[MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] Martial, avant de parler des résultats d'analyse atypiques et du futur des contrôles, est-ce que tu peux nous dire ce que tu fais, te présenter rapidement. >> Je suis biologiste de formation, j'ai fait ma formation à l'université de Lausanne et je suis actuellement le directeur du laboratoire antidopage de Lausanne, >> où mon travail essentiellement consiste à expertiser les résultats. >> Est-ce que tu peux également présenter le LAD, le laboratoire d'analyse du dopage? >> Alors le LAD, oui laboratoire suisse d'analyse du dopage est >> un laboratoire qui est accrédité par l'agence mondiale antidopage. Nous sommes une trentaine de laboratoires dans le monde qui avons la même activité, la même accréditation. Ce laboratoire a été créé il y a 25 ans au sein de la médecine légale, de l'Institut de médecine légale. Cette décision a été prise par le CHU, ce qui était le CHU à l'époque, de le mettre dans l'institut de médecine légale parce que finalement, cette activité antidopage est celle qui se rapprochait le plus des analyses toxicologiques qui étaient faites dans le cadre de la médecine légale. Donc voilà , ce laboratoire est accrédité par l'agence mondiale mais il est également accrédité par le service d'accréditation suisse. Donc nous sommes ISO, comme on le dit et on doit suivre les règles internationales pour les laboratoires antidopages. Ces standards internationaux sont dépendants du code mondial, ce sont des règles donc universelles qui sont utilisées, qui sont pratiquées dans tous ces laboratoires accrédités et qui sont la base souvent des discussions devant les tribunaux. >> Le laboratoire était particulièrement innovant notamment sur le passeport biologique. >> Oui, le laboratoire en fait, quand nous sommes arrivés sur le marché des analyses antidopages en 1990, >> l'immense majorité des laboratoires, surtout européens, étaient des laboratoires de chimie analytique qui allaient rechercher une substance particulière, les stéroïdes par exemple. Nous sommes arrivés à l'ère de l'erythropoietine et de l'hormone de croissance, qui ont été synthétisées à la fin des années 80 et donc, nous sommes entrés dans le vaste champ de la biologie. On a quitté un peu la chimie, pour entrer dans la biologie et la médecine et finalement en 1996, on a fait les premières expériences de prélèvements sanguins chez des athlètes. On l'a proposé parce qu'on était dans un environnement hospitalier plutôt que chimique ou pharmaceutique, et c'est ces analyses qui ont été faites en 1996, en collaboration avec l'UCI qui a été d'accord de de mettre en route ces prélèvements sanguins, ces analyses sanguines. Ces analyses qui sont à l'origine du passeport biologique finalement, parce qu'en multipliant ces analyses de sang, évidemment on a tout de suite observé l'aspect, l'intérêt de l'aspect longitudinale du suivi des athlètes. Donc finalement c'est notre appartenance, au CHU, à un hôpital universitaire qui nous a poussés dans cette élaboration du passeport biologique, et le fait aussi que on ait pas mal de biologistes dans l'environnement du laboratoire. >> Alors à propos de résultats, comment est-ce que sont traités ces résultats qu'on qualifie d'atypiques, d'anormaux? >> Les résultats anormaux qu'on appelait précédemment les résultats positifs font l'objet de contrôles très sérieux au sein du laboratoire. Il faut savoir qu'avant de pouvoir déclarer un contrôle anormal, un résultat anormal, on va faire plusieurs vérifications. D'abord une vérification, une confirmation analytique, c'est-à -dire qu'on va retourner à l'échantillon original qui se trouve dans un frigidaire et on va refaire les analyses avec un certain nombre de contrôles, de façon à pouvoir affirmer, confirmer que la substance qui a été retrouvée lors de la première analyse est bien une substance interdite et qu'on a bien pu l'identifier. À la suite de cette confirmation le résultat