[MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE] Le collaboratif n'est pas nouveau. Derrière cette technique nous retrouvons la notion de liberté laissée aux personnes par les systèmes auxquels elles appartiennent. Dans les années 1940, le sociologue Kurt Lewin va proposer la technique des focus groupes à l'occasion d'un projet de recherche sur le thème du changement, visant à faire changer les habitudes alimentaires des ménagères nord-américaines pour la consommation d'abats. Kurt Lewin va prendre, à l'époque, deux groupes de ménagères. Le premier groupe a été informé du pourquoi et du comment consommer des abats par des experts, et les ménagères de ce groupe sont rentrées chez elles en espérant qu'elles passent à l'acte. Les ménagères du deuxième groupe se sont revues toutes les semaines pendant un mois environ et devaient échanger entre elles sur ce qu'elles avaient cuisiné et les difficultés qu'elles avaient rencontrées. Le résultat fut stupéfiant. Les ménagères qui s'étaient réunies avaient un taux d'adoption du changement dix fois supérieur à celles qui ne s'étaient pas rencontrées. Lewin a appelé ces temps d'échanges des focus groupes. Chaque participant raconte son expérience et pose aux autres des questions en lien avec les difficultés rencontrées. Ainsi, chacun apprend en verbalisant, en écoutant et en échangeant. C'est très simple à mettre en place. Lewin avait utilisé des animateurs afin d'organiser les temps de parole, mais aussi pour permettre l'échange et éviter les dérives. Faites un focus groupe avec vos collaborateurs une fois par semaine, pendant une heure environ, ils échangeront sur leurs pratiques et les difficultés qu'ils rencontrent. Une pratique de fonctionnement collaboratif plus récente est héritée de la logique des focus groupe. Il s'agit de la technique du co-développement, proposée par les auteurs québécois, messieurs Champagne et Payette. Sur un sujet qui pose problème et/ou suscite l'interrogation, il s'agit de constituer un petit groupe, entre cinq et dix personnes environ, et de respecter la méthode suivante, comme le montre le schéma. Dans un premier temps, les personnes recherchent une situation personnelle en lien avec le sujet traité. Il s'agit d'une situation réelle et vécue en lien avec le sujet, et pour laquelle la personne a été en difficulté. Prévoyez environ cinq minutes pour ce temps d'introspection. Dans un deuxième temps, chaque personne énonce brièvement sa situation. Il faut compter environ une minute par situation, soit dix minutes pour dix personnes. Les autres participants ne commentent pas. Il s'agit que tous les participants soient informés des situations des autres. C'est aussi un temps d'écoute, ce qui est très important dans le collaboratif. Le troisième temps vise à traiter les cas des différentes personnes. À tour de rôle, les participants seront client et consultant, alternativement. Une première personne est désignée comme le client, et les autres jouent le rôle de consultants. La personne cliente expose son sujet pendant environ cinq minutes, et les consultants lui posent des questions visant à bien faire comprendre la situation. C'est le temps d'explicitation obligeant la personne à bien définir la situation qui la concerne. Ensuite, les consultants font des propositions qui sont analysées en termes de faisabilité et d'intérêt au cours de l'échange. Ce temps de propositions est estimé à environ cinq minutes, et à la fin, le client fait le bilan des propositions et de ce qu'il compte faire. Une fois la situation d'une personne traitée, on passe à une autre, et ainsi de suite de telle manière que tous les participants auront été consultant et client. Le quatrième temps vise à s'interroger sur la manière dont l'échange s'est déroulé, si les personnes sont satisfaites et les points d'amélioration. Ce temps est évalué à environ dix minutes. Le co-développement est une technique collaborative très efficace et facile à mettre en œuvre. Le temps accordé à une session de Codev varie entre deux heures et quatre heures en fonction du nombre de personnes, et aussi du sujet traité. Au début, il est préconisé d'avoir un animateur qui veille au respect des temps et procédera aux recadrages nécessaires pour que l'échange se fasse uniquement sur les situations des personnes. La pratique montre que lorsque les personnes sont habituées à travailler en Codev, l'animateur n'est plus utile. Une technique consiste à ce qu'un des participants endosse ce rôle d'animateur en plus de sa participation à l'échange. Le Codev est utilisé dans de nombreuses entreprises, à large échelle, comme Covéa. >> Covéa, c'est le premier groupe d'assurances mutualistes en France et qui regroupe trois marques bien connues du public, MAAF, GMF, MMA. Donc derrière ce programme à intelligence collective, en fait c'est une aventure qui date d'il y a dix ans autour du co-développement avec une personne que j'ai remplacée, qui s'appelle Bernard Lévêque, qui a installé un programme expérimental avec 40 volontaires qui ont accepté de faire une