[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans la phase de préparation qui nous occupe ici, vous ne devez jamais oublier la raison d'être de la négociation. On négocie, autrement dit on passe du temps à interagir avec d'autres parce que l'on a besoin d'atteindre un objectif et que l'on pense y arriver de façon plus satisfaisante avec le consentement et la participation de l'autre partie plutôt que seul, par des moyens unilatéraux. Il n'est pas de meilleur négociateur que celui qui sait où il veut aller et pourquoi. La préparation doit donc vous aider à comprendre le plus clairement possible ce que vous souhaitez obtenir d'une négociation donnée. Vous ne pourrez jamais atteindre vos objectifs si vous ne les définissez pas clairement dès le départ. Permettez-moi une petite discrétion terminologique. La plupart des spécialistes de la négociation utilisent en général l'un ou l'autre de ces deux termes, les objectifs ou les intérêts. Cependant, d'innombrables analyses de vraies négociations, de discussions avec de vrais négociateurs de haut niveau permettent d'aboutir à la conclusion suivante. Dans ces négociations, les objectifs ne sont pas toujours si objectifs que cela, ce n'est pas que du tableau Excel. Les objectifs ont tendance à inclure une bonne part de subjectivité, d'ego, d'émotion et tout ça n'a rien à voir avec l'objectif froid. De même, la plupart des enjeux d'une négociation ne se résume pas à la maximisation d'intérêts quantitatifs par des personnes supposées rationnelles. Donc il faut achever de jeter à la poubelle le conte pour enfants selon lequel l'homme serait un être rationnel, un agent économique qui chercherait à maximiser son intérêt. D'ailleurs, assez récemment, le Prix Nobel d'économie 2017 Richard Thaler a démontré à d'autres que la prise de décision est infiniment plus complexe. et que l'analyse de nos priorités est loin d'être parfaitement rationnelle. Donc les vraies négociations sont beaucoup plus subtiles. Les négociateurs sont motivés, sont mus par bien des choses plus profondes que leurs intérêts objectifs. Il peut s'agir déjà de principes éthiques ou bien d'émotions, la colère, la peur, l'envie, la jalousie. Voilà pourquoi nous employons le terme motivations. Au fond de soi, quelles sont les motivations que l'on essaie de satisfaire à travers la négociation? Et comme il faut être au moins deux pour négocier, je dois réfléchir à mes motivations, mais aussi dans la phase préparation, aux motivations de l'autre négociateur. Ici, efforcez-vous d'analyser en profondeur. Au-delà d'un positionnement superficiel, je veux ceci, vous devez identifier vos motivations profondes, pourquoi je veux telle chose? Et faire de même pour l'autre négociateur, pourquoi demande-t-il ce qu'il demande? Imaginez deux associés d'une startup en train de négocier leurs parts dans une entreprise qu'ils créent ensemble et les deux insistent pour avoir plus de 50 % des parts. C'est bien sûr totalement l'impossible. De telles demandes ne laissent aucune marge de manœuvre pour un accord. 51 + 51 = 102 %, ça n'est pas possible. Néanmoins, en creusant plus en profondeur pour comprendre les motivations derrière cette position, on peut imaginer le scénario suivant. La motivation principale d'un des associés et le contrôle de l'entreprise. Il veut plus de parts pour avoir le dernier mot dans les décisions stratégiques, mais la motivation de l'autre associé est le retour sur investissement, il veut plus de parts pour motiver son investissement personnel dans l'entreprise et en retirer tout le fruit. Une fois ces deux motivations clarifiées, une solution mutuellement satisfaisante peut être envisagée. Distinguer des parts sans droit de vote pour qu'un associé génère plus de revenus sans avoir le contrôle de l'entreprise pour autant. Le négociateur doit donc absolument comprendre les motivations profondes en présence. En effet, vous ne pourrez peut-être pas donner à l'autre ce qu'il demande, la position, et cela entraînerait l'arrêt, l'échec de la négociation. Mais si vous réussissez à comprendre pourquoi il fait cette demande, quelle est sa motivation, alors vous pourrez peut-être lui proposer une autre solution qui soit véritablement alignée sur sa motivation profonde, à laquelle il n'avait pas pensée, que vous pouvez mettre en œuvre parce que votre mandat vous l'autorise et parce qu'elle ne vous est pas très coûteuse, et évidemment, à condition, bien sûr, que vous obteniez quelque chose en échange par principe de réciprocité. Donc pendant la phase de préparation, vous devez donc bien réfléchir pour identifier vos motivatons, ce dont vous avez besoin et pourquoi, les motivations de l'autre négociateur, de quoi a-t-il besoin, et à votre connaissance, pourquoi. En général, c'est vrai, vous disposez de peu d'informations à ce sujet, il est donc utile de préparer les bonnes questions à poser. N'oubliez pas non plus d'identifier les motivations des parties prenantes concernées, donc ces personnes qui ne seront pas présentes autour de la table, mais pour qui la négociation revêt un enjeu. Cela vous permettra ainsi d'identifier des motivations communes et compatibles. Par exemple, il est dans l'intérêt des deux négociateurs de conclure l'accord de manière rapide et discrète. Ces motivations doivent être abordées en premier lieu dans la discussion car elles vont contribuer à créer un lien de confiance qui vous sera bien utile lorsque vous aborderez plus tard les sujets les plus contentieux. Une dernière chose. On me demande parfois quelle est la différence entre les motivations et le mandat. En fait c'est assez simple. Une motivation signifie, j'aimerais aller le plus loin possible dans cette direction et le mandat veut dire mon patron s'attend à ce que j'aille au moins jusque là et sans franchir cette ligne rouge que je dois impérativement respecter. [AUDIO_VIDE]