anormal, c'est-à -dire le certificat d'analyse est produit et il est envoyé à l'autorité antidopage définie au départ. L'autorité antidopage c'est finalement une fédération internationale, une agence nationale antidopage qui aura demandé de faire un prélèvement d'urine ou de sang chez un athlète et qui attend finalement les résultats d'analyse par rapport à cet athlète. Et cette autorité antidopage va ensuite annoncer à l'athlète qu'il y a un résultat anormal qui a été retrouvé. >> Parce que vous, vous n'avez pas le nom des athlètes, c'est-à -dire c'est la fédération, l'autorité qui >> Absolument nous n'avons >> qu'un code sur les échantillons, c'est un numéro qui est unique, qui est connu de l'athlète, qui est connu de l'autorité antidopage, et ce numéro est également intégré dans une, >> de manière générale, pour la majorité des fédérations internationales en tout cas, est intégré dans une base de données internationale qui s'appelle ADAMS. Et ceci permet à l'autorité mondiale antidopage, donc l'agence mondiale antidopage de contrôler, de vérifier les résultats. Donc ce qu'il faut retenir c'est que ce résultat anormal, ce résultat positif est annoncé à l'autorité antidopage et à l'agence mondiale antidopage qui disons est le contrôleur de toute l'activité au niveau mondial. >> Et pour faire quand on a des cas suspicieux, pour faire le suivi, vous pouvez vous occuper du suivi ou pas au laboratoire? >> Alors encore une fois on a des codes, on va recevoir une urine, on fait une analyse, et si le résultat n'est pas >> directement positif, directement anormal comme on l'appelle en français, mais suspicieux, donc atypique, cette information est donnée également à l'autorité antidopage qui elle peut faire le matching, c'est-à -dire qu'elle va pouvoir >> mettre en lien avec d'autres numéros, d'autres contrôles qui ont été faits sur le même athlète. Et tous les athlètes qui sont suivis par ces autorités antidopages ont également un numéro d'identification qui nous est fourni de façon à ce qu'on puisse faire le suivi. C'est le travail essentiellement de ce qu'on appelle la PMU donc finalement notre bureau qui s'occupe du passeport ou qui s'occupe du suivi des athlètes va pouvoir sur la base du numéro d'identification de l'athlète, faire le suivi, regarder quelles sont les variables biologiques qui sont tout d'un coup suspectes par rapport à un athlète donné. >> Et quand on a des athlètes qui ont des AUT, ce qu'on appelle des AUT, des autorisations à usage thérapeutiques, délivrées par un médecin, est-ce que vous arrivez à intégrer ces informations dans vos analyses? >> Les informations ne sont pas intégrées dans les analyses, les analyses sont faites pratiquement en aveugle, on connaît la discipline, on connaît le sport en question, mais la question de l'AUT ne vient qu'après le résultat. Il y a des AUT donc des autorisations pour usage thérapeutique pour des médicaments assez spécifiques comme les corticostétroïdes ou les antiasthmatiques, c'est souvent dans ces cas-là , il y a aussi le cas de la ritaline qui est très discuté, mais dans le fond l'autorité antidopage va nous donner l'information par rapport à une AUT à la suite d'un résultat anormal sur ces substances particulières que sont les corticostéroïdes, les bêta-2-agonistes, donc les antiasthmatiques ou éventuellement la ritaline. Donc l'analyse se fait en aveugle total par rapport à ça et ensuite, il y a une vérification que la présence de cette substance dans le liquide biologique de l'athlète est autorisée par une AUT. >> Ce qui vous oblige à une sorte de réanalyse >> a posteriori. >> Ce qui nous oblige à une réanalyse dans le cas où il n'y a pas d'AUT, c'est-à -dire qu'on va recevoir l'information que ce corticostéroïde particulier présent dans l'urine est dû à une autorisation pour usage thérapeutique et là , >> l'Agence mondiale antidopage nous demande de ne pas confirmer la présence de cette substance, mais il arrive