expérience autour d'une méthode dite de co-développement. Et de cette expérience est née, peut-être, l'aventure la plus importante certainement en France, je ne dirai pas au monde, puisque aujourd'hui, de 40 ils sont aujourd'hui 1 200 à être passés par ce programme, 600 encore actifs, et surtout 380 qui sont en autonomie, c'est-à-dire qui se réunissent chaque jour, toutes les semaines, dans des séances qui durent une demi-journée, et qui continuent de le faire après dix ans, puisque le volontariat est le principal ingrédient de ce programme. Les apports c'est la conviction déjà que la qualité relationnelle nourrit la performance au quotidien, et ça, c'est quelque chose qui est, comment dire, extrêmement important, et donc les apports sont multiples. Le premier apport ce sont ce qu'on appelle les soft skills, et ça, nous avons la chance de mener des programmes de recherche-action avec la chaire ESSEC, qui ont montré à quel point les soft skills, des capacités comme l'écoute, l'observation, le questionnement, étaient particulièrement nourries au travers de ce programme. Et un élément clé qui est particulièrement intéressant aujourd'hui, c'est que l'espace pour nourrir ce qu'on appelle une capacité de confrontation est vraiment quelque chose qui est significativement amélioré dans ce programme. Et généralement, je ne donne pas de conseil, mais là, cette fois-ci, je vais m'y prêter, puisque dans le Codev nous ne donnons pas de conseil. La première chose en fait, c'est vraiment toujours rester en permanence sur le principe de volontariat. C'est vraiment la volonté des personnes qui est essentielle, et ne jamais décrocher de ce principe, et de ne jamais vouloir prescrire le Codev ou les autres espaces d'intelligence collective, c'est vraiment la personne qui est volontaire, et c'est ça qu'il faut vraiment maintenir. La deuxième chose, en fait, c'est le co-développement et les programmes d'intelligence collective ne se déploient pas. Nous ne sommes pas dans l'informatique, et donc il va falloir faire preuve d'un esprit qui relève plus de l'esprit du jardinier que de l'esprit du pilote. Donc il va falloir tranquillement accepter, et je parle notamment des dirigeants, que les plantes se développent, les plantes, les personnes, et de ne pas vouloir tirer sur la plante pour accélérer sa croissance, mais de faire confiance aux personnes pour qu'elles puissent aller atteindre leur valeur et leur pleine ressource. >> Je vais maintenant vous présenter une autre technique collaborative. Ce sont les ateliers participatifs. Vous connaissez tous la technique du métaplan, qui avait fait fureur dans les années 90. Le métaplan consistait à poser une question à des participants, et ces derniers inscrivaient leur réponse sur des post-its, les post-its avec contenu étaient ensuite collés sur une grande feuille ou un tableau, on appellait ça souvent, brown paper. L'animateur lisait au groupe ensuite les post-its un par un. Les participants commentaient et les idées émises sur les post-its étaient ensuite organisées spécialement dans des grandes rubriques sur le tableau ou le brown paper. Le métaplan est une technique très dynamique et collaborative. Les idées des uns sont commentées et enrichies par les autres. Maintenant les post-its sont électroniques, et des applications digitales permettent d'avoir des rapports en instantané et partagés. Les ateliers participatifs sont une forme plus construite d'ateliers métaplan. Le tableau sur lequel sont mentionnées les idées des participants n'est pas un tableau blanc, mais il est constitué d'un dessin ou d'un schéma qui représente les objectifs de l'échange. Prenons par exemple l'atelier participatif de l'arbre à personnages, mobilisé pour un exercice de catharsis. On montre aux participants un arbre avec différents personnages, et on demande à ces mêmes participants de choisir un personnage qui correspond à la question que l'on souhaite traiter. Le projet stratégique est-il bien compris, l'ambiance est-elle bonne, par exemple. Chaque participant choisit un personnage, pour exprimer sa réponse de manière électronique, ou avec une gommette. Ensuite, l'animateur commente les personnages choisis par ordre décroissant de choix. Il commencera par le personnage le plus choisi, et ainsi de suite. L'animateur demande aux participants de commenter les personnages en lien avec la question sans savoir qui a choisi quel personnage. Le dessin permet de réaliser ce que l'on appelle une latéralisation. Les participants s'expriment à partir d'un dessin sur leur ressenti sans s'exposer, et sans savoir qui a choisi quel personnage. Ainsi, la parole est pleinement libérée, et l'animateur a ainsi accès au vécu des personnes sans que ces derniers soient personnellement exposés. L'animateur dispose ainsi d'éléments pour dresser un diagnostic et envisager des actions. Il existe de nombreux ateliers participatifs que l'on trouve dans des ouvrages dédiés, ou encore en développement personnel et en psychologie comportementale. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE]