[MUSIQUE] MUSIQUE] Au travers des témoignages de ce module, nous pouvons retirer quelques idées essentielles liées à l'impact investing au Sud. Un, le contexte et les enjeux actuels. Deux, les solutions et innovations en cours. Trois, les perspectives d'avenir du développement de l'impact investing au Sud. Alors tout d'abord, quel est le contexte et quels sont les enjeux au Sud? L'ensemble de nos intervenants soulignent la pertinence du développement de l'impact investing dans les pays du Sud en réponse au double enjeu majeur résumé par Jean-Michel Severino. Un, l'accélération d'une croissance responsable. La plupart des pays pauvres font face à un choc démographique massif qui va nécessiter la création de plus de 850 millions de nouveaux emplois uniquement en Afrique subsaharienne d'ici 2050. L'enjeu est ainsi de faire émerger des générations d'entrepreneurs et d'entreprises riches en emploi et qui agissent dans des termes responsables sur le marché. Aujourd'hui ce secteur est déserté par les investisseurs classiques. C'est donc un sujet d'investissement à impact car cela nécessite de vouloir contribuer expressement à cet objectif. Deuxième enjeu, l'accès aux services essentiels : eau, santé, éducation, énergie, transport. Les acteurs publics ne permettront pas seuls en effet une universalité d'accès à ces services. Il y a donc une place pour la création de business sociaux qui apportent ces services aux populations les plus démunies avec des modèles économiques viables qui proposent des paiements adaptés au niveau de vie des populations. Ainsi comme le rappelle Gonzague de Borde, le social business dont la vocation est de créer des entreprises au Sud capables de répondre efficacement aux enjeux sociaux avec une ingéniosité économique permettant de sortir des logiques d'aide au développement est une voie d'avenir à accélérer par l'impact investing. C'est le cas de soieries du Mékong qui, pour assurer des emplois et un salaire décent à des couturières pauvres des campagnes cambodgiennes, a développé une marque de soieries de luxe commercialisée dans les plus beaux quartiers de la capitale française. Plus largement, l'impact investing a d'ores et déjà permis le financement de projets remarquables et innovants dans des domaines aussi variés que le développement rural, à l'image du fond Moringa, les énergies renouvelables ou encore la microfinance. Pour Guilhem l'entreprenariat social et l'impact investing au Sud sont donc de puissants catalyseurs d'un développement inclusif de ces pays. Pour permettre le plus rapidement possible que la croissance économique à venir soit assimilée à la possibilité d'accéder à un niveau de vie satisfaisant pour un maximum de personnes. Ainsi, rappelle -t-il, l'enjeu serait de permettre à l'Afrique et plus largement aux pays du Sud grâce à l'impact investing, de s'engager directement dans un développement soutenable et ainsi de sauter la face pollueuse que l'on a largement connue au Nord. Le contexte de ces pays du Sud est en effet celui d'une grande vitalité humaine et économique qui offre une chance inouïe à chacun pour agir vers la création de ce modèle équilibré et inclusif. En effet trois facteurs y contribuent. Un, l'économie est dans une phase de croissance très forte, comme le rappelle Guihem, avec une vraie sous capitalisation, appel d'air pour de nombreux capitaux extérieurs. Que ce soit les fonds des salariés d'Engie, des investisseurs institutionnels ou des family offices au sein de Moringa, les canaux d'origine des investissements sont nombreux et reflètent pleinement cet attrait grandissant pour l'investissement dans les pays du Sud. Deux, les jeunes développent de plus en plus une vraie énergie entreprenariale et souhaitent s'engager au service de leur pays. C'est le cas au Maroc, comme le souligne Jean-Michel Lécuyer, ou encore en Asie où Gonzague constate les vocations entreprenariales et le sens du bien commun déployés par de plus en plus de jeunes. Trois, certains pays comme le Maroc ont identifié l'entreprenariat social comme un formidable levier d'amélioration du quotidien et cherchent à investir dans un écosystème qui le développe, souligne Jean-Michel Lecuyer. Alors maintenant posons-nous la question suivante : Quelles sont les innovations actuelles en matière d'impact investing au Sud? Les approches déployées par nos intervenants témoignent d'innovations remarquables. Il en est ainsi de l'engagement d'une grande entreprise sociale française tel que le groupe SOS qui décide de faire bénéficier à d'autres territoires dans le monde et notamment dans les pays en développement de ses savoir-faire en matière de soutien et de développement d'entreprise sociale. L'ingéniosité de mobiliser des jeunes en service civique pour explorer les écosystèmes propres à chaque pays : Maroc, Tunisie, Afrique du Sud, et la création de partenariats avec des acteurs clés locaux est à souligner. Dans un second temps le déploiement d'incubateurs locaux, de fonds locaux ou encore la mobilisation de compétences liées aux