[MUSIQUE] [MUSIQUE] Pour me présenter brièvement, Clément Chesnot. Je suis directeur technique du fonds Moringa. J'ai un parcours un peu hybride. À la fois un parcours technique, je suis biologiste, ingénieur des eaux et forêts, et par ailleurs j'ai travaillé dans le secteur privé, chez Ernst & Young, dans le département développement durable, avant de travailler pour l'Office National des Forêts. Ensuite, pour sa filiale internationale, qui travaille en zones tropicales. Là, j'étais directeur du développement de l'ONFI et donc c'est là que j'ai développé, monté, mon fonds Moringa. Alors qu'est-ce que Moringa, en deux mots? Moringa est un fonds d'impact, nous avons levé à peu près 85 millions d'euros, pour investir en Amérique latine et en Afrique subsaharienne. On investit sur l'agroforesterie. Qu'est-ce que l'agroforesterie? C'est une technique agricole, qui combine des arbres avec des cultures, et/ou des animaux, de l'élevage, ce qui permet d'avoir de hauts niveaux de rendements et de manière écologique. C'est une technique qui est aujourd'hui particulièrement mise en avant, parce qu'elle permet d'avoir de hauts niveaux de production, donc de répondre à une demande du marché en produits agricoles et forestiers qui est toujours plus forte, mais en le faisant de manière écologique. En protégeant les forêts, ce qui permet d'apporter des solutions pour réduire la déforestation, et puis ça permet aussi de lutter contre le réchauffement climatique, parce que c'est une technique qui permet de séquestrer du carbone, c'est une technique qui permet de restaurer les sols, et ensuite, d'avoir un impact très fort pour les populations locales. Moringa développe ces projets-là, et c'est donc vraiment ce que l'on appelle un fonds d'impact. C'est-à-dire qu'à la fois on a un objectif de retour économique pour nos investisseurs, et à la fois, on a des objectifs en matière environnementaux et sociaux. Et donc, on a des méthodologies pour quantifier cet impact-là, et nos investisseurs vont nous juger sur notre performance économique, environnementale, et sociale. Qui sont nos partenaires? Déjà, au niveau du fonds en tant que tel, le fonds a été monté par deux partenaires, très différents et très complémentaires. D'un côté un partenaire technique : l'ONF international. C'est la filiale de l'Office National des Forêts, qui travaille depuis des dizaines d'années en zones tropicales, pour proposer des solutions à ces pays-là pour qu'ils gèrent leurs forêts durablement. De l'autre côté, vous avez un partenaire financier, le groupe Edmond de Rothschild, qui lui s'intéresse à cette thématique de l'impact depuis plusieurs années, et qui a monté et continue de développer des fonds d'investissement dédiés à ce secteur de l'impact. Cette rencontre a eu lieu en 2010, ça a un peu été la genèse du fonds. Depuis, nous avons rassemblé des investisseurs, qui nous ont rejoint. J'ai parlé de 80 à 85 millions d'euros, on a tout un ensemble de banques de coopération. Comme l'agence française de développement, comme la banque africaine de développement, comme la banque nationale américaine de développement, et des investisseurs privés. Alors nous, côté investisseurs privés, c'est plutôt des family offices. Ce sont des gestionnaires de fortunes, qui placent une partie de leurs investissements sur ces sujets d'impact. Donc déjà, voilà au niveau des initiateurs, au niveau des investisseurs on a vraiment cette logique de partenariats publics-privés. Ensuite, au niveau des projets en tant que tels, on assemble aussi, on identifie des entrepreneurs dans ces pays-là, qui développent ces projets, qui peuvent avoir une rentabilité économique, mais aussi avoir des impacts très forts en matière de développement. On s'associe aussi avec des acteurs techniques, des centres de recherches, pour être sûrs que ces projets soient le plus performant possible. On travaille avec le CIRAD, le World Argoforestry Centre, le Catie en Amérique latine, tout un ensemble d'ONG pour vraiment renforcer nos projets. Pour parler d'un projet concret, on vient d'investir au Nicaragua, dans le secteur du café. Le secteur du café est un secteur particulièrement