une fois sur deux, que l'autorisation pour usage thérapeutique, par exemple, n'est pas dans la bonne fenêtre d'utilisation par rapport aux résultats qu'on a trouvés. Et dans ce cas-là , l'autorité antidopage et l'AMA nous demandent de faire une confirmation, peut-être une quantification, pour voir si l'application de cette autorisation s'est faite dans un cadre normal. >> Une fois le résultat donné, >> il y a des contestations fréquentes? Est-ce qu'elles sont fréquentes? Et comment ça se passe, ces contestations? Qui va faire une contre-expertise et à partir de quelles informations on peut contester vos données? >> Comme j'ai dit tout à l'heure, le résultat est envoyé à l'athlète et à sa fédération faîtière, en général >> et les contestations sont pratiquement automatiques, c'est-à -dire que dans un premier temps, il y a des explications qui sont demandées à l'athlète et l'athlète, presque par réflexe, va dire non, ça c'est fait dans un cadre normal d'une AUT, comme on en a parlé, >> ou non, je n'ai jamais pris ce médicament, cette substance. Et presqu'automatiquement, l'athlète va demander l'analyse de l'échantillon B. L'échantillon B arrive en même temps que l'échantillon A dans le laboratoire et est congelé directement, pour une potentielle contre-expertise. Donc l'athlète qui conteste le résultat, comme on l'a dit très souvent, va demander qu'on fasse une analyse de l'échantillon B, qui correspond à une contre-expertise. Cette analyse se fait systématiquement dans le même laboratoire, c'est une des règles majeures, je dirais, de la lutte antidopage depuis le début, puisqu'il y a cette existence d'échantillon B, puisqu'il y a la possibilité pour l'athlète de venir lui-même assister à la contre-expertise, et il a la possibilité de venir avec un avocat et un expert scientifique qui peuvent venir dans notre laboratoire. >> Il peut choisir son expert, il vient. >> Il peut choisir son expert. >> Et il vérifie vos procédures. >> Et il va vérifier des procédures. En général, avant une contre-expertise, on doit donner toute la documentation. Il y a aussi une procédure spécifique qu'on appelle disons production du paquet de documentation qui finalement, confirme nos résultats, qui montre tout le suivi de l'échantillon et de l'analyse de l'échantillon dans le laboratoire, qui aboutit aux résultats positifs. Cette documentation est fournie à l'expert de l'athlète, elle est révisée par l'expert et par les avocats, en général, avant que l'échantillon B soit analysé. Pendant l'analyse de l'échantillon B, l'expert et l'athlète, en général, on ne laisse pas les avocats venir pendant toute la procédure analytique, pour des raisons également de sécurité, de tranquillité de la procédure. Mais c'est vrai que l'expert de l'athlète va vérifier les procédures in vivo in situ, c'est-à -dire qu'il peut poser des questions sur tous les éléments de la contre-expertise, la procédure à ce moment-là . Mais là encore, on va produire, admettons qu'on ait le même résultat, c'est-à -dire qu'on confirme par la contre-expertise, le résultat positif obtenu lors de l'analyse de l'échantillon A, dans cas-là , on va devoir produire un dossier analytique complet qui sera ausculté par les avocats et l'expert de l'athlète. >> Et est-ce que ça arrive très souvent d'avoir dans l'échantillon B une différence? C'est-à -dire si on trouve des traces dans l'échantillon A, ça paraît difficile à comprendre que dans l'échantillon B il n'y ait pas de trace? Est-ce que c'est ça qui est contesté? Ou c'est la procédure qui est contestée le plus souvent? >> Alors, c'est extrêmement rare qu'il y ait une différence significative. Il peut y avoir une différence, si sur l'échantillon A on était un peu aux limites du pouvoir de quantification, aux limites de quantification ou de détection du système. Il est demandé de laboratoire de ne pas se mettre dans ces limites-là , de façon à pouvoir assurer que lors de la contre-expertise, on