[MUSIQUE] [MUSIQUE] Alain Grandjean nous rappelle bien l'ampleur de l'enjeu de transformation de nos économies, et la France n'échappe pas à la règle. Le passage de 450 millions de tonnes de CO2 émises par an à 80 millions de tonnes en 30 ans ne va pas se financer tout seul et les enjeux sont considérables. Entre 55 et 85 milliards d'euros chaque année. À l'heure actuelle, nous ne sommes qu'à environ 30 milliards d'euros investis annuellement. On voit donc bien que la tâche est encore grande mais cela signifie aussi que de nombreuses opportunités n'ont pas encore été saisies par les acteurs économiques. Ce déficit d'investissement sonne également comme un appel à la mise en place par les pouvoirs publics de mécanismes d'incitation à investir dans la transition énergétique plus performants et plus incitatifs. Un nombre croissant d'outils de financement et de reporting dédiés à la transition énergétique ont émergé au fil des années. Les Green Bonds, ou obligations vertes, présentées par Hugues Bouthinon-Dumas et Alain Grandjean en sont le meilleur exemple. Les obligations de reporting financier incluses dans la directive européenne incluses dans le reporting extra-financier de 2014 et l'article 173 de la loi sur la transition énergétique ont beaucoup contribué à la prise de conscience par les entreprises de l'importance de cette question. Enfin, beaucoup de plans nationaux ou européens d'investissement en faveur de la transition énergétique prévoient des financements sous la forme de garanties, de subventions, de prêts préférentiels ou d'incitation fiscale. Mais ces outils ne sont pas toujours adaptés. Emmanuel Normant de Saint-Gobain note que si les mécanismes de soutien à l'investissement sont maintenant bien développés, le soutien financier sur les coûts opérationnels qu'implique la décarbonation des process et des produits n'existe pas encore ou n'est pas encore battu. Or Emmanuel Normant souligne que fabriquer du verre décarboné aujourd'hui est techniquement possible, mais aboutit à la multiplication par deux du coût de production, ce qui en fait un produit inacceptable pour le marché. Dans le cas du CIVC et de la maison Drappier, le comité interprofessionnel des vins de Champagne, les mécanismes étatiques ou bancaires spécifiques à la transition énergétique sont carrément inexistants. On peut en déduire un angle mort de la politique environnementale actuelle qui ne favoriserait que les très gros acteurs économiques et pas suffisamment le tissu économique des PME. Enfin, Francis Derclerck, qui met en avant tous les bienfaits théoriques du marché européen du carbone, nous met en garde sur les limites actuelles d'un système qui ne valorise pas à un prix suffisant le carbone. Il est donc primordial que le marché du carbone soit mieux régulé pour que les prix reflètent les vrais coûts du carbone émis. Il est intéressant de noter qu'aucune de nos entreprises n'a encore utilisé les outils susmentionnés dans le financement de ses politiques de transition énergétique. Les stratégies de financement des entreprises, fil rouge de ce MOOC, sont très intéressantes par leur diversité. Chez Saint-Gobain, le prix du carbone est au coeur des décisions d'investissement et au coeur des décision de R&D. Chez Essilor, on a dédié un budget Capex, ou investissement centralisé au siège, spécifique au changement climatique, qui vient s'ajouter au budget d'investissement des Business Units et des départements. Cela permet ainsi aux entités opérationnelles de réaliser plus facilement les investissements nécessaires à la transition énergétique. Enfin, le comité interprofessionnel des vins de Champagne, le CIVC et Drappier, milite pour réorienter les financements existants et ajouter des conditionalités environnementales plutôt que des financements additionnels. Sinon, on risque d'avoir des incohérences avec le Business As Usual. Dans leur esprit, le budget transition énergétique ne doit pas servir à limiter les dégâts causés par les autres budgets. On voit qu'il reste encore beaucoup à faire du côté du financement de la transition énergétique. Les besoins sont énormes, mais les opportunités le sont aussi. par exemple, les investissements dans l'éolien offshore se chiffrent en plusieurs milliards d'euros par projet. Une entreprise comme Total prévoit d'investir 1,5 à 2 milliards d'euros par an dans l'électricité bas carbone. La crise du Covid-19 a révélé que les entreprises avec une forte composante ESG avaient mieux résisté que les entreprises plus classiques. Cela montre un peu plus l'intérêt de prendre en compte les critères ESG, environnement, social, gouvernance, et plus particulièrement le climat pour s'y conformer. Les investisseurs sont en train d'en prendre note, il faut anticiper une croissance de la finance climatique. Un autre point positif à noter est qu'il est possible de financer sa transition climatique sur des fonds propres en fléchant ses investissement vers des options favorables à la lutte contre le changement climatique. Drappier a réussi à rentabiliser sa première phase d'investissement en photovoltaïque en huit ans, et maintenant, cette tranche du projet crée de la valeur pour l'entreprise. [MUSIQUE]