[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans une négociation, les mots comptent. Les mots justes, délivrés de la bonne façon, au bon moment, vous aideront à faire passer votre message de manière efficace. Le négociateur doit donc être capable d'écouter, mais aussi de parler de manière active, percutante. En fait, on le sait déjà depuis des millénaires. Rappelons les trois niveaux de la rhétorique classique, tels qu'analysés par Aristote. La raison, les passions, on dira aujourd'hui, les émotions, et enfin le style. Pour Aristote, le locuteur doit développer un raisonnement solide, afin de convaincre l'autre, mais ça ne suffit pas. Il doit aussi miser sur les bonnes émotions pour persuader l'autre. Et il doit choisir, pour faire tout cela, un style adéquat afin de séduire l'autre. Alors, aujourd'hui est une époque contemporaine, mais à partir de ces trois règles de la rhétorique classique, je vous propose 10 facettes pour façonner vos prises de parole dans vos négociations. Première facette, votre parole s'adresse à un auditoire spécifique, sur lequel on se concentre entièrement. N'essayez pas de parler à quelqu'un tout en faisant autre chose en même temps, même au téléphone, et les études le prouvent. L'interlocuteur sent rapidement que vous êtes en train de regarder vos e-mails sur votre écran. Deuxième facette, pour être active et percutante, la parole s'adapte à un public précis. Les négociateurs talentueux ne s'adressent pas de la même façon à différents publics. Ils font toujours preuve du même respect, adapté au contexte, peu importe qui se trouve face à eux. Un préfet, des syndicalistes, un diplomate, un chef d'entreprise, peu importe. L'enjeu, c'est toujours d'essayer de se mettre sur la même longueur d'onde que l'autre, quelle que soit cette personne, ses responsabilités. Troisième facette, soyez concis. La concision en négociation est une qualité. Faites simple, percutant, ne submergez pas l'autre sous un long discours ennuyeux. Ciselez des formules. Et comme cela ne s'improvise pas, cela renvoie aussi, on le verra, à la préparation. Quatrième facette, soyez précis. L'ambiguïté conduit l'autre à mal interpréter ce que vous dites. Un diplomate m'a un jour donné le conseil suivant. Je vous le dis en français. Ne soyez jamais ambigu, sauf bien sûr si vous voulez l'être. Donc, il faut réserver ce flottement aux situations où on choisit d'être ambigu, parce que l'on a une bonne raison de créer ce qu'on appelle une ambiguïté constructive. Cinquième facette, la parole doit être intégrative. Évitez les formulations de type exclusif comme oui, mais. Préférez oui, et. Et en même temps, comme dirait l'autre. Au lieu de séparer les deux parties en présence, vous, moi, essayez de montrer que vous considérez que nous sommes sur un même bateau. Utilisez le nous, le on. Sixième facette, la parole active suggère plutôt qu'elle n'impose. Et si nous tentions cette solution? Car si l'autre négociateur découvre avec vous une solution en y apportant de lui-même, il y a moins de risque qu'il la rejette. Septième facette, et là il s'agit d'un point crucial, la parole active privilégie des formulations positives. De multiples expériences en psychologie sociale, notamment celles des économistes [INAUDIBLE] et Kleinman, ont démontré que les gens sont attirés par des formulations positives, et ils ont au contraire tendance à rejeter des formulations négatives, même si les deux formulations positives, négatives, décrivent une même réalité sur le fond. Huitième facette, dans la même veine, la parole active insiste sur les opportunités à saisir, plutôt que sur les risques à éviter ou les obstacles à surmonter. Neuvième facette, la parole active est tournée vers l'avenir. Elle ne se focalise pas sur les événements passés. On ne peut pas changer le passé. Seul le futur peut être façonné, et c'est ce dont nous décidons au présent. Dixième et dernière facette de ma petite liste, éviter de mentir. Permettez-moi d'insister sur ce dernier point. Il y a quatre raisons pour lesquelles un négociateur ne devrait jamais mentir. Primo, ce n'est pas bien. Chacun de nous décide des principes éthiques selon lesquels régler sa conduite. C'est une question personnelle, mais c'est une question vraiment importante, à vous de voir. Deuxio, le mensonge est un exemple classique d'un écueil sur lequel j'attirerai votre attention dans la vidéo suivante, sous-estimer l'autre. Quand vous mentez à quelqu'un, vous sous-estimez son niveau d'informations, vous sous-estimez aussi sa capacité à vérifier ce que vous avancez. Et si vous vous faites prendre, les conséquences sont extrêmement négatives. L'accord ne sera pas signé, le dialogue sera rompu, votre réputation sera compromise. Troisième raison, un peu contre-intuitive, mais je dis souvent, ne mentez pas, parce qu'on risquerait de vous croire. Par exemple, que feriez-vous si après avoir prétendu que vous aviez un formidable plan B pour mettre la pression sur votre interlocuteur, celui-ci vous répondait, dans ce cas-là , avec un tel plan B, nous, on préfère quitter la table des négociations. De même, le bluff vous conduira à prendre des engagements que vous ne pourrez pas tenir. Vous allez prétendre que pouvez apporter certaines solutions qu'en fait vous ne maîtrisez pas très bien. Et là aussi, si on vous croit, cela se retournera contre vous. Dernière raison pour laquelle il faut éviter de mentir, il existe d'autres outils, qui ne retourneront pas contre vous en tant que négociateur. Par exemple, une bonne préparation. Et cela sera le sujet de la série de vidéos dans le module numéro 2. [AUDIO_VIDE]