxième enjeu bien sûr c'est de susciter la mobilisation des équipes administratives et tout d'abord de dépasser leur réticence. C'est ce que Brigitte Daniel souligne de manière très explicite dans son intervention. Ainsi, dans le cadre du projet d'amélioration du service apporté aux bénéficiaires du RSA dans le Val d'Oise, certains collaborateurs ont eu peur que ce projet ne se transforme en évaluation de leur travail voire en chasse aux sorcières. Mais là encore des solutions existent. Le fait d'avoir fondé la participation au projet sur le volontariat, et le respect dans l'équipe des designers a fait preuve, ont permis de régler ce problème rapidement. Il faut aussi souligner l'importance d'associer très tôt les intéressés au processus. Dans ce même projet, on a observé un fort décalage entre les professionnels qui avaient été impliqués dès le début et ceux qui ont rejoint la démarche dans un second temps. Ainsi, et c'est un enjeu connexe, choisir pour cette étape d'immersion une équipe motivée sera un élément clé. C'est ce qui s'est passé dans le cas du projet de nouveau CDI en Loire-Atlantique le collège qui a accueilli l'immersion était très engagé de façon générale et il avait été repéré comme tel ainsi que l'explique Julie De Brito. Enfin Laetitia Monjoin rejoint Brigitte Daniel sur l'enjeu de la posture de l'équipe de designers. Elle souligne que l'équipe de designers a été présente mais pas gênante dans le cadre du projet Bon séjour alors même qu'une semaine par mois, cette équipe était dans les locaux. Le professionalisme, la capacité d'empathie des designers et leur expérience seront donc des points de vigilance particuliers au moment du lancement d'un appel d'offres dans le cadre d'un projet d'innovation. 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