[MUSIQUE] [MUSIQUE] Les scientifiques nous alertent sur le fait qu'il est important de limiter la hausse de la température planétaire sous la barre des 2 degrés par rapport à son niveau d'avant la révolution industrielle. Au-delà, nous courons le risque de dérèglements incontrôlables aux conséquences potentiellement dévastatrices pour l'humanité. Les États du monde entier se sont engagés en 2015 par l'accord de Paris à respecter cette limite, et si possible à faire mieux en visant une limite aussi proche que possible de 1,5 degré. Rappelons que la hausse de cette température a d'ores et déjà dépassé 1 degré Celsius. Les États se sont engagés à ce que le monde devienne neutre carbone vers 2070. Plus précisément, nos émissions ne devront pas dépasser les capacités d'absorption de la biomasse gérée par l'homme. Le GIEC a évalué à environ 1 000 milliards de tonnes de CO2 à partir de l'année 2010 notre budget carbone pour le CO2, c'est-à-dire la quantité de CO2 que nous pouvons encore émettre pour respecter cet objectif de 2 degrés. Comme nous en émettons environ 34 milliards par an, cela voudra dire qu'à ce rythme, nous aurons épuisé ce budget en 2040. Mais il est clair que nous ne pourrons pas arrêter d'émettre du jour au lendemain. Nous devons donc réduire nos émissions dès maintenant. Le rythme à adopter est une baisse de l'ordre de 3 % par an de 2020 à 2030 pour garder une chance de rester sous les 2 degrés. Il faudra ensuite poursuivre la réduction de nos émissions. Il s'agit donc d'une baisse soutenue, d'un effort constant à entreprendre, en priorité dans les pays aux émissions par habitant élevées, ceux dont le mode de vie est le plus énergivore pour simplifier. Les pays les plus pauvres peuvent encore accéder à un mode de vie plus confortable et émettre plus, mais ceci suppose un effort d'autant plus important des plus riches. Insistons sur deux idées importantes. Premièrement, le climat n'attend pas. La machine climatique est déréglée et ce phénomène est irréversible car la concentration de gaz à effet de serre a augmenté et continue d'augmenter. Nous sommes engagés dans une course de vitesse. Si nous retardons nos efforts de réduction, la contrainte sera encore plus difficile à respecter. En effet, ce qui compte en matière de réchauffement climatique, c'est la quantité totale de gaz à effet de serre stockés dans l'atmosphère. Si nous retardons le moment où nous réduisons nos émissions, la vitesse de réduction à adopter sera encore plus grande. Nous aurons continué à cumuler dans l'atmosphère des gaz à effet de serre, alors que l'objectif reste le même et la date d'atteinte de la neutralité carbone reste la même. Décaler le début de la réduction c'est se contraindre à accélérer plus tard le rythme de réduction, ce qui sera encore plus difficile. Deuxièmement, il nous faut aussi préserver et développer ce qu'on appelle les puits de carbone anthropiques, c'est-à-dire pour l'essentiel les forêts et les prairies qui stockent du carbone par photosynthèse. Une partie du CO2 émis est captée par les océans, mais nous ne pouvons pas agir sur ce levier. Concernant les forêts, notre responsabilité est directe. Aujourd'hui, nous continuons à détruire des forêts comme par exemple au Brésil. Il nous faut au contraire cesser de déforester et replanter massivement, tout en veillant à ce que ces plantations soient résistantes aux changements climatiques en cours et soient favorables à la biodiversité. De nombreux programmes sont en cours dans le monde entier mais ils sont encore insuffisants car la déforestation est encore bien trop importante. Elle est d'ailleurs souvent liée à l'alimentation de nos animaux. Le changement de mode alimentaire vers un régime moins carné a donc des effets positifs sur les puits de carbone en réduisant la déforestation. Dernier plan que nous allons évoquer : le cas de la France. La France s'est engagée dans la voie de la neutralité à l'horizon 2050. Elle a adopté en 2015 une loi de transition énergétique, et par décret une stratégie nationale bas-carbone. À l'horizon 2050, ses émissions de gaz à effet de serre devront se limiter à environ 80 millions de tonnes de CO2, alors qu'elles s'élèvent en 2018 à près de 450. Nos émissions doivent donc être divisées par près de 6. Des budgets carbone ont été définis par période, 2015-2018, 2018-2023, 2023-2028, pour dessiner la trajectoire à suivre. L'atteinte de la neutralité carbone en 2050 concerne tous les secteurs : l'agriculture et la foresterie, l'alimentation, le transport, la production d'énergie, l'immobilier, l'industrie, le tourisme, la distribution, la santé. Certains de ces secteurs vont devoir réduire presque à zéro les émissions directes qu'ils génèrent. Pour d'autres comme l'agriculture, ce sera probablement impossible. Les émissions de méthane du cheptel bovins et ovins ne peuvent disparaître. Pour l'industrie lourde, cela supposera des innovations significatives. Notons que cette stratégie doit en outre veiller à ne pas accroître les émissions faites hors de France par exemple pour fabriquer ou transporter les produits que nous consommons en France. Dans l'ensemble, il apparaît que la neutralité carbone est accessible techniquement. Elle nécessite en revanche des changements de comportement et des investissements importants. Dès lors, la puissance publique doit mettre en place toute une gamme de dispositifs réglementaires, fiscaux et financiers pour impulser et accompagner la transition. Où en est-on? Malheureusement, le premier budget carbone n'a pas été respecté. Une révision de la stratégie nationale bas-carbone est en cours en 2020, qui proposera en outre un quatrième budget 2028-2033. L'ambition de la France est donc indiscutable, mais à ce stade, les résultats sont encore insuffisants, comme l'a constaté dans son premier rapport de 2019 le Haut conseil pour le climat, entité indépendante chargée de suivre le respect des engagements du pays. Il y a encore beaucoup d'efforts à faire, notamment dans le domaine du transport et du bâtiment. Le défi climatique est donc encore largement devant nous et va nous demander une mobilisation accrue. [MUSIQUE] [MUSIQUE]