différents secteurs d'activité du groupe : insertion sanitaire et sociale, événementielle, est ainsi envisagée de façon adaptée et pertinente au regard de chaque contexte. Alors ensuite l'innovation en matière de co-création et d'impact collectif suscité par un fonds tel que Moringa porté par Rothschild qui est elle aussi remarquable en ce sens qu'elle fait activement travailler ensemble des ONG de développement agissant au service de ces régions agricoles, des petits paysans locaux qui sont ainsi formés, accompagnés et financés par des grandes multinationales capables d'apporter les marchés nécessaires au développement commercial de ces pratiques d'agroforesterie grâce à des financements de taille, cinq millions d'euros en moyenne, dans une logique de financement à long terme, l'approche permet de générer des initiatives de développement agricole équilibrées, porteuses de développement à grande échelle pour ces territoires ruraux du Sud. Autre innovation, le développement du rôle essentiel de tiers de confiance et d'intermédiaires sur le marché entre investisseurs et entrepreneurs sociaux. Et là aussi, nouveau, à l'image des initiatives portées par Paul Herman ou encore Thomas Venon. Enfin, l'approche d'une grande entreprise telle qu'Engie qui a créé un fonds d'investissement dédié aux projets socialement innovants dans son champ d'activités au sud est particulièrement novatrice. Avec l'initiative rassembleur d'énergie, le groupe apporte un soutien technique et financier à des projets d'entrepreneurs sociaux contribuant à l'accès à l'énergie durable des populations vulnérables dans le monde entier en mobilisant de l'argent du groupe et des salariés. Engie développe ainsi des innovations financières pour être toujours au plus près du besoin des entrepreneurs. Par exemple avec le demand dividend une dette dont le remboursement peut se faire au fil de l'eau des résultats de l'entreprise. Une innovation dans l'accompagnement, les salariés accompagnent les entrepreneurs dans la durée, sur le terrain dans les pays d'implantation d'Engie. Alors pour finir, posons-nous la question : quel est l'avenir de l'impact investing au Sud? Face à ces opportunités, ces promesses offertes par l'entreprenariat social et l'impact investing, certains défis de contexte sont cependant à dépasser. Tout d'abord, les initiatives restent encore trop éparses et à des échelles micro selon Gonzague de Borde, alors que l'enjeu est bien leur changement d'échelle. Et Thomas Venon de rajouter que la problématique n'est pas tant celle de l'argent disponible que celle de sa répartition et du manque d'entreprises sociales performantes suffisamment fortes pour recevoir des investissements et changer la donne. Ensuite les démarches d'accompagnement à la structuration de jeunes pousses prometteuses sont à renforcer comme le souligne Jean-Michel Lécuyer, afin de faire naître dans quelques années quelques grandes entreprises sociales solides dans les pays du Sud, telles que celles que nous pouvons connaître en France, capables d'être porteuses de solutions à très grande échelle. Par ailleurs, les outils d'investissement sont à multiplier pour fluidifier le marché et créer une véritable chaîne d'investissement, permettant grâce à des intermédiaires actifs et des plates formes d'intermédiation aux investisseurs de s'engager et d'anticiper des stratégies de sortie avec confiance comme le souhaite Thomas Venon. Laure Vinçotte d'un fait souligne en effet à ce stade, le manque d'acteurs capables de jouer un rôle entre la microfinance, qui finance des micro-projets entreprenariaux et les acteurs institutionnels de l'autre dans des logiques de soutien à de très gros projets de développement. Enfin, pour soutenir ce développement, la nouvelle frontière est aussi celle du développement de fonds locaux d'impact investing et notamment en Afrique, c'est le souhait d'investisseurs et partenaires qui désirent mobiliser l'épargne locale issue de particuliers, d'entreprises, de filiales, de grandes banques, pour embaucher des équipes sur place et répliquer des logiques de fonds de capital-risque locaux alors que les pays du Sud souffrent de sous capitalisation globale, il y a pour Guihem, une vraie opportunité pour les acteurs de l'impact investing d'investir avec une certaine rentabilité économique proche de celle du private equity à 8-9 % qui est ainsi bien plus importante que la rentabilité moyenne des investissements impact social au Nord, comme le souligne une récente étude du [INCOMPRÉHENSIBLE]. Au delà de cette phase de croissance forte l'avenir de l'impact investing passera certainement par une évolution de son rôle, du financement de projets d'équipements purs nécessaires au développement, il sera de plus en plus appelé à jouer un rôle en matière de financement de véritables projets d'entreprenariat social à fort impact social. Avec une approche innovante des prestations sociales, vecteurs de justice sociale et de réduction profonde des inégalités et porté dans les logiques démocratiques de gouvernance.