[MUSIQUE] Là évidemment, là ça devient très important ces clauses de règlement des litiges. Encore une fois parce que, si le contrat est exécuté à la satisfaction générale, le texte du contrat n'est pas tellement intéressant. Personne ne s'y référera. Si le contrat n'est pas bien exécuté, il va y avoir des litiges et la première clause que l'on lira dans ce contrat, c'est la clause de règlement des litiges. Évidemment, si elle est mal rédigée, et bien ça se remarquera assez rapidement. Alors quand on parle de ces clauses de règlement des litiges, il y a deux aspects, qui sont en réalité deux aspects assez différents mais liés, parce qu'il s'agit dans les deux cas de, le cas échéant, de trouver une solution en cas de litige. C'est d'abord la question classique du droit applicable au contrat. Je vous en ai parlé dès notre première rencontre. Évidemment, ça ne sert à rien de rédiger un contrat ou de lire un contrat si on ne sait pas quel est le droit applicable. Mais, ça n'en reste pas moins que c'est une clause qui vise en fait un litige. C'est intéressant de savoir quel est le droit applicable au contrat, s'il y a un litige. Et donc, c'est une question qui se traite dans ces clauses de règlement des litiges plutôt à la fin du contrat. C'est la raison pour laquelle, je vous l'avais dit, on lit toujours le contrat par la fin, puisqu'on commence en se posant la question de savoir quel est le droit applicable à ce contrat. Et puis vous avez un deuxième aspect dans ces clauses de règlement des litiges, c'est toute la question du juge compétent. Donc, la question du for ou du mode de règlement du litige. Est-ce qu'on passe par un litige réglé de façon classique, par des tribunaux étatiques, ou alors est-ce que l'on envisage des modes alternatifs de règlement des litiges, et en particulier, le plus classique de ces modes alternatifs, l'arbitrage. Voilà donc, ce sont ces deux aspects que l'on trouve dans ces clauses de règlement des litiges et ce sont deux aspects relativement différents l'un et l'autre. Il faut bien les distinguer. Ce n'est pas parce que vous avez indiqué que les tribunaux genevois sont compétents que le droit suisse est forcément applicable. Ce n'est pas parce que vous avez indiqué que le droit français est applicable que forcément les tribunaux français sont compétents. Il faut vraiment distinguer ces deux questions, même si évidemment elles ont un certain lien, parce que c'est important de savoir à la fois quel est le juge compétent et quel droit il appliquera lorsque il sera confronté à un litige entre les parties. Alors, quelques remarques d'abord sur le droit applicable. À vrai dire, ce ne sont que quelques remarques, parce que je ne vais évidemment pas vous faire un cours de droit international privé. C'est un domaine en soi, le droit international privé, la détermination du droit applicable. Et ce serait présomptueux de ma part que de vouloir intégrer dans ce cours, qui n'a que pour vocation que de vous indiquer quelques principes de rédaction des contrats, toute la problématique de la détermination du droit applicable. Toute la problématique des règles de conflit, toute la problématique en d'autres termes du droit international privé. D'autant plus que, à vrai dire en ce qui concerne les contrat, c'est pas si compliqué que ça. C'est pas si compliqué que ça, parce que le principe de base, en tout cas celui que nous avons en droit suisse, en droit international privé suisse, c'est l'article 116 de la Loi sur le droit international privé, c'est que les parties déterminent librement le droit applicable. Et donc, autant la problématique des règles de conflit est un domaine en soi, autant toute la réflexion que l'on doit avoir sur le droit applicable aux différentes relations juridiques est un monde, autant en matière contractuelle, dans la plupart des cas, cette question se résout très rapidement dans une clause d'élection de droit qui n'est pas très compliquée en soi. Alors, il faut faire un tout petit peu attention, parce que premièrement, l'article 116 de la Loi sur le droit international privé n'est pas universel. Et il y a d'autres systèmes de droit international privé, un petit peu plus restrictifs, où l'on exige un certain rattachement entre le droit qui a été choisi par les parties et puis le contrat lui-même. Mais, la tendance lourde quand même, c'est d'autoriser les parties très librement à choisir le droit applicable à leur contrat, sans qu'il y ait forcément un lien particulier entre le domicile où se trouve ces parties ou le lieu où le contrat doit être exécuté d'une part, et puis le droit qui est choisi d'autre part. Donc en d'autres termes, vous pourriez imaginer un contrat entre une