[MUSIQUE] [MUSIQUE] Je m'appelle Jean-Michel Severino, je dirige Investisseurs et Partenaires depuis cinq ans, après un long parcours professionnel, qui a été complètement consacré aux questions de développement. J'ai commencé ma vie professionnelle dans ce qui était le ministère de la coopération français, à la fin des années 1980. Puis j'ai travaillé six and à la banque mondiale où je me suis occupé du développement et de la crise financière en Asie de l'est, avant de diriger l'agence française des développements, qui est la banque française consacrée au développement dans les pays pauvres et les pays émergeants, pendant presque dix ans. Et actuellement, je me consacre au développement de l'impact investing en Afrique. Investisseurs et Partenaires est née il y a 13 ans, d'une aventure individuelle. Un investisseur brillant, du nom de Patrice Hoppenot, qui a décidé de consacrer son temps et son énergie au financement des entrepreneurs en Afrique, et des institutions de microfinance, avec l'objectif final de faire émerger une classe d'entrepreneurs qui soit à même, à la fois d'accélérer la croissance économique, mais de la rendre plus équilibrée, plus juste, plus soutenable. Depuis lors, nous avons financé une soixantaine de sociétés dans une quinzaine de pays, nous gérons une centaine de millions d'euros, qui ont été levés auprès d'une assez grande variété d'investisseurs institutionnels, mais aussi, personnes privés, fondations, organisations à but non lucratif, et nous mettons nos buts sociétaux en avant de nos objectifs financiers. Même si tous nos produits sont rentables. Même si nous souhaitons développer des entreprises rentables et pérennes, dans toute la gamme de ce que l'on peut imaginer sur le continent africain, depuis les start-up, jusqu'aux activités d'infrastructures. Une des difficultés les plus importantes auxquelles les fonds d'impact social sont confrontés, en particulier dans les pays en développement, réside dans la levée de fonds. On pense beaucoup aux problématiques d'investissement, mais en fait, l'énergie des véhicules d'investissement, est beaucoup concentrée sur la levée, le contact avec les investisseurs, et le suivi de ce contact avec le temps ; c'est bien entendu, le nerf de la guerre. Historiquement, les fortunes privées, les fondations, les institutions publiques et privées, ont joué un rôle important dans le développement de l'impact investment ; mais aujourd'hui, la question se pose de plus en plus, de l'implication des particuliers, qu'ils soient modestes, ou qu'ils aient des actifs significatifs, mais qui en leur permettent pas d'accéder au circuit de la gestion de fortune de l'univers financier. Le fait d'atteindre cette catégorie de public, est très important. Il est très important, pour le financement du secteur, parce que l'on voit bien que la masse énorme de l'épargne des particuliers, pourrait être mobilisée vers des objets que, pour l'instant, elle ne cible pas du tout, mais c'est important, aussi, en termes d'éthique. Parce qu'il y a un grand mouvement de solidarité, d'un côté, qui appelle à s'exprimer, et ne trouve pas forcément ces canaux d'investissement, dans l'univers du grand public. Et pour les fonds d'impact, il y a une valeur éthique particulière à être branchés dans des circuits de financement courts, qui sont d'une part, moins onéreux : moins de coûts de transaction et de temps de transaction pour tout le monde, qui in fine, pèsent sur le modèle économique, mais qui, aussi, répondent à l'exigence de notre temps, du contact en face à face, de la proximité, de la relation étroite qu'il peut y avoir, entre les investisseurs d'un côté, et des personnes qui investissent de l'autre côté, des entrepreneurs sociaux, ou les entrepreneurs d'impact. Alors, la technologie des dernières années, a permis de faire émerger d'un instrument, qui s'appelle le crowd-funding. Cet instrument donne un très grand espoir, pour financer ce secteur. Mais, son développement se heurte à de nombreuses barrières, qu'il faut arriver à lever progressivement. Il y a, d'abord, le cadre juridique. En France, nous avons la chance d'avoir, depuis l'année 2014, un cadre juridique, qui est assez restrictif, est assez contraignant, mais fixe, quand même, des règles du jeu qui permettent un développement assez rapide des acteurs de marché, qu'il s'agisse de la dette, surtout, et un peu de l'equity. Il faut aussi des modèles économiques. Aujourd'hui, aucune plateforme ne gagne de l'argent dans le crowd-funding. Il faut, en effet, des masses financières très importantes, et un nombre de transactions très élevé, pour