[MUSIQUE] Non. Si tel était le cas, ça transparaîtrait dans les indicateurs, leurs logos et les indicateurs nationaux quant à la dégradation de l'environnement, or ça n'est pas le cas. Simplement, ce n'est pas que le problème de la France ; si vous le permettez, je voudrais revenir un petit peu en arrière et de façon plus large, déjà la première chose, c'est de rappeler que, les problèmes qu'on a aujourd'hui, ne sont, qu'en minorité, même s'ils sont très importants, des problèmes de pollution, ce sont des problèmes de flux : flux d'énergie, flux de matière, qui sont directement reliés à nos modes de production ou de consommation, à nos niveaux de vie. C'est bel et bien là qu'est le problème, par rapport aux démographies, démocraties. Si je reviens un petit peu dans le passé, si je regarde le XXe siècle, eh bien, on a eu à faire, grosso modo entre 1890 et 1990, à une croissance de la population mondiale à un facteur 3.3. En revanche, les émissions de gaz à effet de serre, elles, ont augmenté d'un facteur 17. Et cette augmentation d'un facteur 17, elle est le fait des pays industriels, et des seuls pays industriels, à peu de choses près. A telle enseigne, qu'en 1980, grosso modo 50 % des émissions de gaz à effet de serre étaient le cas enfin, relevaient de la responsabilité unique et historique, pour la moitié, j'y reviens, de l'Angleterre, tout d'abord, et des Etats-Unis. Donc, effectivement, les démocraties, compte-tenu de leur contrat, parce qu'elles ont promu le bien-être matériel de tous les citoyens, ont été, la cause essentielle de l'explosion des flux d'énergie, et des flux de matière qui nous posent tant de problèmes aujourd'hui. Alors la France, évidemment, ne fait pas exception, et elle rentre en quelque sorte dans cette catégorie ; cette année, la France accueille la Cop 21, sur la lutte concernant le changement climatique, eh bien, même si elle est le pays qui accueille, elle n'est pas beaucoup plus cohérente que les autres démocraties à ce sujet. D'un côté, on a maintenu toutes les subventions : charbon, pétrole, etc. De l'autre, eh bien, on va, la France est un des pays aussi moteurs pour le fameux Traité de Commerce Transatlantique, sans même que l'on sache, ou que l'on se soucie, des effets, en termes d'augmentation des flux de matière et des flux d'énergie de ces traités, et pourtant, la France fait tout pour que la Cop 21, entre guillemets, soit une réussite. Donc là, on a affaire, en France comme ailleurs, à des contradictions très importantes, et manifestement, nos pays n'arrivent pas à faire face correctement à ces enjeux, parce que cela exigerait une politique systématique et systémique, de laquelle nous sommes très, très loin, et qui d'ailleurs probablement, ne recevrait qu'une approbation d'une partie, seulement, de l'électorat. Et là, nous sommes au coeur du problème. [MUSIQUE] La démocratie participative, c'est une des modalités de ce qu'on appelle en général la démocratie, alors : qu'entend-on par démocratie? Eh bien je vais vous donner une définition, évidemment ça n'est pas la seule possible, mais, on peut entendre par démocratie, l'organisation de l'influence que les citoyens peuvent exercer sur la prise de décision publique. A partir de là, il y a trois modalités différentes, on va commencer par la plus étendue dans le monde moderne, c'est ce qu'on appelle la démocratie délégative ou représentative : on va élire des personnes, qui ont une sorte de blank-seing, mais enfin, quand-même, en fonction d'une trajectoire idéologique, à laquelle devrait correspondre une trajectoire de décisions, et qui vont décider pour nous. Il y a la démocratie directe, où, là, on soumet directement au souverain : au peuple, une décision, qu'il va trancher en votant, en s'exprimant, et là, donc, il n'y a pas d'intermédiaires, c'est le peuple qui décide directement, mais, d'un sujet, par rapport à une question donnée ; et puis effectivement, on a la démocratie participative, et, délibérative, c'est pas tout-à-fait la même chose, je voudrais aussi insister sur cette différence. Ce qu'on entend par démocratie participative, cette fois-ci, ceux qui participent, très généralement, dans une conférence de citoyens par exemple, c'est un petit nombre de personnes ; avec un sondage délibératif, on peut atteindre jusqu'à, 200, ou 300 personnes, et puis ces gens-là vont éclairer, en amont, sur un sujet très particulier, la prise de décision publique. Alors, déjà, différence entre participative et délibérative : la démocratie délibérative est aussi participative, mais, cette fois-ci, la participation, et l'influence, qu'on va pouvoir exercer sur la prise de décision publique, s'accompagne d'une information préalable, que l'on va donner aux citoyens. Par exemple, dans le cas d'un sondage délibératif, on va déjà faire s'exprimer les citoyens, sans aucune information préalable, sur un sujet, ensuite, on va les informer, on va leur donner une information de qualité, quand-même facilement assimilable, et puis ensuite, on va leur reposer la même question, et bien sûr, chacun de nous n'est