ne soit pas en difficulté. Mais en général, c'est juste, la contestation se fait essentiellement sur la procédure, sur vraiment ce qu'on appelle la chaîne de possession, avant le laboratoire et à l'intérieur du laboratoire, et les contestations peuvent se faire sur certains éléments qui sont retrouvés dans la documentation fournie sur ce suivi de l'échantillon. C'est essentiellement à ce niveau-là que ça se passe. >> Et après, généralement, les gens continuent, vont jusqu'au TAS, le Tribunal Arbitral du Sport? >> Il faut savoir que la majorité des contrôles sont faits sur des athlètes de haut niveau. Et ces athlètes de haut niveau sont, dans la majorité des cas, des professionnels qui ont des contrats, qui ont des sponsors et qui se doivent de faire bonne figure, finalement. Alors, il y a souvent qu'est-ce qu'il faut dire, une interaction avec les organes de communication de la fédération, ça peut être même du pays dans certains cas. Des pays ont eu envoyé des experts pour soutenir leur athlète qui était une figure nationale. Et donc, effectivement, il y a très souvent des contestations qui vont aboutir au Tribunal Arbitral du Sport. Avant le Tribunal Arbitral du Sport, il y a une commission disciplinaire. Mais cette commission disciplinaire, elle est interne à une fédération internationale ou à une agence nationale qui parfois peut se retrouver dans un conflit d'intérêts. Et c'est pour ça qu'on se retrouve assez systématiquement devant le TAS pour des substances lourdes. Disons que c'est rare de se retrouver pour des substances légères comme, légères ou décrites comme telles. Les substances dites spécifiques, comme le cannabis aboutissent rarement devant le Tribunal Arbitral du Sport. Les stéroïdes, les PO, l'hormone de croissance, les substances lourdes pratiquement automatiquement vont aboutir à une procédure du Tribunal Arbitral du Sport. >> Certains contestent les analyses en disant il y a des faux anormaux ou des faux positifs? Est-ce que ça existe, c'est juste? >> Ҫa dépend des substances. Il faut bien savoir que pour certaines substances, c'est relativement compliqué d'aboutir à un résultat qui soit disons sûr à 100 %. On est dans un domaine scientifique particulier. La biologie parfois fait apparaître des exceptions, on peut le reconnaître. Mais on connaît ces exceptions et dans le fond, on travaille toujours dans un cadre où on exclut des exceptions métaboliques, c'est-à -dire que on se met dans une situation où quand on donne un résultat anormal, quand on produit ce résultat auprès de l'instance disciplinaire, nous sommes certains d'avoir exclu ces exceptions métaboliques. >> Alors, on a parlé de l'état actuel, on sait que les consommations évoluent. Il y a de nouveaux produits, de nouveaux modes de distribution. Est-ce que tu pourrais nous dire quel est le futur de ces contrôles antidopage? >> Parler du futur des contrôles antidopage, c'est parler du futur du dopage. Le futur du dopage, bon, c'est vrai qu'on est déjà dans une situation où il y a quelques changements qui se sont créés au sein de la population des tricheurs, si on veut bien. C'est vrai que nos méthodes sont de plus en plus sophistiquées et ont répondu assez rapidement, malgré tout, à la sophistication du dopage. Cette sophistication est venue surtout par l'usage des microdoses, par l'usage de cocktails de substances de plus en plus spécifiques, ça veut dire des substances qui vont agir très spécifiquement sur le métabolisme de l'athlète, de façon à lui permettre d'augmenter sa performance et surtout d'augmenter sa faculté de récupérer des efforts entre des compétitions. Mais les substances qui sont utilisées sont utilisées différemment que le début des années 2000, par exemple. Elles sont utilisées en cocktail, il y a du fine-tuning, en utilisant, par exemple, un cocktail de testostérone pris en micro-doses, en patch, avec de l'érythropoïétine, de l'EPO, qui va se prendre également en petites