[MUSIQUE] [MUSIQUE] Bienvenue dans cette vidéo intitulée La fixation des normes juridiques. Cette vidéo a trois objectifs principaux. Le premier est de connaître les principales composantes de la définition juridique du dopage de l'Agence mondiale antidopage. Le deuxième est d'identifier la complexité de ce qu'est aujourd'hui le dopage. Le troisième est de comprendre certains enjeux sociaux de cette définition. Nous avons vu dans les vidéos précédentes, que la définition du dopage est le résultat de l'histoire de la construction des normes. Ces normes sont aujourd'hui élaborées par l'agence mondiale antidopage, qui a fixé un code mondial antidopage afin que les mêmes règles soient appliquées aux sportifs de tous les pays. Et dans ce code mondial, le dopage n'est pas seulement la consommation de produits. C'est beaucoup plus complexe. Alors qu'est-ce que c'est le dopage aujourd'hui? Le dopage est défini comme une ou plusieurs violations des huit règles antidopage qui doivent être suivies. C'est la violation de ces règles qui entraîne des sanctions. La première règle porte sur la présence d'une substance interdite dans l'organisme. Il existe une liste des interdictions publiée par l'Agence mondiale. Le critère pour être mis sur la liste des produits dopants est que l'usage d'un produit ou d'une méthode est contraire à au moins deux des trois principes suivants. Il est mauvais pour la santé, il améliore les performances, il est contraire à l'éthique sportive. La deuxième règle dit que l'usage d'une substance ou méthode interdite, mais aussi la tentative d'usage sont des fautes. Donc, chaque sportif doit faire en sorte qu'aucune substance interdite pénètre son organisme. Il y a sanction même si ce n'est pas intentionnel. C'est-à-dire que même si vous êtes contaminé par accident, parce que vous vous trompez de médicament par exemple, ou même si votre médecin se trompe, alors vous êtes en faute. L'exemple d'Alain Baxter, Écossais, médaille de bronze en slalom à Salt Lake City en 2002, illustre bien les contraintes de cette règle. Son contrôle positif s'explique par la prise d'un vaporisateur nasal Vicks destiné, selon lui, à soigner un mal de tête avant la course. Il a acheté ce produit aux États-Unis, et dans ce pays, ce produit contient un stimulant très puissant, alors que la version britannique n'en contient pas. Comme cette règle rend les sportifs responsables de toute substance interdite dans le corps, il aurait dû être attentif à sa composition. Le Tribunal arbitral du sport a sanctionné monsieur Baxter, en lui retirant sa médaille, en l'excluant des Jeux olympiques de Salt Lake City, et en lui infligeant une suspension de trois mois. Mais le Tribunal arbitral du sport a tenu à préciser que les juges ont été sensibles à son cas, et l'ont jugé sincère et honnête, sans intention de tirer profit de cette consommation lors de la compétition. Vous pouvez retrouver tous les jugements rendus sur le site du Tribunal arbitral du sport. La troisième règle est le refus ou le fait de se soustraire sans justification valable à un prélèvement de sang ou d'urine. C'est par exemple s'enfuir, ou se cacher quand il y a une notification de contrôle. La quatrième règle porte sur la violation des exigences de disponibilité. C'est-à-dire que les sportifs de l'élite doivent fournir des renseignements sur leur localisation pendant une heure par jour, et ainsi se rendre disponibles pour les contrôles hors compétition. C'est ce qu'on appelle les whereabouts. C'est-à-dire une obligation de localisation qui se fait habituellement par l'utilisation du logiciel ADAMS. C'est le cas du français Teddy Tamgho, champion du monde 2013 du triple saut, avec un saut à 18,04 mètres. Les contrôleurs antidopage l'ont sollicité à trois reprises mais il n'était pas disponible à l'endroit prévu. Il a été suspendu un an, sans avoir été contrôlé positif. Il n'a pas utilisé de produits ou de méthodes interdites, comme par exemple les transfusions sanguines. Mais il est sanctionné parce qu'il a violé la règle 4, sur les exigences de disponibilité des sportifs pour les contrôles hors compétition, et l'obligation de fournir des renseignements sur leur localisation. La règle 5 concerne la falsification ou la tentative de falsification de tout élément du processus de prélèvement ou d'analyse des échantillons. Certains sportifs avaient des fioles d'urines dissimulées, pour donner une urine propre lors des contrôles. Par exemple, en 2004, à Athènes, le Hongrois Róbert Fazekas n'avait pas réussi à donner les 75 millilitres d'urine réglementaire, juste après avoir remporté la médaille d'or du lancer du disque. Il avait évoqué un traumatisme psychologique. Les juges du Tribunal arbitral du sport n'ont pas été convaincus. Ils lui ont infligé une sanction, une suspension de deux ans, après avoir découvert qu'il avait surtout été trahi par une défaillance de la valve du mini réservoir d'urine qu'il avait dissimulé dans son rectum. En 2013, c'est l'athlète italien Devis Licciardi, spécialiste du dix kilomètres, qui a été pris pour l'utilisation d'un faux pénis contenant une urine vierge de tout produit interdit. Il a été sanctionné par une suspension de trois ans, par le Comité olympique italien. La règle 6 sanctionne la possession de substances ou l'utilisation de méthodes interdites pour les sportifs et les