société suisse et une société américaine, pour la construction d'une usine en Arabie saoudite, et si vous voulez choisir le droit allemand à ce contrat, c'est tout à fait admissible, même si on se demande vraiment quel est le rapport entre le droit allemand et cette configuration contractuelle-là . Le seul rapport, c'est que les parties souhaitaient que le droit allemand soit applicable et c'est largement suffisant. En tout cas, en droit international privé suisse. Bon alors si ça c'est la tendance, il faut aussi dire qu'il y a en contrepartie une autre tendance, qui consiste à réduire quand même cette possibilité d'élection de droit, pour certains types de contrat. Et en particulier quand même pour les contrats conclus avec des consommateurs. Vous savez que vous avez tout un mouvement de protection des consommateurs, dans l'Union européenne, en Suisse également et de façon plus large dans le monde. Alors si le contrat est conclu avec un consommateur, c'est-à -dire une personne qui acquiert un service pas forcément négligeable, mais un service pour des motifs personnels ou familiaux. Acheter un yacht pour plusieurs millions, ça reste une chose qui est acquise pour un motif personnel ou familial, et bien dans ce cas-là , vous êtes un consommateur et si vous êtes un consommateur, et bien vous bénéficiez des dispositions qui limitent le libre choix du droit applicable dans les contrats conclus avec des consommateurs. On va pas revenir sur ces questions-là . Elles demandent évidemment du lieu du domicile du consommateur. Mais que ce soit un consommateur domicilié en Europe, dans l'Union européenne ou en Suisse, vous avez des limites quant à la possibilité de choisir librement le droit applicable dans un contrat qui a été conclu avec un consommateur. Alors si le contrat, que vous êtes en train de relire, est un contrat qui devra être ensuite imposé à des consommateurs, eh bien il faut évidemment faire attention aux possibilités que vous avez en termes d'élection de droit, elles ne sont pas infinies. Ensuite, si vous êtes dans un contrat commercial, entre deux sociétés commerciales, on peut vraiment choisir n'importe quoi. Et vous avez des clauses qui sont de ce type, assez classiques. This Contract shall be governed by the laws of Switzerland, without reference to its conflicts of law rules. Voilà , là vous avez une clause d'élection de droit tout à fait ordinaire. Je vous explique dans deux minutes pourquoi ils ont exclu les références au conflit de droit. Bon alors, cette clause lorsqu'on la rédige, à quoi faut-il penser? Il faut penser bien sûr au caractère approprié du droit que vous choisissez. Alors évidemment, il faut connaître le droit que vous choisissez, pour être sûr que vous connaissez les limites à la liberté contractuelle que vous allez trouver dans ce droit qui a été choisi par les parties. Ensuite, il y a quelques petits détails auxquels il faut faire attention. Évidemment si l'état dont vous choisissez le droit est un état fédéral, se pose la question de choisir s'il faut choisir le droit fédéral ou le droit d'un état membre de la confédération. Si vous choisissez le droit suisse, le droit privé suisse a été uniformisé au niveau fédéral, et donc on peut choisir, comme ça a été le cas dans cette élection de droit que je viens de vous lire, le droit suisse au niveau fédéral- laws of Switzerland. Évidemment, si vous choisissez le droit américain, comme une bonne partie des règles de droit privé américaines se trouvent dans des droits des états membres des États-Unis, il faut indiquer lequel. Et vous ne pouvez pas dire le droit des États-Unis. Il faut dire le droit de l'état de New York, par exemple, pour préciser votre élection de droit et éviter qu'ensuite on doive interpréter la volonté des parties au moment du choix du droit applicable. Deuxième remarque, lorsque l'on traite du droit d'un état, il faut peut-être déterminer s'il s'agit du droit interne de cet état ou s'il s'agit de l'ensemble du droit de cet état, y compris les conventions internationales qui ont été ratifiées par cet état. Et alors c'est notamment important en matière de vente, puisqu'en matière de vente, vous avez une convention uniforme, internationale, sur la vente internationale de marchandises, la CVIM, la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises, qui est susceptible de s'appliquer et qui est en vigueur notamment en Suisse, mais également dans de très nombreux états dans le monde. Et alors si vous avez choisi le droit d'un état qui a ratifié la convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises, se pose la question évidemment de savoir si vous avez voulu choisir le droit interne de cet état, ou si vous