[MUSIQUE] Nous venons de voir ensemble des illusions perceptives et nous allons voir que les mêmes mécanismes peuvent s'appliquer à des processus plus complexes comme mémorisation et raisonnement. Ces mécanismes sont appelés des biais cognitifs, c'est-à-dire qu'ils altèrent notre jugement, c'est-à-dire notre capacité à appréhender les éléments que nous voyons ou que nous entendons, mais également notre raisonnement par rapport à différents sujets. Les biais cognitifs sont en fait liés à la structure et au fonctionnement du cerveau. Lorsqu'on est amené à rencontrer une situation, le cerveau enregistre cette information sous la forme schématiquement d'un chemin, d'une connexion entre différents neurones. Ces chemins sont réactivés au fur et à mesure de ce qu'on rencontre dans notre vie, ils sont soient renforcés parce qu'on va le rencontrer souvent, soit inhibés parce qu'on ne rencontrera plus jamais la même situation. C'est ce genre de phénomène d'association et de renforcement de chemins qui fait que l'on a parfois des processus qui se déclenchent de manière rapide et automatique sans que l'on en ait vraiment conscience. Ces mécanismes sont très utiles, ils nous permettent de réagir très rapidement dans la situation où l'on doit effectivement se comporter de manière rapide pour éviter un accident ou pour réagir dans une situation problématique, mais ça peut aussi créer des ennuis lorsque l'on interprète de manière erronée une situation. Les biais cognitifs peuvent apparaître dans tous les domaines de la pensée, la perception, c'est ce qu'on a vu tout à l'heure avec les illusions visuelles, nous en avons également pour la mémoire, le raisonnement, mais également l'argumentation. Il peut y avoir des argumentations fallacieuses dont il n'est pas toujours facile de trouver la source, c'est-à-dire que l'enchaînement des idées en fait ne répond pas à une liaison logique, mais c'est difficile à déterminer, et finalement aussi les interactions sociales avec des phénomènes notamment de stéréotypes. Dans ce MOOC, pour la clarté de l'exposé, nous allons distinguer entre deux types de biais cognitifs, les biais de jugement qui altèrent notre jugement sur la réalité présentée, et les biais de raisonnement qui font que l'on raisonne de manière erronée sur les faits qui nous sont présentés. Nous allons voir des exemples de ces deux types de biais. Commençons par les biais de jugement. Par exemple, si je dis à mon enfant, si tu ne travailles pas à l'école, le père Noël ne viendra pas t'apporter des jouets cette année, j'essaie de susciter chez lui ou chez elle une émotion forte, et je pense qu'avec une émotion forte, mon enfant fera plus attention au message que je donne. Après, ce n'est pas une technique que j'utiliserais avec un adolescent parce que ça peut au contraire le braquer. Mais l'appel à l'émotion est donc un biais assez puissant pour attirer l'attention du destinataire. Un deuxième biais de jugement fréquent est l'argument d'autorité. Par exemple, si un médecin me dit, je suis contre les vaccins, j'aurais tendance à plus le croire que si c'est mon fleuriste qui me dit qu'il est contre les vaccins. Donc, c'est l'autorité du médecin qui là fait foi, alors que ce n'est pas vraiment un véritable argument. Et le troisième biais dont on va parler dans ce MOOC c'est le biais d'ancrage. Vous avez certainement cette expérience où vous allez acheter des habits, et l'habit est mis en action, c'est-à-dire que son prix est diminué par rapport au prix original, et là vous pensez que vous faites une bonne affaire même si au final le prix que vous payez est relativement élevé. Donc, c'est ce qu'on appelle un biais d'ancrage, c'est-à-dire qu'on ancre son jugement sur le prix affiché plutôt que sur le prix que l'on paie effectivement. Voyons maintenant quelques exemples de biais de raisonnement. Un des biais de raisonnement fréquent est le biais de confirmation, c'est-à-dire que l'on a tendance à porter attention et à mémoriser davantage les informations qui vont dans le sens de ce que nous croyons. Par exemple, imaginons que j'aime bien une boisson sucrée et que je lise dans les journaux que cette boisson sucrée est mauvaise pour la santé. Si j'aime bien cette boisson, je vais avoir tendance à hésiter à croire cette première information et à chercher d'autres informations, d'autres sources pour vérifier ce qui est dit. Inversement, si l'article avait dit que cette boisson était bonne pour la santé, je me serais contentée de ça et j'en aurais été satisfaite parce que ça confirmait mon opinion initiale. Un deuxième biais de raisonnement est ce qu'on appelle généralisation abusive. Imaginez que dans votre vie vous n'ayez vu que des cygnes blancs parce qu'ils sont les cygnes les plus fréquents, il est très facile d'imaginer que tous les cygnes sont blancs et d'en déduire que tous les cygnes sont blancs. Or, il existe aussi des cygnes noirs, même s'ils sont plus rares. Donc, c'est ce qu'on appelle un biais de généralisation, parce qu'on généralise à partir d'exemples vus à toutes les situations que l'on pourrait rencontrer. Un autre biais très puissant et dont on a peine à se débarrasser même lorsqu'on le connaît c'est l'illusion de causalité. Lorsque deux événements apparaissent ensemble, on a tendance à penser qu'un événement est la cause de l'autre. Par exemple, si je vous dis, les anniversaires sont bons pour la santé puisque les gens qui fêtent beaucoup d'anniversaires sont très vieux, évidemment, vous repérez tout de suite que ce n'est pas les anniversaires qui causent la longévité de la vie. Mais lorsqu'on a des informations sur des situations plus connotées socialement, alors les illusions sont plus difficiles à repérer, par exemple, le lien entre la violence et les jeux vidéos. Nous venons de voir des exemples de biais cognitifs que nous aurons l'occasion d'étudier dans la suite de ce MOOC. Les biais cognitifs sont des mécanismes de pensée rapide, automatique, qui nous permettent de prendre des décisions quand on doit réagir vite dans une situation de la vie quotidienne, mais ce sont aussi des mécanismes qui peuvent nous amener à faire des interprétations erronées lorsqu'on a trop d'informations à sa disposition ou des informations incomplètes. Ce que nous verrons dans la suite de ce MOOC, c'est que pour arriver à contrer la perception que l'on a des informations qui nous parviennent et qui ne sont pas toujours exactes, il ne suffit pas d'appliquer des mécanismes rationnels, mais qu'il faut aussi être conscient de ses propres biais de raisonnement et ses propres biais de jugement. Ainsi, on peut être plus à même d'appliquer des raisonnements logiques sur les informations qui nous sont présentées. [MUSIQUE]