pas idiot et, en s'informant, on ne répond pas de la même manière à la question posée. Donc, il est important de bien distinguer, démocratie participative et démocratie délibérative, même si le délibératif est une des modalités de participatif. Alors maintenant, c'est les questions environnementales, avec toutes les conférences, depuis Stockholm, 72, Rio 92, etc, qui ont construit ce principe selon lequel, en matière d'environnement, si l'on veut de bonnes décisions, il convient d'aller s'orienter vers le public et de le consulter, parce que c'est lui qui va vivre très directement les effets d'une décision donnée. Alors, c'est fondamental en matière d'environnement, c'est reconnu internationalement, la France a intégré, dans ses lois et dans sa constitution avec la Charte de l'Environnement, ce principe de l'information et de la participation, c'est très important ; mais je dirais que là où le bât blesse, c'est en général le type d'articulation qu'il y a, entre les éclairages ou les recommandations, issus d'une procédure de politique participative, et puis la prise de décision publique. Alors là franchement, en France, on est souvent, dans l'ordre, j'aurais presque envie de dire, du gag, c'est pas très, très, bien articulé. Et souvent, eh bien, l'éclairage du public tombe à plat, et on ne s'en soucie guère. Et ça, c'est un des défauts de notre démocratie. [MUSIQUE] Alors, s'il y avait un risque de dérive autoritaire en matière d'écologie, ça se saurait, et on l'aurait déjà vu. Compte-tenu de l'état des problèmes, prenons le climat : les deux degrés, ça va être extrêmement difficile, entre 1970 et 2010, on a détruit, et là je ne parle pas de la biodiversité, je parle de la biomasse, on a détruit la moitié des mammifères, la moitié des poissons, la moitié des oiseaux, la moitié des amphibiens, la moitié des reptiliens, très sincèrement, s'il y avait un risque d'autoritarisme en la matière, ça se verrait. En revanche, je vous rappelle que le traité de commerce transatlantique, se négocie en secret. Que les citoyens, n'ont pas le droit de savoir et de connaître le contenu de ce traité. Où est l'autoritarisme? Je vous le demande. En ce qui concerne la question du principe de précaution, là aussi, franchement, on est dans l'ordre de la plaisanterie. Il y a une focalisation sur ce principe, pour le rejeter en France, d'ailleurs sans qu'on sache très bien ce qu'il signifie. Le principe de précaution, ça consiste simplement, face à des risques de dommages graves et irréversibles, en matière d'environnement ou en matière de santé, de ne pas attendre d'avoir une certitude par rapport à cette question, pour agir. Donc, c'est un principe qui nous incite à agir, dans un contexte d'incertitude scientifique. Or, ce contexte d'incertitude scientifique, il est pas si fréquent que cela, il est même parfois assez rarissime, et si l'on regarde l'application du principe de précaution en France, qui renvoie à l'article cinq de la Charte de l'Environnement, eh bien très sincèrement, les cas d'application sont assez modestes, et touchent beaucoup plus la santé que l'environnement. En revanche, dans certains cas, comme par exemple les fameux insecticides nouvelle génération néonicotinoïdes, dont on sait qu'ils détruisent les insectes, d'ailleurs c'est tout simple : demandez à vos parents quel était l'état de leur pare-brise? Ou à la génération d'avant si vous êtes trentenaire, eh bien il y a 20 ou 30 ans, quand on faisait 150 km l'été, les pare-brise des automobiles étaient maculés d'insectes. Aujourd'hui, après 150 ou 200 km, vous aurez peut-être deux ou trois moustiques, suicidaires. Donc, très sincèrement, le principe de précaution, est un principe qu'on applique mal, très peu, et c'est une des raisons pour lesquelles la situation est, aujourd'hui, aussi dramatique. Alors, revenons quand-même, si vous le voulez bien, à cette question de la dérive autoritaire possible. Très franchement, si j'étais dictateur, je ne me mettrais pas à faire une politique environnementale, ce qui amènerait encore mes citoyens à être beaucoup plus opposés qu'ils ne le seraient à mes diktats. Et jusqu'au jour d'aujourd'hui, on n'a vu aucun dictateur, s'emparer de la cause environnementale. Maintenant, effectivement, si on laisse les choses dériver, notamment parce qu'on n'aura pas suffisamment appliqué le principe de précaution, et si, face à certaines pénuries, face à des dérèglements climatiques gravissimes, je vous rappelle que, si on dépasse les deux degrés, on dépasse tout simplement sur le haut, le tunnel de variation de la température qui a prévalu depuis grosso modo trois millions d'années, ce sont les mêmes espèces qui ont migré quand on passait d'une ère glaciaire à une ère interglaciaire, et réciproquement. Donc là, effectivement, on risque d'avoir de très, très gros problèmes. Et, face à ces gros problèmes, la tentation autoritaire peut, effectivement, être réelle. Mais c'est précisément, parce que nous n'aurons pas fait, au préalable, un vrai travail démocratique de réduction de ces problèmes. [AUDIO_VIDE]