avez voulu simplement vous référer à la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises pour ce qui est des questions qu'elle règle. Par exemple, si l'élection de droit, c'est l'élection de droit suisse, comme c'était le cas dans l'exemple que nous avons vu ensemble- the laws of Switzerland. Est-ce que c'est le Code des obligations? Les articles 184 et suivants du Code des obligations qui traitent du contrat de vente en droit suisse? Ou est-ce que c'est la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises? Alors, on peut pas dire vraiment que la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises, ce soit du droit suisse. C'est du droit mondial, c'est universel, ça a été promu par la CNUDCI, par les Nations Unies. On peut pas désigner ça comme étant du droit suisse. Mais en même temps, la Suisse a ratifié cette convention internationale. Et dès lors qu'elle l'a ratifiée, ça fait partie du droit suisse. Et alors il faut se poser la question de ce que veulent les parties, et si possible elles doivent l'exprimer clairement, soit en se référant à la CVIM, soit en l'excluant par ce qu'on appelle une clause de Opting out, la clause de Opting out, c'est simplement la clause qui indique que on choisit le droit suisse à l'exclusion de la CVIM. Et ce qu'il faut savoir, c'est que si les parties choisissent le droit d'un état contractant, par exemple le droit suisse, sans rien préciser, en principe, en principe, le Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises s'applique. Donc, il n'est pas nécessaire qu'elles l'aient choisie. Et donc il est nécessaire, si elles ne veulent pas qu'elle s'applique, qu'elles l'aient exclue. Voilà , ce sont des questions qu'on peut évidemment se poser lorsque l'on est dans un domaine où se trouvent les conventions internationales susceptibles de s'appliquer au contrat que vous êtes en train de rédiger, et dans ce cas-là , évidemment, ce serait dommage de passer des jours et des jours à plaider l'application ou pas de ces conventions, il vaut mieux soit les avoir exclues soit les avoir intégrées expressément dans votre élection de droit. Ensuite, vous avez peut-être vu dans la clause que je vous ai lue qu'il y avait une expression, qu'on trouve assez souvent, à vrai dire, selon laquelle il s'agit du droit suisse, laws of Switzerland without reference to its conflicts of rules, sans appliquer ses règles de conflit. Alors, c'est une expression assez classique, qui devient un peu inutile, à vrai dire, mais enfin, c'est rentré dans les moeurs, on les trouve assez souvent dans ces clauses d'élection de droit. S'est posée pendant de nombreuses années la question du renvoi. Alors, la question du renvoi, c'était la question suivante. Si vous choisissez le droit suisse, et que dans les règles de droit international privé suisses, on vous dit, pour ce type de contrats, c'est le droit allemand qui s'applique, est-ce que par renvoi ça vous conduit au droit allemand? Bon, évidemment c'est un petit peu absurde parce que si les parties ont dit, c'est le droit suisse qui s'applique, elles veulent que ce soit le droit suisse, pas le droit allemand. Mais ça peut être un peu ambigu. Si, en droit suisse, si on applique le droit suisse, on arrive à l'application du droit allemand. Et donc, la pratique s'est répandue de dire on applique le droit suisse mais pas ses éventuelles règles de conflit qui renverraient à un autre droit, qui renverraient au droit allemand. Et donc, c'est la raison pour laquelle on vous dit dans ce type de clauses, le droit suisse, without reference to its conflicts of rules, c'est-à -dire, le droit suisse sans qu'on renvoie éventuellement à d'autres droits par les règles de conflit suisses. Voilà , ça c'est la problématique du renvoi. Aujourd'hui, il est quand même admis de façon assez générale que le renvoi ne doit pas avoir lieu. C'est prévu dans la loi sur le droit international privé, c'est l'article 14 de cette loi fédérale sur le droit international privé qui, dans la plupart des cas, exclut le renvoi. Donc, cette précision est un peu superfétatoire. Maintenant, elle n'est pas dramatique. Si vous l'avez mise, au moins c'est clair, vous ne souhaitez pas que les règles de conflit s'appliquent. Il faut faire un tout petit peu attention parce que dans ces règles de conflit, il peut quand même y avoir un certain nombre de choses qui sont utiles, notamment en termes de compétence, en termes d'arbitrage, et vous avez des règles sur l'arbitrage dans la loi sur le droit international privé suisse. Et donc, si vous excluez les règles de conflit, on peut se demander si vous excluez uniquement les règles déterminant le droit applicable, ou si vous excluez aussi