[MUSIQUE] [MUSIQUE] Les social impact bonds, c'est un dispositif dont une des grandes nouveautés en France, c'est que, on leur a trouvé une traduction officielle, à l'occasion des travaux du comité consultatif français, on les appelle désormais, titres à impact social, en France. Alors, je vais essayer de faire référence aux social impact bonds en utilisant l'acronyme français, parce que, j'essaye de développer, justement, et de généraliser cette traduction. Les titres à impact social ont été inventés dans un contexte particulier, qui est le contexte de la culture administrative anglaise, au début des années 2000. Qu'est-ce que c'est que cette culture? C'est une culture qui, en fait, depuis longtemps, est centrée sur ce que l'on appelle le paiement au résultat. Et ça, c'est quelque chose qui est un peu différent, par rapport à la France. C'est-à-dire que les collectivités locales anglaises, les ministères également, sont habitués, en fait, à payer pour du résultat. C'est-à-dire à structurer des contrats où la question des moyens est moins importante que le type de résultat qui peut être obtenu par les prestataires. Dans ce contexte-là, se développe, justement, la réflexion sur les titres à impact social. Un titre à impact social, du coup, consiste à faire intervenir dans le schéma classique pouvoir public, qui est, in fine, le demandeur, le commanditaire de la prestation, et l'opérateur est, en général, issu de l'économie sociale. Dans ce schéma-là,on fait venir un troisième larron, qui est l'investisseur privé, et qui, en fait, va pourvoir une avance remboursable. Qui le sont, en général, sur un taux d'intérêts déterminé par le niveau d'atteinte des objectifs sociaux, qui sont fixés ex ante. Aujourd'hui, on en est à 45 titres à impact social qui ont été lancés à travers le monde, pour l'essentiel au Royaume-Uni, où il en a quasiment une trentaine ; aux États-Unis également, où ça se développe très vite, dans certains États ; mais aussi, avec des exemples caractéristiques, en Australie, mais plus précisément, en Europe continentale, avec des expériences pilotes qui ont été lancées, au Portugal. Il y en a une qui a été annoncée également, récemment, en Finlande. Les registres d'interventions de ce type de titres à impact social, c'est plutôt diversifié, au Royaume-Uni, où on a de la prévention de la délinquance, on a des problématiques santé aussi, qui commencent à émerger, ça c'est une nouvelle tendance ; aux États-Unis, on va être sur le soutien des populations marginalisées, qu'il s'agisse, du coup, de personnes sans abris, de jeunes délinquants, et on voit émerger, après, en particulier en Finlande, le cas thématique, c'est une thématique santé. Santé des personnes au travail dans le secteur des fonctionnaires. Donc, c'est un sujet tout à fait intéressant. Aujourd'hui 45 titres à impact social à travers le monde, pour des actifs sous gestion, de plus d'une centaine de millions d'euros. Voilà pour le contexte général des titres à impact social, à travers le monde. Maintenant, la question de leur adaptation au contexte français. Je pense qu'une des questions les plus importantes c'est, avant tout, de se demander de quoi est-ce que les titres à impact social sont le nom? On sait que, en particulier en Europe continentale, ce type de titre suscite énormément de levées de boucliers. Non seulement, depuis le secteur social, qui voit une forme de financiarisation de leur action ; mais aussi en écho auprès d'un certain nombre de pouvoirs publics, des fois d'ailleurs, auprès de quasiment tous les échelons de pouvoir, on sent une certaine réticence à avancer sur ces sujets-là, et c'est particulièrement vrai en France, mais c'est aussi vrai en Allemagne, qui est un pays qui a insisté énormément, à l'occasion des travaux sur la taxe force investissements à impact social du G8, sur le fait que l'Allemagne ne s'en laisserait pas raconter, et que cette taxe force ne serait pas le bras armé de Cameron pour faire avancer cette problématique-là en Allemagne. Ils ont été très fermes là-dessus, et cela a été relativement