[MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] Contrairement aux émotions primaires comme la joie, la peur ou la colère, la culpabilité ne se manifeste pas dès la naissance. Elle fait partie des émotions dites réflexives, qui demandent une conscience de soi, c'est-à-dire être en mesure de prendre conscience de ses propres actions et des conséquences qui en résultent. À quel âge alors les enfants commencent-ils à éprouver de la culpabilité? Pour le savoir, des chercheurs américains ont réalisé une expérience avec de jeunes participants, une expérience que nous avons reproduite, et qui, vous allez le voir, est aussi ludique qu'instructive. >> Entrez seulement. Venez, venez, venez. Vous pouvez vous asseoir là. >> Pour cette expérience, nous avons convié huit parents et leurs enfants. >> C'est qui qui vient par ici aussi? Tu as pris ton hélicoptère, toi. Eh bien dis donc, c'est quelque chose! >> But de l'opération, un peu cruel il faut bien le dire, induire chez ces enfants âgés entre deux ans et demi et trois ans de la culpabilité. >> Il est joli. ll est grand ton toutou. Tu peux même dormir avec. >> Première étape, mettre à l'aise nos jeunes invités. Elle est trop jolie ta licorne aussi. [BRUIT] C'est trop bien. >> Pour Luigi, il s'agit ici de créer un lien avec ces futures victimes. >> Tu fais quoi avec ça? Entre seulement, Isaac. La maman, vous pouvez aller écrire là-bas. >> Les présentations faites, les enfants sont appelés tour à tour à venir jouer avec Luigi et son ourson Mario. À ce stade de l'expérience, l'enfant ne sait pas qu'il est filmé. Une caméra se trouve discrète derrière une vitre sans tain. >> Mario, tu as vu, il y a une petite voiture pour toi. C'est quoi, une ambulance? >> Non, un bus. >> C'est un bus? >> Le parent, mis dans la confidence, reste dans la pièce, occupé à remplir un formulaire. >> Je peux rouler sur lui? >> Oui. C'est quand même mon jouet préféré. Je ne veux pas non plus trop l'abîmer. >> Ça fait des bisous. >> Comme dans l'expérience originelle, au bout de quelques minutes de jeu, Luigi va s'absenter. >> Et tu sais quoi, en fait Isaac, il faut que je revienne. Je viens dans deux minutes. Tu peux jouer avec Mario et puis les voitures, comme ça, Mario, il ne se sent pas seul. >> Il confie son ours Mario à l'enfant en lui demandant d'en prendre soin. [BRUIT] La peluche de Luigi, a priori inoffensive, va réserver une surprise à l'enfant. [MUSIQUE] >> J'ai cassé Mario. [MUSIQUE] Où est [INCOMPRÉHENSIBLE] >> C'est moi. >> Regarde. C'est tombé. >> Mais qu'est-ce qui est arrivé à Mario? >> Il s'est fait mal. Il est tombé tout seul. C'est pas moi. >> Mais il s'est cassé! >> Oui. >> On peut remettre son pied. >> On peut remettre le pied? >> Oui. >> Mais on fait comment? Comment on fait ça? >> [INCOMPRÉHENSIBLE] avec le pied, celui-là. >> Il faut faire quoi avec ça? >> L'incident va provoquer chez l'enfant différentes réactions. Notre experte en émotions Anne Theurel les observe attentivement. >> Au retour de l'expérimentateur, il va spontanément se diriger vers lui et lui dire que l'objet est cassé, donc reconnaître un peu la faute et proposer une tentative de réparation de cet objet. [MUSIQUE] Chez un autre enfant, on observe plutôt des comportements de fuite, donc l'enfant se dirige tout de suite vers sa maman. >> Ben! Qu'est-ce qui est arrivé à mon jouet? Il est cassé. >> Mais! >> Je veux qu'on rentre à la maison. >> On voit qu'au retour de l'expérimentateur, elle va le fuir du regard. >> Je veux qu'on rentre à la maison. >> C'est des comportements que les chercheurs associent à la honte, puisque c'est des réactions comportementales qu'on observe également chez l'adulte en réponse à cette émotion de honte. À l'inverse, en réaction à la culpabilité, on va plus observer ces comportements d'excuses, de confession, de réparation de l'objet ou de la faute. >> Il est cassé? Qu'est-ce qui est arrivé à Mario? Il s'est cassé. >> Je sais pas. >> C'est toi qui jouais avec? Qu'est-ce qui s'est passé avec Mario? >> Grâce à cette étude, les chercheurs ont montré qu'il y aurait deux profils distincts, les enfants de type honteux, qui auraient des comportements plus d'évitement, donc spontanés. Ils vont éviter l'expérimentateur, se détourner de l'objet, et ces enfants ne vont pas chercher à se confesser ou à réparer leurs dégâts. À l'inverse, les enfants de type coupable, eux n'évitent jamais l'expérimentateur du regard, ne se détournent pas de l'objet et vont manifester très rapidement des comportements d'excuses, de réparation ou vont confesser leur faute. [MUSIQUE] [BRUITS] [MUSIQUE] [BRUITS] [MUSIQUE] [BRUITS] >> Mario je suis désolée parce que ton nounours, il a perdu une jamble. >> Quoi? >> Je vais essayer de lui donner >> Selon l'étude de base, 80 % des enfants montrant des signes de culpabilité parlent de l'incident à l'expérimentateur, contre 41 % dans le groupe de ceux qui montrent des signes de honte. C'est deux fois plus. Les enfants du groupe culpabilité sont aussi beaucoup plus enclins à réparer le jouet, 80 % contre seulement 24 % dans le groupe honte. >> Il faut pas faire [INCOMPRÉHENSIBLE] Ouh! Il est cassé. [MUSIQUE] [MUSIQUE] >> J'essaie de [INCOMPRÉHENSIBLE] son pied. >> Mais qu'est-ce qui s'est passé avec Mario? >> J'essaie de [INCOMPRÉHENSIBLE] son pied, et en fait >> En fait il y a plus de pâte. >> Les enfants qui manifestent des réactions typiques de culpabilité telles que les excuses, les réparations, les confessions, vont manifester plus de capacité d'empathie, plus de comportements prosociaux. Par exemple, ces enfants seront plus à même d'aller amener à l'expérimentateur son jouet précieux s'il manifeste qu'il est triste, que les autres enfants. >> Mon papa, il a de vraies colles. >> Tu crois? Ton papa, il peut peut-être mettre de la colle, alors? >> Oui, il peut mettre de la colle. Maman, tu peux appeler mon papa pour qu'il répare [INCOMPRÉHENSIBLE] >> On voit chez cet enfant, tant que l'expérimentateur ne lui a pas dit que ce n'était pas sa faute, il va continuer de lui proposer une solution de réparation. Il veut recoller à tout prix cette jambe, il propose même l'aide de son père qui a des outils pour recoller la jambe de l'ours. Et du coup, ces comportements d'excuses et d'avoir envie de réparer et de changer les choses ne disparaissent pas tant que l'adulte ne lui a pas dit que ce n'était pas sa faute. [MUSIQUE] >> C'est moi qui répare? >> Moi, je sais pas tout faire toute seule. >> Tu sais pas tout faire toute seule, toi. Mais en fait, il s'était déjà cassé la semaine dernière. >> Oui, oui. >> Et puis j'avais mis de la colle mais ça n'a pas bien tenu dont il faut que j'en remette un peu. J'avais oublié. Là là. Mario, on va te remettre de la colle et puis [MUSIQUE] [MUSIQUE]