[MUSIQUE] [MUSIQUE] Je suis Frédéric Roure, agronome et ingénieur écologue. J'ai créé Géochanvre en 2014. L'objectif, c'était d'essayer de créer des toiles végétales à partir de fibres naturelles, là aussi biosourcées, dans une logique zéro phyto, dans une logique d'agriculture agroécologique. J'ai fondé cette industrie de transformation de paille végétale en ayant démarré à deux, trois salariés, puis on s'est retrouvés, en 2020, à une quinzaine de salariés, avec des problèmes de trésorerie : on a eu investi trois millions et demi d'euros sur des machines et il nous faut maintenant, pour asseoir le développement, trouver des financements. Géochanvre a réussi à boucler une levée de fonds après un an et demi de recherche de co-financeurs, donc on a réussi en mars 2021 à pouvoir accrocher en haut de bilan quatre fonds d'investissement à vocation carbone ou à vocation sociale, qui sont là pour appuyer un peu notre démarche d'industrie écologique et de l'économie sociale et solidaire. [MUSIQUE] Depuis 2019, on a commencé à chercher des fonds d'investissement. On est arrivés, un an après, à enfin trouver quatre fonds d'investissement. Ça s'est traduit, en décembre 2020, par une lettre d'intention d'un premier fonds, deuxième fonds, et en fait la lettre d'intention a pu être signée par le quatrième fonds in extremis, on a eu très peu de temps pour arriver à faire valider le pacte d'actionnaires vis-à -vis du pôle d'actionnaires que j'avais déjà , qui étaient des love moneys, qui étaient plutôt conciliants, mais il y a quand même une relecture assez rapide à avoir et c'est plutôt un parcours du combattant que de boucler ces levées de fonds, avec des documents juridiques qui sont assez contraignants, à refaire tous les statuts, tous le pacte d'actionnaires, etc. À la réception de la LOI en décembre 2020, il a fallu de nouveau présenter ça à l'ensemble des actionnaires historiques de la société. C'était un peu compliqué parce que j'en avais une douzaine, des love moneys, et il a fallu pouvoir re-expliquer, quelque part, les contenus de ces LOI, de cette lettre intention des quatre nouveaux fonds, en traduisant le fait que c'était, quelque part, le futur pacte d'actionnaires, donc le temps consacré à relire la LOI était crucial pour dire que le pacte allait s'inspirer à 97 % de cette lettre d'intention. [MUSIQUE] Le contenu de la lettre d'intention avec tout le détail du pacte, on se retrouve avec des notions qui, pour moi, étaient nouvelles. Je savais bien ce que c'était qu'un conseil de surveillance, qui s'appelle comité stratégique, avec un nombre de membres, etc., mais il y a un vrai jeu d'acteur entre les nouveaux arrivants et les anciens, à dire comment on vote, qui a des pouvoirs de minoritaire, des pouvoirs de blocage, des voix qui comptent double, il y a tout ce jeu-là sur la partie gouvernance dont il faut être vigilant. Après, moi, ce qui m'a le plus choqué, c'était pas le côté délivrable de la partie du contrôle de la rentabilité, c'est surtout les clauses de ratchet, où il y a des bons de souscription par actions, des BSA, qui sont émis, dans une logique où, si le contrat n'est pas respecté, en l'occurence le chiffre d'affaires à atteindre en deux, trois, cinq ans, il y a des parts qui sont réservées aux investisseurs, il y a des tas de clauses comme ça, qui sont assez contraignantes et qu'il faut vraiment décortiquer tant qu'on peut et essayer de négocier là -dessus. Ça c'est les clauses les plus douloureuses. Le plus simple, c'est d'avoir du reporting mensuel ou trimestriel. Il faut bien s'entendre, là aussi, à ce que, si c'est des audits trimestriels ou si c'est un compte d'exploitation à faire tous les six mois, mais ça aussi ça dépend des investisseurs, de ce qu'ils vont vous demander, parce que ça représente, là aussi, des budgets et, donc, des équivalents temps plein à faire plutôt que de faire le cœur de métier qui est, en l'occurence, pour moi, produire des toiles végétales. [MUSIQUE] Il a fallu vite découvrir deux notions importantes. Le fait que ce soit des documents 100 % juridiques, qui font 60, 80, 100 pages, avec des redondances d'articles et des précisions qui sont complémentaires à chaque niveau d'article. Donc cette lecture, quelque part très juridique, de quelque chose qui nous concerne au plus haut point, en tant que fondateurs, c'est quand même quelque chose à laquelle il faut s'habituer et si on pouvait comparer plein de pactes et plein de lettres d'intention, ce serait l'idéal mais, ça, c'est pas facile à prouver. La deuxième contrainte, aussi, c'est le temps, parce que quand on est engagé dans une logique de closing, il y a un compte à rebours qui se met en route et qui fait que chaque modification, chaque question-réponse, décale, en l'occurence, nous il y avait plein de fonds donc ça faisait, chaque fois, décaler de une semaine, quinze jours, trois semaines, le temps que tout le monde relise l'alinéa, et le timing glisse très rapidement. Donc le compte à rebours, c'est vraiment quelque chose qui est très contraignant, surtout si on a des engagements de productivité en fonction des cycles saisonniers pour nous qui sommes dans le vivant, on a des pailles qui sont là qu'une fois par an, dans le végétal, et on a deux cycles par an de production. Si on rajoute cette logique de closing, il faut vraiment l'intégrer dans une logique de compatibilité par rapport à nos cycles de production. [MUSIQUE] S'habituer à un discours juridique qui n'est pas inné. Donc il faut s'habituer à avoir des actes, si c'est possible, comparatifs. Il y a des cabinets spécialisés qui peuvent le faire mais là aussi, c'est un ticket, c'est essayer de choisir des cabinets qui sont plutôt aux résultats et qu'il n'y ait pas une prime à 50 000 euros rien que de leur dire bonjour, essayer de trouver, justement, des cabinets avec qui le feeling passe très vite parce que ça va vite devenir très compliqué dès qu'on va faire de la relecture juridique, dès qu'il faut conseiller ça, dès qu'il faut conseiller sur des choix de timing, à dire on perd ça, mais on perd lui, voilà . Ma conclusion personnelle sur cette levée de fonds, c'est qu'heureusement que j'ai une équipe extrêmement soudée et solide : ça m'a permis de pouvoir m'appuyer sur eux, rediscuter et voir quels étaient les bons choix parce que, forcément, même si on est créateur, on est pas forcément financier ni juridique. [MUSIQUE]