intéressant, parce que d'un côté, vous avez une opportunité : le café, c'est un marché qui se développe. Il y a une demande, notamment depuis les pays émergeants, qui est de plus en plus importante. Et en plus, se développe une demande pour du café de très haute qualité, et certifié durable. Quand on discute avec les grands industriels, on peut citer Nespresso, Starbucks, et d'autres, on se rend compte qu'il y a une demande qui n'est pas satisfaite. C'est-à-dire, qu'ils ne trouvent pas assez de ce café certifié durable, et de haute qualité. Vous avez une opportunité d'un côté, et de l'autre, vous avez une menace, parce que le café est une culture qui est très impactée par le réchauffement climatique. C'est une culture d'altitude, et aujourd'hui, vous avez des problèmes de sécheresses qui impactent cette culture-là, vous avez des maladies. Et donc, aujourd'hui, vous avez des producteurs qui sont une situation extrêmement difficile, qui ont de vieilles plantations de café qui doivent être rénovées, et donc, ils sont dans des situations de pauvreté très importante. Donc nous avons investi, justement, dans un projet au Nicaragua, qui se base sur un entrepreneur, c'est un fermier, qui a une grande et très belle ferme agroforestière, qui combine du café sous couvert d'arbres. Les arbres permettent de donner une protection face, justement, au réchauffement climatique, face aux sécheresses, et vous avez tout un ensemble d'interactions positives entre le café et les arbres. Donc, nous avons investi dans cette société pour rénover 2 000 hectares de plantations de café avoisinant. Donc, on va travailler en partenariat avec des petits producteurs pour rénover leurs fermes. On va utiliser tout le paquet technique qui a été développé au niveau de cette ferme principale, pour transmettre cette technologie auprès des producteurs périphériques. C'est un projet qui peut avoir beaucoup d'impact social, justement parce qu'il permet de rénover complètement les fermes de ces petits producteurs et au bout de trois, quatre, cinq ans, leur donner une ferme qui sera bien plus performante. C'est un projet qui peut avoir beaucoup d'impact environnemental, parce que l'on va favoriser, justement, le reboisement à l'échelle d'un territoire, ce qui apporte des solutions face à la déforestation, face au réchauffement climatique, et enfin, c'est un projet qu fait beaucoup de sens au niveau économique, parce qu'on va créer ce que l'on appelle un cluster de café. Si vous voulez, c'est un grand cru de café, dont on va avoir une base de production importante, au niveau d'un territoire, que l'on va pouvoir marketer et vendre auprès des grands torréfacteurs que donc j'ai cités tout à l'heure : on discute de partenariats avec Nespresso et Starbucks, autour d'autres. On identifie de grands acteurs du secteur du café, du cacao, du bois, des cultures alimentaires, qui cherchent à sécuriser leurs approvisionnements, mais aussi à avoir des approvisionnements qui sont vraiment durables. Et donc nous, on apporte des investissements pour permettre de construire des projets qui répondent à leurs demandes. Donc, on a vraiment beaucoup de travail vis-à-vis de ces industriels-là, pour bien comprendre leurs besoins, et puis de l'autre côté on passe beaucoup de temps sur le terrain, au niveau des différents pays, pour identifier des acteurs locaux, qui sont capables de développer ces projets à grande échelle. C'est des entrepreneurs, c'est des coopératives, c'est des fermiers, c'est des petits industriels, c'est des ONG, et vraiment, on essaie de repérer des champions sur place, qui ont développé, déjà, des activités à petite échelle, et on va se baser sur eux, et nous on va leur apporter les investissements, on va aussi leur apporter de l'expertise technique un peu pointue, pour renforcer leur capacité, pour agrandir les projets et faire des projets à grande échelle qui permettent d'avoir l'intérêt de la grande industrie. Donc on est vraiment, au niveau des deux côtés, à la fois on travaille beaucoup auprès des grands industriels, et puis à la fois, vraiment sur le terrain, pour identifier ces acteurs locaux, vraiment compétents. [AUDIO_VIDE]