Bonjour. Bienvenue au Mooc Restructuration des quartiers précaires des villes africaines. Notre vidéo d'aujourd'hui est consacrée au système d'administration foncière. Nous avons vu dans la leçon précédente la confusion des situations foncières de nombreuses villes d'Afrique, du fait de la coexistence de plusieurs systèmes de juridiction. À cette situation s'ajoute celle de l'administration foncière, c'est-à-dire l'ensemble des dispositifs pour gérer la conservation, les transactions, les mutations, les taxations, ainsi que la gestion des conflits des propriétés. Les pays occidentaux se sont battus pendant des siècles pour construire des systèmes d'administration foncière efficaces. Ces mêmes systèmes ont été rapidement introduits dans la plupart des pays d'Afrique lors de la période coloniale ; mais leur faible capacité et les exigences de tels systèmes ont limité leurs performances. La situation vécue à l'heure actuelle est celle d'une rareté, voire d'un manque d'informations foncières fiables. Beaucoup de pays d'Afrique ont adopté une législation foncière basée sur la délivrance de titres, c'est-à-dire une immatriculation des immeubles au livre foncier, qui donne droit à une concession définitive sous forme de titre foncier. Cela suppose donc la mise en place de systèmes d'informations foncières fiables et faciles à gérer. Cependant, bien que des progrès importants soient intervenus dans le domaine de la gestion informatisée, dans le domaine des techniques de levées topographiques et de restitution cartographique, mais également au niveau du matériel et des logiciels, beaucoup de pays en sont encore dépourvus, et restent dans une gestion chaotique et approximative des propriétés foncières. C'est pourquoi il est important d'examiner la nature des outils d'administration foncière que l'on rencontre, à l'heure actuelle, dans les pays. Quels sont les buts recherchés à travers les choix opérés? Quelles sont les possibilités qu'offrent ces outils? C'est à ces questions qu'est consacrée la leçon d'aujourd'hui, que nous traiterons suivant le plan ci-après. Ce plan se structure en quatre parties. Dans un premier temps nous verrons les systèmes d'informations foncières, ensuite le Registre Foncier Urbain, le Cadastre, et nous finissons par les marchés fonciers. Le système d'informations foncières renvoie à deux choses, d'abord un système d'informations, et, au foncier. Il s'agit en fait d'une base de données, destinée à produire une information liée aux parcelles de terrain, et à faciliter leur gestion. Le dispositif mis en place permet de collecter, de traiter, de mettre à jour et de corréler pour produire des informations liées aux parcelles de terrain. Le système d'informations foncières participe à la sécurisation foncière en garantissant les droits sur les parcelles. Il permet d'assurer des ressources fiscales aux collectivités locales, et de contribuer ainsi à l'aménagement et à l'équipement des villes. Le registre foncier urbain est un outil de gestion municipale construit à partir d'une carte parcellaire adressée. Ces registres ont été conçus et mis en place au cours des années 90, pour accompagner les processus de décentralisation qui étaient en cours, notamment au Congo, et au Bénin. Il s'agit en fait d'une base de données qui permet par la suite de développer des applications fiscales, foncières et urbaines, et de renforcer ainsi la maîtrise d'ouvrages communale, par le renforcement des capacités techniques d'intervention, en fournissant notamment la cartographie de base, qui permet de constituer des bases de données, mais également d'améliorer les ressources financières des communes par un meilleur recouvrement des impôts fonciers pour le financement des actions de développement urbain. Le cadastre, quant à lui, est une base de données, qui peut être informatisée ou manuelle, qui comprend d'une part des plans parcellaires, et d'autre part des informations littérales qui se rattachent aux parcelles. Le cadastre fait l'inventaire des propriétés foncières et immobilières, qu'il s'agisse des parcelles de terrains ou encore des locaux. L'inventaire cadastral doit être d'abord descriptif, c'est-à-dire fournir les informations relatives à la localisation, à la délimitation, au statut juridique du propriétaire ou de l'occupant. Il doit ensuite être exhaustif, c'est-à-dire qu'il doit couvrir la totalité d'un secteur géographique pour qu'on ait une uniformité dans la nature des informations disponibles. Il doit enfin être permanent, c'est-à-dire qu'il doit être mis à jour régulièrement ; et il est parfois évaluatif, pour fournir la valeur des biens, ou donner les informations qui permettent de déterminer la valeur des biens. Suivant leurs finalités, on rencontre différents types de cadastre. Le cadastre fiscal permet la gestion des données relatives aux biens fonciers, c'est-à-dire la détermination des diverses taxes. L'information ici à collecter a trait aux éléments permettant d'apprécier la valeur du bien, identification du contribuable. Dans ce cas, le cadastre doit être aussi évaluatif. Le cadastre légal est destiné à l'identification du propriétaire d'une parcelle et à la détermination des droits qui s'attachent à son usage. Il est ici nécessaire de connaître le statut juridique, l'état et les limites exactes de la parcelle, les droits et servitudes qui s'y attachent. Ce type de cadastre exige plus de rigueur que le cadastre fiscal. Comme son nom l'indique, le cadastre polyvalent vise plusieurs objectifs, en relation avec la fiscalité, la légalité, et l'urbanisme. Cet outil permet à la fois d'attester et de garantir les droits, de déterminer les valeurs des biens et de gérer le patrimoine foncier. Le cadastre peut être simplifié lorsque la saisie et le traitement ne concernent qu'une partie de l'information, mais aussi lorsque le stockage et la restitution des données sont aussi simplifiés. Je voudrais terminer cette leçon en disant un mot sur les marchés fonciers qui constituent, aux côtés des filières de productions de terrains et de l'administration foncière, l'autre volet important de la question foncière dans les villes africaines. Les marchés fonciers se développent du fait des politiques d'individualisation, mais également du fait de la demande croissante de terrains à bâtir. L'écart entre l'offre publique de terrains et la demande pousse désormais de nombreux ménages à acquérir leur parcelle sur les marchés. Je dis bien les marchés, puisqu'il en existe plusieurs : des marchés formels et des marchés informels, solidement articulés entre eux, et reposant principalement sur l'écart entre les prix administrés et les prix réels des terrains. Les écarts tiennent également au niveau de reconnaissance légale des parcelles mises sur le marché, parce qu'en effet, chaque acte administratif, qu'il s'agisse d'une légalisation, d'une certification par une autorité légale, a une incidence sur la valeur marchande de la parcelle. La force de la demande est telle que de nombreux métiers prospèrent aujourd'hui autour du commerce des terrains. Il s'agit des intermédiaires, ceux qu'on appellent parfois samsars dans certains pays, des topographes, des géomètres, qui se partagent les bénéfices qu'ils tirent de la revente de nombreux terrains qui s'échangent dans les villes africaines. En conclusion, je dirai que le cadastre, comme tout autre outil d'administration foncière n'a d'utilité que lorsqu'il est régulièrement mis à jour. Les situations urbaines sont encore en mouvement, donc non stables. La distinction entre les différents outils repose principalement sur leurs finalités, et leur niveau de complexité. Paradoxalement, l'imposition foncière est encore peu pratiquée dans les villes africaines. L'amélioration de l'administration des biens fonciers à travers l'adoption d'outils simples et adaptés doit permettre d'accroître les ressources communales, par un meilleur recouvrement consécutif à une meilleure identification des contribuables. [AUDIO_VIDE]