doses. >> C'est cela qu'on appelle le fine-tuning? >> C'est cela le fine-tuning. On sait qu'il existe certains athlètes ont fait des confessions par rapport à cela et, encore maintenant, en observant, en allant sur des forums, en travaillant dans le milieu, on sait que ce sont les techniques qui sont utilisées. >> Ce qui est mieux en termes de santé, en termes d'éthique, cela reste discutable. >> C'est mieux >> en termes de santé, on est obligé de le dire. Forcément, c'est quelque chose que ces athlètes professionnels ont compris ces dernières années ; ils n'ont pas d'avantage à se ficher la santé en l'air, comme cela se faisait dans les années 1980. Les années 1980 c'était prendre des doses massives de stéroïdes, par exemple, ou dans les années 1990 des doses massives d'EPO, pour arriver à des situations physiologiques complètement exceptionnelles pour l'être humain ; ils prenaient des risques énormes et ils ne duraient pas longtemps. Maintenant, on est dans une zone de fine-tuning qui leur permet de préserver leur santé. Du point de vue réglementaire, c'est clair, c'est du dopage. >> Ils préservent leur santé par rapport à la situation antérieure, mais on ne sait pas encore >> quels sont les effets. >> C'est vrai que c'est très difficile actuellement de se prononcer sur le futur de ces athlètes, parce qu'en général ils jouent avec des hormones qui sont des produits qui, pour certains, pris en certaine quantité, à long terme, ont forcément un effet toxique, mais ils ont surtout un effet >> dont on ne sait pas s'il est réversible ou pas sur leur système hormonal. Bien sûr, dans le futur, il y a le fine-tuning, mais on parle beaucoup de dopage génétique. Le dopage génétique peut prendre plusieurs formes. On pense, bien sûr, à introduire des gènes qui vont eux-mêmes faire travailler le corps humain comme une petite fabrique d'hormones, donc un gène qui va stimuler la production d'EPO, la production de stéroïdes endogènes comme la testostérone. Mais il y a des méthodes intermédiaires en introduisant des molécules qui ont été mises au point par l'industrie pharmaceutique pour agir de manière très spécifique sur des systèmes enzymatiques, des systèmes sur le métabolisme, qui permettent, là aussi, de faire du fine-tuning. On pense que l'avenir du dopage, et donc l'avenir de la lutte antidopage, sera d'aller chercher ce ne sont pas des grosses protéines, c'est ce qu'on appelle des peptides. Ce sont des petits vecteurs qui sont pris de diverses façons, cela peut être par patch, par voie orale, cela peut être des injections. Ces petits vecteurs vont agir sur le métabolisme de façon à faire produire au corps humain les hormones qui sont nécessaires pour la stimulation de la performance. >> En termes de stratégie, si on observe juste >> à un moment, est-ce que cela suffit? Est-ce que les perspectives sont plus longitudinales aujourd'hui? >> Absolument, les perspectives sont plus longitudinales. Actuellement, on sait qu'on a le passeport biologique qui est en place et qui permet ce suivi, mais le passeport biologique, finalement, n'est qu'à ses balbutiements. Le but est d'avoir une cartographie biologique du sportif, c'est le même genre de recherches qu'on fait en médecine pour la santé des personnes normales. Il faut avoir une cartographie de l'état du patient ou du sportif de façon à pouvoir voir s'il y a une variabilité sur certains paramètres. qui indique soit une maladie, soit une manipulation telle que le dopage. C'est vrai que ce sera forcément longitudinal. Le but dans les laboratoires antidopage est de multiplier les paramètres qu'on peut aller rechercher dans cette cascade biologique de façon à ce qu'on n'ait pas besoin de prendre des dizaines d'échantillons par année. On pense aussi au sportif dans ce cas là , et surtout au sportif propre, qui doit subir tous ces contrôles malgré qu'il ne prend pas de produit. L'objectif de la lutte antidopage est de respecter au maximum les athlètes