Bonjour, Samuel Faure. >> Bonjour. >> Donc vous êtes un spécialiste de la défense européenne. Vous avez publié au mois de mai dernier, aux éditions Athena, un livre qui s'appelle Défense européenne. Vous êtes doctorant au CRE de Sciences Po, chercheur associé au CRE et puis vous êtes également chargé d'enseignement à Science Po Lille. Alors, 2016, un très grave attentat à Bruxelles. 2015, deux très graves attentats à Paris. Est-ce que dans le domaine du renseignement, l'Europe, la construction européenne, c'est une partie du problème ou une partie de la solution? >> À chaque nouvelle attaque terroriste sur le territoire européen, un serpent de mer revient : créer une CIA, une DGSE européenne, c'est-à-dire une entité >> centralisée qui gérerait les renseignements au sein de l'Union européenne. Quelle est la réalité politique et institutionnelle de l'Europe du renseignement en 2016? L'européanisation du domaine du renseignement ne date pas d'hier. Dès les années 70, on constate des coopération bi et multilatérales dans ce domaine d'action publique. D'abord, en dehors des communautés puis de l'Union européenne, le groupe de TREVI, puis il s'institutionnalise au sein de l'Union européenne. On peut penser à Europol, qui coordonne les polices nationales, ou à l'INTCEN, le centre de renseignement de l'Union européenne qui coordonne les services administratifs de renseignement nationaux. Ceci étant dit, ces agences, ces entités de l'Union européenne ne prennent pas de décision et ne produisent pas de renseignement. En d'autres termes, ils ne sont pas, ils ne correspondent pas à une CIA européenne. Est-ce qu'on peut le regretter? Les spécialistes de ces enjeux, comme Olivier Chopin, considèrent qu'il n'est ni réaliste, ni souhaitable aujourd'hui, malgré ces terribles attaques terroristes de 2015 et de 2016 à Paris, Saint-Denis et Bruxelles, de constituer, de créer une CIA européenne. Pourquoi? Deux éléments de réponse. D'une part, aux États-Unis, la CIA, le modèle, si je puis dire, porte mal son nom, n'est pas centralisé comme son nom l'indique, mais un conglomérat de plus d'une quinzaine d'agences de renseignement. Donc un réseau d'agences plus que une une et unique agence unique et unifiée. D'autre part, en Europe, les logiques d'action nationales persistent fortement entre les états membres. Antoine Mégie, un autre spécialiste de ces enjeux-là, rappelle qu'un même renseignement peut-être traité comme principal par un état et comme secondaire par un autre état. Finalement pour les spécialistes, cet enjeu devrait être répondu de la manière suivante : oui, il faut améliorer, renforcer l'efficacité, l'effectivité des coopérations bi et et ou multilatérales entre les états membres. Mais, il est probable qu'aujourd'hui, en l'état actuel du contexte institutionnel, politique de l'Union européenne, il est peu évident de vouloir créer une CIA européenne. En bref, oui à une intégration européenne horizontale, mais l'intégration verticale, par la création d'une nouvelle institution supranationale, semble difficile. >> Merci beaucoup, Samuel Faure. >> Merci à vous.