-Le Service Européen pour l'Action Extérieure a été créé au moment de la mise en application du traité de Lisbonne. Il comporte en effet des caractéristiques spéciales. Il soutient l'action du Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité. C'est une fusion d'un certain nombre de fonctions qui existaient avant la création du SEAE en particulier tout ce qui dépendait du premier et second pilier avant la politique étrangère de sécurité commune mais aussi de la politique communautaire qui était menée en termes d'actions dans les relations diplomatiques avec un certain nombre de pays. La principale caractéristique de ces services est la fusion des différentes identités diplomatiques et des cultures de la Commission et du Conseil tels qu'elles étaient auparavant mais en incorporant l'expertise diplomatique des Etats membres, des diplomates ou d'une partie de leurs services. La mise en place d'une politique étrangère et de sécurité commune demande du temps. L'expérience que nous avons vécue dans les années 90 nous a fait vivre plusieurs crises qui ont mis à l'épreuve la détermination et la volonté d'avancer vers une politique étrangère de sécurité commune. Cette expérience a été utilisée par les rédacteurs du traité de Lisbonne. Bien entendu, cela a été déterminant pour forger le futur. Comme l'a montré l'expérience, il n'est pas facile d'assurer la convergence des actions de politique étrangère. De plus, un certain nombre d'Etats ont différentes relations historiques avec d'autres pays, différentes cultures diplomatiques, différentes façon de traiter avec le monde extérieur. Cependant, comme vous l'avez dit, la volonté de l'UE de projeter ses valeurs vers le monde extérieur et, si possible, de forger un monde basé sur la sécurité et les valeurs européennes telles que la démocratie, les droits de l'homme et l'Etat de droit a été favorable à la mise en place d'une action rapprochée, notamment lors d'une crise en expansion. Comme vous le savez, on parle toujours de délégations, mais en 2010 elles ont été renommées délégations de l'Union Européenne. Il ne s'agit pas uniquement d'un titre, c'est également significatif d'un changement des fonctions des délégations. La nature du réseau de 152 délégations dont nous disposons à travers le monde, change. Les délégations ont endossé le rôle de présidence tournante afin d'assurer une coordination et une représentation du pays hôte et la coordination des Etats membres afin que l'UE ne fasse qu'un dans tous les pays hôtes. Elles jouent un rôle important dans la mise en forme de la politique étrangère et de sécurité commune de l'UE. Le principal changement auquel nous avons assisté a été la création d'un groupe et d'un visage de l'UE plus homogènes ainsi qu'une diplomatie publique de l'UE plus homogène dans ces pays, ce qui permet aux pays hôtes de comprendre la dimension de l'UE. Nous avons assisté à l'augmentation de la puissance européenne sur la scène mondiale en termes économiques. La part du commerce international et des investissements a augmenté au cours des décennies passées. Nous sommes devenus un acteur majeur en termes de coopération au développement ainsi que dans le cadre de beaucoup d'autres questions internationales. Nous sommes présents dans le forum multilatéral des Nations unies. Cependant, on débat encore du fait que l'UE soit une puissance douce et ait certaines capacités. Nous avons pu voir à plusieurs reprises qu'elle a un pouvoir transformateur, en l'occurrence au moment de l'élargissement lorsque des pays deviennent membres de l'Union européenne et, via le processus d'adhésion, transforment et consolident leurs systèmes politiques et de marché. Tous ces éléments montrent que l'UE est une puissance. Mais elle est limitée à une puissance douce. Nous avons développé une culture, les prémisses d'une politique étrangère de sécurité commune se concentrant en particulier sur la gestion de crise et la prescription de prévention de conflits, tous les éléments requis pour ramener un pays ou une région à la normale suite à un long conflit : stabilisation, démobilisation, sécurité et renforcement après une réforme. Tous ces éléments finissent par faire partie d'une culture commune de la politique étrangère qui montre également une approche commune basée sur une approche étendue en mettant en commun tous les éléments requis pour que l'action entreprise lors d'une crise soit efficace. L'expérience montre que notamment lorsque l'action de l'UE est testée, il peut y avoir une véritable puissance mais bien entendu, le travail est toujours en cours. Nous sommes au début d'un long processus qui suppose une consolidation supplémentaire et une meilleure capacité à coordonner les actions en suivant les voies qui ont été développées jusqu'à présent. Tout d'abord, il faut se rappeler que le Printemps arabe a surpris tout le monde. La vitesse et le rythme des changements, des révoltes, des mouvements de protestation et des changements de régime qui ont eu lieu en 2011, 2012, ont été très rapides et attendus d'une certaine façon. Il y a eu un effet domino, chaque pays est entré dans ce mouvement l'un après l'autre. La réaction des puissances extérieures a été en quelque sorte influencée par cet élément de surprise. Bien sûr, le fait de voir que ces impulsions démocratiques venaient de la base était un changement bienvenu. Mais nous devons aussi nous rappeler des difficultés rencontrées par l'UE. La difficulté principale était que nous traversions une crise financière et économique majeure. L'UE n'était pas en mesure de mobiliser d'importants fonds qui, en l'occurrence, auraient pu jouer un rôle dans la facilitation des transitions d'un certain nombre de pays. Bien entendu, notre réponse a été de revoir les politiques de voisinage des pays sud-méditerranéens et moyen-orientaux qui étaient d'une certaine façon basées sur une approche du donner plus pour obtenir plus : nous assurer que nous pouvions répondre aux besoins et aux demandes des pays en transition, mais cela n'a pas été suffisant pour durer. Nous savons que beaucoup de pays rencontraient des difficultés économiques majeures qui ont été à l'origine de ces mouvements de protestation et des changements qui se sont produits par la suite. Nous aurions dû agir plus rapidement, plus en profondeur, nous avons fait ce qui était possible. D'une certaine façon, je pourrais dire que cette critique, s'il y en a une, peut être partagée par la communauté internationale.