propres, et donc de ne pas trop être intrusifs dans leur vie d'athlète, et de pouvoir attraper, avec le maximum d'indicateurs possibles, ceux qui manipulent, ceux qui jouent avec leur biologie. >> Actuellement, on parle beaucoup de stratégie pluridisciplinaire ou interdisciplinaire. Est-ce que cela se traduit concrètement dans le travail d'un laboratoire? >> C'est en train de venir. La stratégie pluridisciplinaire c'est essentiellement d'observer des faits non analytiques par rapport à un athlète : c'est l'environnement, ce sont des filières de dopage auxquelles on pourrait rattacher certains athlètes. Ce sont essentiellement les autorités antidopage qui vont collecter toutes ces informations et qui vont pouvoir, en discutant avec les scientifiques qui s'occupent du suivi biologique de l'athlète, intégrer des contrôles de manière plus intelligente. Il faut reconnaître que, actuellement, c'est encore le laboratoire qui donne des indices de manipulation pour pouvoir créer une lutte antidopage plus intelligente. Cela peut être, par exemple, des indices de performance, l'observation de pics de performance anormaux par rapport à des entraînements, mais cela peut être des indices de type forensique, c'est-à -dire le rattachement à un réseau de produits dopants. Ceci, je l'ai vu encore dernièrement en discutant avec les ligues professionnelles américaines c'est quelque chose qui marche très bien dans l'intelligence testing aux États-Unis. Ils ont déjà créé ce réseau et ont déjà permis de faire des tests sur des athlètes qui, au laboratoire, aboutissent à des tests anormaux, parce que c'était ciblé et on a demandé spécifiquement des analyses qui étaient rattachées à un réseau de produits dopants très proche de l'athlète. >> Cela peut être un réseau et, par exemple, >> si on a un athlète qui augmente sa puissance, qui fait des progrès très importants, est-ce que on aurait un lien entre un entraîneur qui pourrait contacter un labo ou l'autorité antidopage? >> Le laboratoire, dans ce cas-là , >> en général on met des barrières par rapport à l'activité du laboratoire, a un code d'éthique très strict par rapport à cela et ne va donc se référer qu'à une autorité antidopage bien identifiée. On peut discuter de ces problèmes-là avec l'autorité antidopage, mais il est clair que nous n'allons jamais accepter d'avoir des renseignements d'un coach, par exemple, d'un athlète. On demandera toujours à ces gens d'aller vers une autorité disciplinaire, soit de la Fédération, soit même de l'Agence mondiale antidopage qui reçoit très volontiers ce genre de renseignements pour organiser ensuite des contrôles appropriés. >> Dans le futur, est-ce que les progrès de l'analyse ou les progrès des approches forensiques vont avoir un effet sur les réanalyses, >> et surtout combien de temps, des Jeux olympiques, des championnats du monde, etc.? >> Les réanalyses sont un sujet dont on parle beaucoup maintenant et qui est très intéressant. Effectivement, il y a une amélioration dans les technologies analytiques, mais il y a une amélioration également dans la façon de cibler les bonnes analyses. C'est vrai que, sur les grandes compétitions, le paradigme de contrôle, ou la stratégie de contrôle sur les grandes compétitions jusqu'à maintenant n'a pas été, je dirais, intelligent. Oui, c'était bien, on prenait les médaillés et quelques tirages au sort étaient faits systématiquement. Mais ceci ne permettait pas vraiment de cibler les bonnes substances et les bons athlètes. Maintenant, dans la stratégie des réanalyses, on discute beaucoup avec les grandes fédérations, comme l'athlétisme, et le CIO, en général. On va introduire ces éléments d'intelligence pour aller tester un certain nombre de ces urines qui sont stockées à long terme ou de ces sangs sur des produits dopants ou des méthodes dopantes très spécifiques en lien avec les investigations qui ont été faites au préalable. >> Merci Martial. [MUSIQUE] [MUSIQUE]