spectaculaire. Cela n'empêche pas l'Allemagne d'essayer d'avancer un petit peu sur le sujet, mais un petit peu à la marge. Ce qu'on fait, en France, c'est un peu la même chose. On a beaucoup de gens qui s'intéressent à ces sujets-là. Moi, ce qui me frappe, c'est que dès que je parle des porteurs de projets, ils vont me dire, on est très intéressés, intellectuellement, par la question ; c'est toujours le mot qui revient, la réverbe qui revient : intellectuellement, c'est quelque chose qui est très intéressant, parce que ça veut dire que, sur le principe, on trouve cela formidable, mais en pratique, on ne voit pas trop comment est-ce qu'on pourrait faire, pour concrètement faire avancer les choses. Pourquoi? Parce que ces porteurs de projets, sont des gens qui vont souvent buter sur des questions règlementaires. On a parlé des problèmes de financements, mais la question règlementaire, c'est quelque chose qui est très complexe aussi à traiter, on sait que, le secteur de l'économie sociale et solidaire, en France, c'est beaucoup les entreprises et les organismes d'insertion. Un chômeur de longue durée par exemple, ça coûte 15 000 euros à un certain nombre d'intervenants publics. À la fois Pôle emploi, mais aussi les départements avec le RSA, aux communautés urbaines et aux villes, avec les centres communaux d'action sociale, en, termes de versements financiers purs, ça coûte 15 000 euros. Le problème, c'est que ces acteurs sont fragmentés, que si on imagine, par exemple, un dispositif qui va permettre de réduire le chômage de longue durée à l'échelle d'un territoire, on va faire faire des économies à la collectivité, mais à qui va-t-on les faire faire? Et qui, surtout, va récolter le produit financier de ces coûts évités? C'est un véritable problème c'est ce que les Anglais appellent le fonctionnement en silos. Ça veut dire que la France n'est pas seule dans ce bateau-là. La question, c'est comment fait-on entrer dans la culture administrative française, qui est plutôt centrée sur de la délégation de service public, donc de la contractualisation, où les termes du contrat financier, et surtout les autres aspects, sont fixés ex ante, à un autre type d'approche, qui serait, non plus de la délégation de service public, mais une forme d'octroi de droit à l'expérimentation, où les résultats sociaux et, a fortiori, financiers, sont tout à fait indéterminés. Quand on parle d'une façon plus générale de créer de nouvelles synergies autour d'expérimentations, autour de modèles économiques, sociaux, plus ou moins éprouvés, entre des acteurs de différentes natures, à l'échelle d'un territoire, là on se rend compte qu'en France, il y a énormément de choses qui se passent déjà. On a l'exemple des PTCE, les pôles territoriaux de coopération économique, qui est un exemple absolument formidable. Puisque finalement, le PTCE, c'est un peu la version française historique, des titres à impact social. C'est-à-dire d'une façon plus générale, ce que les Américains appellent collective impact, c'est-à-dire la façon de structurer des coalitions sur un territoire, entre différents organismes, autour d'un référentiel engagé. Alors, dans le collective impact, ce référentiel, fait en général intervenir une conception partagée de la mesure d'impact, avec, du coup, des indicateurs de suivi qui vont être travaillés dans le temps. On a des exemples très intéressants, puisque un PTCE peut intervenir dans plein de dimensions, mais dans des dimensions qui sont, souvent, des dimensions innovantes. On a par exemple pas très loin d'ici, la coursive Boutaric, à Dijon, qui va plutôt travailler l'aspect cluster audiovisuel graphisme, ça ressemble presque à un incubateur, en quelque sorte, puisqu'on reprend le lieu territorial d'un immeuble HLM, en réhabilitation, dans lequel on fait venir de nouveaux acteurs. On a, par exemple, le projet PTCE l'éolienne en pays de Vilaine, qui est de la mobilisation au départ, de proximité, autour de la construction, d'un parc éolien sur le territoire. Donc là, on est complètement sur le modèle du crowdfunding. [AUDIO_VIDE]