d'autres règles qui se trouvent dans la loi sur le droit international privé et qui pourraient être utiles pour vous aider à régler un éventuel litige. Donc, je ne suis pas très favorable à cette expression, et si vous l'utilisez, alors peut-être qu'il faut préciser ce que vous entendez par cette exclusion des règles de conflit. Mais encore une fois, si le choix, c'est le choix du droit suisse, il n'est plus nécessaire d'exclure le risque du renvoi. Dernière remarque sur cette élection de droit, et encore une fois, je vais rapidement parce que c'est un domaine en soi que celui de la détermination du droit applicable, lorsque vous choisissez un droit comme étant le droit applicable au contrat, la question se posera le jour où un litige survient entre les parties, et le droit qui s'appliquera, ce sera le droit qui a été choisi par les parties tel qu'il sera à la date du litige, et donc pas forcément à la date de la conclusion du contrat. Pourquoi? Parce qu'un droit est un corps vivant, le droit évolue, le droit fait l'objet de jurisprudences qui le font osciller, parfois, et puis le droit fait l'objet de réformes législatives qui le modifient parfois considérablement. En droit allemand, par exemple, il y a eu une réforme du BGB, qui fait qu'en l'espace d'une année, le droit allemand a considérablement changé, en tout cas en matière contractuelle. Et alors, évidemment, si les parties choisissent un droit, le droit d'un état, ça peut être un peu surprenant pour elles que ce droit-là s'applique dans une version qui serait une version assez nouvelle par rapport à la date où ils ont choisi ce droit, parce qu'entre temps, et bien le droit à évoluer. Alors, il est possible, si on a peur de cette évolution, de mettre dans le contrat une clause de stabilisation, c'est-à -dire de prévoir qu'on appliquera le droit suisse, par exemple, tel qu'il se trouve à la date de conclusion du contrat. C'est assez séduisant, à vrai dire, parce qu'on se dit, au moins, c'est très prévisible. On fait une analyse du droit suisse à la date de conclusion du contrat, et puis, et bien, ce sera le droit tel qu'il est à ce moment-là qui s'appliquera à l'exclusion de toute évolution législative ou jurisprudentielle à propos de ce droit. A vrai dire, ce sont des clauses qui sont plus problématiques qu'elles n'apportent de solutions, parce que qu'est-ce que ça veut dire un droit figé? On ne peut pas empêcher le législateur d'évoluer, on ne peut pas empêcher la jurisprudence d'évoluer. Et, si la jurisprudence a évolué, on ne peut pas empêcher le juge de tenir compte de ces évolutions de jurisprudence lorsqu'il doit trancher des litiges, parce que la jurisprudence ne fait que dire quel est le droit. Et puis lorsqu'il y a des réformes législatives, si le législateur a prévu de nouvelles dispositions impératives, on ne peut pas les écarter par une clause de stabilisation. Donc, ces clauses de stabilisation, dans le fond, elles mettent le juge dans la situation très désagréable de devoir appliquer un droit qui n'est plus en vigueur au moment où il doit l'appliquer. Parfois, un droit qu'il ne connaît plus. Si c'est un jeune juge, il n'est pas forcément informé du droit qui existait il y a 10 ans lorsque le contrat a été conclu, en tout cas, pas bien informé. Les recherches qu'il faut faire à cet égard seront délicates, parce que se pose toujours la question de savoir, est-ce que c'est opportun compte tenu de cette clause de stabilisation. Bref, ces clauses de stabilisation sont séduisantes, a priori, mais à mon avis assez dévastatrices. Elles posent énormément de problèmes dans leur mise en oeuvre et donc je pense qu'il faut accepter le risque, après tout, tout le monde le fait pour toutes nos relations juridiques, il faut accepter le risque que le droit évolue. Lorsqu'on se marrie, on accepte le risque que le droit matrimonial évolue, et on ne va pas exiger que le législateur ne modifie pas le droit matrimonial. C'est la même chose avec un contrat. On peut essayer d'intégrer une clause de stabilisation dans le contrat, mais elle pose tellement de problèmes de mise en oeuvre ensuite que je pense que c'est plutôt une mauvaise idée et qu'il vaut mieux accepter ce risque d'une évolution de la jurisprudence ou de la législation. Voilà , mais mise à part cette question un tout petit peu marginale, et bien il n'y a pas tellement de difficultés, en réalité, par rapport à l'élection de droit. La seule chose, évidemment, c'est que cette élection doit être opportune, et pour cela il faut qu'un juriste spécialisé dans le droit choisi par les parties ait relu le contrat pour déterminer si le contrat est valable et fonctionne selon le droit qui a été choisi. [AUDIO_VIDE]