membres du personnel d'encadrement aussi. C'est le cas du cycliste Lorenzo Bernucci. La police a perquisitionné son domicile en 2010, et elle y a trouvé des produits dopants. Il n'a pas été prouvé qu'il a pris ces produits dopants. Mais il a été exclu du cyclisme pendant cinq ans, parce qu'il possédait ces produits, et que par ailleurs, il avait déjà été sanctionné pour dopage. La règle 7 porte sur le trafic de substances ou de méthodes interdites. Mais souvent les personnes qui trafiquent ne sont pas les sportifs les plus actifs. Parfois, ils ne sont même pas du tout actifs. L'interdiction de participer à une compétition n'est plus une sanction pour eux. C'est pourquoi certains pays appliquent des sanctions en référence à leur législation sur les stupéfiants. C'est le cas de Patrick Béon. Équipier d'une des meilleures équipes du Tour de France de 1975 à 1977, il a été condamné en 2003 à 30 mois de prison, dont six fermes par la justice française. En 2000, les douaniers interceptent un colis qui lui était destiné. À l'intérieur, une trentaine de pots belges. Pot belge, c'est un mélange d'amphétamines, d'antalgiques, d'héroïne, cocaïne, etc. Il travaille à l'époque pour une marque de sport, et fournissait les produits aux cyclistes. La règle 8 traite de l'administration, ou de la tentative d'administration d'une substance ou d'une méthode interdite à un sportif. Si vous aidez ou incitez à prendre un produit, vous êtes en faute. Il faut noter deux choses. Premièrement, que l'adaptation du code mondial se fait très vite. Par exemple, le xénon, un gaz qui semblerait favoriser la production naturelle d'EPO, c'est une hormone qui favorise la production de globules rouges, a été ajouté à la liste des produits dopants en 2014. Il semble avoir été utilisé par des sportifs aux Jeux olympiques de Sotchi. Mais les connaissances scientifiques sur les effets et les usages du xénon est encore l'objet de controverses. Notamment par certains directeurs de laboratoires antidopage accrédités. Deuxièmement, le Code soulève des questions éthiques et des enjeux de société. Les Codes sont toujours organisés autour de normes dont les contours demeurent en débat. À partir de principes éthiques, pratiques, scientifiques, et culturels. C'est d'ailleurs pourquoi un nouveau Code de 2015 a changé l'ancienne règle 8, qui a été revue, sa portée plus réduite dans le nouveau Code. Mais deux nouvelles règles plus précises s'y ajoutent. La règle 9, qui porte sur la complicité, auparavant dans la règle 8. Assistance, incitation, contribution, conspiration, dissimulation ou toute autre forme de complicité intentionnelle impliquant une violation des règles antidopage, une tentative de violation des règles antidopage. Et la règle 10, qui porte sur l'association au titre personnel ou sportif, entre un sportif et une autre personne soumise à l'autorité d'une organisation antidopage et un membre du personnel d'encadrement du sportif, qui aurait été coupable d'une violation des règles antidopage. On voit que les normes changent, et que le Code évolue en fonction des questionnements et des problèmes posés par l'antidopage. Et les contrôles antidopage ne sont pas sans poser de problèmes. En particulier pour les exigences de localisation. D'ailleurs, pour les chercheurs Kaiser et Smith, ces nouvelles normes répressives soulèvent des questions en matière de droits humains et de liberté. Si on considère le sport comme un travail, il semble en effet difficile d'exiger que pour des raisons professionnelles, un travailleur puisse être localisé pendant les périodes où il ne travaille pas. Mais ne pas exiger une localisation rendrait simplement impossibles les contrôles hors compétition. Et les contrôles rendus impossibles soulèveraient autant, sinon davantage de questions éthiques avec un risque double. Premièrement, celui de l'exclusion du marché du travail de sportifs qui ne prendraient pas des produits en dehors des compétitions. Et deuxièmement, celui de l'accroissement des expérimentations du dopage, comme forme systématique de préparation intégrée à l'entraînement. En conclusion, que peut-on retenir de l'histoire de la mise en place de ces normes juridiques? Premièrement, que la prise ou la possession de produits, l'utilisation de méthodes, l'obligation de disponibilité, la complicité, ou encore le trafic de substances ou de méthodes sont autant d'éléments qui définissent aujourd'hui le dopage et sont bien l'héritage de l'histoire du sport et des enjeux sociaux qui ont été déterminants de la fixation des normes. Deuxièmement, que le code mondial antidopage est le résultat d'un accord entre différents sports, pays et acteurs qui avaient chacun des pratiques différentes. Mais si le Code permet une harmonisation de la juridiction sportive, chaque pays a sa propre justice. Ainsi, dans certains pays comme l'Italie, le dopage peut entraîner des sanctions pénales et de la prison. Alors que dans d'autres pays, il n'y a pas de législation contre le dopage. [AUDIO_VIDE] Troisièmement, le code mondial est régulièrement adapté. Cela s'explique par trois facteurs. Premièrement, les normes évoluaient très vite dans les débuts de la lutte. Deuxièmement, en raison de nouvelles connaissances scientifiques. Et troisièmement, pour s'adapter aux usages des sportifs. Merci d'avoir suivi cette vidéo. [MUSIQUE] [MUSIQUE]