[MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] Alors, à travers cette séquence, je vais aborder avec vous les effets bénéfiques du jeu de faire semblant sur le développement cognitif, socio-affectif et linguistique chez l'enfant. Pour de nombreux chercheurs, le jeu de faire semblant constituerait ce que l'on va appeler l'activité maîtresse chez les enfants d'âge préscolaire, donc de trois à six, sept ans. En effet, ce serait l'activité la plus susceptible de générer des gains au niveau du développement global de l'enfant. Donc, de nombreuses recherches révèlent justement un effet de cette forme de jeu, du jeu de faire semblant, et notamment tout particulièrement de sa forme la plus élaborée, la plus coopérative, celle qui englobe justement des représentations symboliques, où il y a présence de rôles, de scénarios qui sont imaginés par l'enfant, où il y a également respect d'un certain nombre de règles qui correspondent au rôle choisi par l'enfant. Donc, cette forme-là de jeu aurait un impact plus fort sur le développement notamment global de l'enfant. Alors, on va aborder ensemble ces différents éléments. Au niveau cognitif, qu'est-ce qu'on peut observer ? Le jeu de faire semblant facilite ce que l'on va appeler la décentration cognitive, qui renvoie justement à l'habileté à prendre la perspective de l'autre, c'est-à-dire à pouvoir observer le monde et les objets du monde à travers les yeux de l'autre. Typiquement, lorsque les enfants sont engagés dans un jeu de faire semblant justement plus social, par exemple, ce crayon, si je suis moi-même un enfant, pour moi pourrait tout à fait représenter une fusée. Alors que pour votre enfant, typiquement, cela pourrait très bien représenter une épée ou un bateau, par exemple. Donc l'enfant, à travers le jeu de faire semblant social, apprend justement à prendre la perspective de l'autre, à essayer de comprendre ce qui se passe dans l'esprit de l'autre. Alors, il ne le fait pas uniquement lorsqu'il doit négocier ce que signifient les accessoires qu'il a à disposition, mais il va aussi travailler cette habileté-là lorsqu'il doit coordonner les rôles, lorsqu'il doit négocier les scénarios du jeu. Ensuite, au niveau cognitif, le jeu favorise également le développement des représentations mentales. Alors, ce développement apparaît lorsque les enfants vont justement séparer la signification qu'ils donnent à un objet de leur forme physique réelle. C'est typiquement l'exemple que je donnais avant. Ce crayon, sa forme physique réelle renvoie à un crayon, mais je peux tout à fait l'utiliser comme le symbole justement d'un bateau ou d'une fusée spatiale. Donc, apprendre à agir non pas avec les objets réels mais avec leurs substituts symboliques justement améliore les représentations mentales, favorise le développement de la pensée abstraite et de l'imagination. Ensuite, on reste toujours sur le développement cognitif, le jeu promeut ce que l'on va appeler le développement des comportements intentionnels. En d'autres termes, le jeu de faire semblant facilite les actions physiques et mentales dites volontaires, c'est-à-dire orientées, dirigées vers un but précis. Donc, à travers le jeu de faire semblant, l'enfant apprend à renoncer à ses impulsions immédiates, et on sait combien c'est difficile pour un jeune enfant de résister et d'inhiber certaines de ses impulsions. Alors, comment le développement de l'intentionnalité est-il rendu possible notamment grâce au jeu de faire semblant ? Ce développement devient possible dans la mesure où l'enfant a besoin de suivre des règles. Dans le jeu de faire semblant, il y a des règles à suivre. Ces règles vont correspondre au rôle choisi. Les enfants vont être amenés à appliquer justement ces règles plus ou moins rigoureusement. Je vous donne de nouveau un exemple. Prenons un enfant qui joue, qui endosse le rôle du patient. Cet enfant va devoir mobiliser un répertoire de comportement qui correspond à ce rôle-là. Un patient, cela n'utilise pas le stéthoscope du médecin, ou alors cela ne demande pas au médecin s'il a besoin d'un médicament ou s'il faut lui mesurer la pression sanguine. Donc, l'enfant va devoir appliquer un certain nombre de règles qui correspondent justement au rôle qu'il est amené à incarner, et du coup, il va devoir apprendre à résister à la tentation également d'interpréter d'autres rôles. En faisant cela, il va exercer justement un contrôle sur son propre comportement. Il va aussi devoir retenir la gestuelle, la démarche, l'intonation du rôle qu'il est en train d'interpréter. Et là où le jeu de faire semblant devient aussi doublement intéressant notamment lorsqu'il est social, c'est que les enfants vont non seulement exercer un contrôle sur leur propre comportement, s'assurer qu'ils suivent bien les règles du jeu, mais il vont aussi, lorsque ce jeu de faire semblant est social, se mettre à exercer une régulation sur le comportement des autres camarades, et s'assurer qu'eux aussi suivent bien les règles du jeu, les règles qui correspondent justement au rôle choisi dans le groupe. En faisant cela, les enfants justement, et là je fais juste une petite parenthèse que je trouve intéressante à relever, le fait de jouer à faire semblant par petits groupes va justement permettre aux enfants qui ont plus de difficultés à contrôler leur comportement justement d'être soutenus par leurs camarades, qui vont leur faire la remarque justement, attention là le patient ne se comporte pas de cette manière-là, donc qui vont exercer un contrôle et l'accompagner dans ce contrôle du comportement. Lorsqu'ils font cela, ils vont mobiliser justement des processus cognitifs de haut niveau, puisqu'ils vont être amenés à comparer les comportements observés aux comportements planifiés et cela va impliquer notamment des fonctions cognitives supérieures, à savoir la planification, le contrôle, la mémoire de travail, retenir le rôle que je suis en train de jouer, le scénario que l'on est amené à réaliser, et ces éléments-là constituent justement des caractéristiques essentielles au comportement intentionnel. Alors, voilà pour les aspects cognitifs. Maintenant, l'impact que le jeu de faire semblant va avoir sur le développement socio-affectif. Il y a un certain nombre de recherches qui montrent que des enfants qui s'engagent dans des jeux de faire semblant plus fréquents et de plus longue durée présentent de meilleures habiletés en régulation émotionnelle lors des jeux de faire semblant, mais également dans leur comportement au quotidien. Qu'est-ce que la régulation émotionnelle, c'est cette capacité à pouvoir gérer et contrôler ses émotions, à pouvoir notamment en moduler l'intensité, ou alors en modifier la nature. Donc, le jeu aura un impact à ce niveau-là. Le jeu de faire semblant a également un impact sur la motivation de l'enfant, puisqu'il génère notamment des affects positifs. On est amené à observer cela également à travers le jeu de l'enfant. Alors, le jeu de faire semblant a également une influence, exerce également une influence sur le développement linguistique de l'enfant, avec des travaux qui ont montré un lien entre jeu de faire semblant et acquisition du langage. Ce lien résulte au moins en partie du fait que le jeu du faire semblant et le langage impliquent tous deux justement cette habileté à symboliser, que j'ai pu évoquer précédemment, quand j'ai parlé des représentations mentales. Et puis, on pense aussi, il y a aussi des travaux qui le montrent, que le jeu de faire semblant a un impact sur les aptitudes en lecture, pour certains chercheurs, l'utilisation justement symbolique des objets, des actions et des verbalisations, prépare les enfants à l'apprentissage de la lecture, qui est fondée justement sur l'emploi de symboles. Donc, voilà pour les différents éléments qui sont justement favorisés à travers le jeu de faire semblant. [MUSIQUE] [MUSIQUE]