arriver à équilibrer les coûts fixes d'une plateforme, qui ne sont pas tant des coûts technologiques, que des coûts de marketing, d'accès à la clientèle, et ensuite, de gestion des investissements. Il faut, enfin, des investissements, des projets à financer. Et arriver ainsi, à mettre en contact un univers de l'impacte social qui est, finalement, assez conservateur dans ses approches, et des plateformes extrêmement non seulement technologiques, mais branchées dans un univers de communication, qui privilégie le message, c'est normal, par rapport au contenu. Le temps court, par rapport au temps long ; tous les sujets que l'on connaît bien, d'interface entre un univers que l'on peut qualifier de marché, et un univers hors marché. Néanmoins, on voit que ce secteur progresse, de l'ordre d'une bonne dizaine de plateformes sont nées en France, en l'espace d'un an. Et le nombre de transactions, qui n'est pas tout à fait connu et répertorié statistiquement, lui-même, progresse assez rapidement. Les chiffres que l'on entend souvent évoquer provoquent un doublement de partant, certes de très bas, de la taille du marché, depuis deux ans maintenant, depuis que le secteur s'est mis en place. Si l'on regarde les chiffres de l'épargne mondiale, si l'on regarde, en France, la masse de l'épargne liquide disponible, pour des rendements modestes, que l'on pourrait comparer aux totaux du livret A, ou de l'assurance vie, on s'aperçoit qu'il suffirait que un pour mille de l'épargne qui est consacrée aujourd'(hui à ces classes d'actifs, se transforme en épargne consacrée à l'impact investment au travers des instruments de crowd-funding, pour permettre de multiplier par 100 les volumes financiers qui sont consacrés au secteur. Il y a donc là un gisement extraordinairement important, mais l'exploitation de ce gisement va demander, encore une fois, une adaptation de tous les acteurs à ce métier très spécifique de l'impact investment, à un dialogue qui va être fondé, et un reporting qui va être fondé sur l'atteinte de l'objectif sociétal, et pas simplement de l'objectif financier, et des façons de communiquer et de se parler, qui vont être très différentes de celles que nous avons eues dans le passé dans ce métier, largement fondées sur des reporting techniques très chiffrés, adressés à des investisseurs largement institutionnels ou très structurés, qui aimaient plonger dans les chiffres et étaient gouvernés plutôt par des rations, que par des images ou par des sentiments, ce qui, bien entendu, sur ce marché du crowd-funding, va devenir aussi une catégorie très importante de l'attraction vis-à-vis des investisseurs. Il y a plusieurs conditions qui vont permettre une accélération de l'accès de l'impact investment au marché grand public, à travers le crowd-funding. Une des premières conditions c'est, sans doute, le développement de plateformes spécialisées, qui peuvent être, en eux-mêmes, des projets d'entreprises sociales. Actuellement, ces plateformes commencent à émerger. Il y en a quelques unes qui oint acquis une certaine notoriété, comme Babylone, en France. Le cas de Babylone est, cependant, particulier, enfin intéressant, dans la mesure où cette plateforme est surtout orientée vers des produits de dette dans le domaine de la microfinance. Donc, les plateformes cherchent des créneaux particuliers, et aujourd'hui, aucune plateforme n'est en mesure de pouvoir traiter la variété des besoins de l'impact investment, au nord, au sud, en dettes, en fonds propres. Donc, il y a de la place pour d'autres acteurs plateformes de business social, qui vont pouvoir investir des différents champs, avec l'espoir de trouver des équilibres économiques dans les prochaines années. Il va être très important, aussi, que la législation évolue. Aujourd'hui, cette législation est assez restrictive. Dans le cas français, ce qui est très positif, c'est que les procédures d'agrément et les procédures de surveillance créent un système régulé, qui va inspirer confiance aux investisseurs, en tous cas c'est l'objectif, en revanche, le système est très fortement plafonné. Par exemple, aucun investisseur ne peut investir plus d'un millier d'euros par projet. Le plafond de récolte sur un seul projet, est de l'ordre du demi million d'euros par an, et les formules juridiques qui peuvent être utilisées pour ces investissements, sont également limitées. Donc, là aussi, le déploiement de nouvelles formules juridiques plus ouvertes, au fur et à mesure que le climat de confiance et le savoir-faire vont se répandre, va être un élément très important d'expansion du métier. [AUDIO_VIDE]